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3 Anatomopathologie
3.1 Aspect microscopique :
Classiquement, il s’agit dans 90% des cas d’un cancer épidermoïde (65% actuellement),dans
8% des cas, d’un adénocarcinome (principalement au niveau du 1/3 inf) (30% actuellement)
et dans 2% des cas d’un carcinome anaplasique, d’un mélanome, d’un léiomyosarcome, de
métastases, de lymphome
3.2 Aspect macroscopique :
Le cancer de l’œsophage est le plus souvent infiltrant, parfois ulcéré ou bourgeonnant.
4 Localisation
4.1 1/3 supérieur de C6 à T4 : 10%
Une extension à la sphère ORL et à la trachée est possible. Du fait de cette localisation
cervicale, il est rapidement symptomatique.
Les exérèses sont mutilantes car elles imposent une oesphago-pharyngo-laryngectomie totale
(OPLT) avec une perte de la voix et un trachéostome définitif.
4.2 1/3 moyen de T4 à T8 : 60%
Une extension à la trachée, à la carène, à la bronche souche gauche, à l’aorte et à l’anse du
récurrent gauche sous la crosse est possible.
Lors de l’exérèse, la thoracotomie première est parfois indiquée pour vérifier la résécabilité de
la lésion. L’intervention de référence est alors une oeso-gastrectomie polaire supérieure avec
3 voies d’abord (thoracique, puis abdominale et cervicale) avec anastomose oeso-gastrique au
cou.
4.3 1/3 inférieur de T8 à L1 : 30%
Une extension au péricarde, aux piliers du diaphragme et au cardia est possible.
L’exposition chirurgicale est facilitée par une voie abdominale pure qui permet une exérèse
oesophagienne inférieure associée à une gastrectomie totale ; l’anastomose oeso-jéjunale est
réalisée après une large phrénotomie dans le médiastin inférieur. Il est aussi possible de faire
une résection par 2 voies d’abord, abdominale et cervicale, dite « Blunt » (aveugle) car
l’oesophagectomie est faite à l’aveugle sans thoracotomie donc sans curage médiastinal
moyen ni supérieur. L’anastomose oeso-gastrique est cervicale.
5 EXTENSION
5.1 Locale
L'écho-endoscopie, qui est un examen invasif (réalisé sous anesthésie), et dont les
performances sont dépendantes de l’opérateur, apprécie au mieux l’extension en hauteur et en
profondeur, dans la paroi (avec ses possibilités de résurgences sous-muqueuses à distance) et
dans les tissus environnants. Il n’y a pas de séreuse sur l’œsophage cervical et intrathoracique.
5.2 Régionale
Elle peut atteindre l’arbre trachéo-bronchique, l’aorte, les nerfs récurrents, l’oreillette gauche,
la région hiatale et le cardia.
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5.3 Ganglionnaire
• 1/3 supérieur : vers les chaînes jugulo-carotidiennes, sus-claviculaires et récurentielles
• 1/3 moyen : vers les chaînes médiastinales et inter-trachéobronchiques.
• 1/3 inférieur : vers les chaînes médiastinales, coeliaques et le ganglion de Troisier à la
confluence du canal thoracique avec la veine sous-clavière gauche.
Dans tous les cas, l’extension peut se faire très à distance ; un cancer du 1/3 inférieur
pouvant métastaser au niveau des chaînes ganglionnaires cervicales.
5.4 Métastases viscérales
Elles concernent le foie, le poumon, les os, le péritoine et les ganglions distants.
6 Causes et facteurs de risque
Les facteurs de risque des cancers oesophagiens sont nombreux et bien connus.
6.1 L’alcool et le tabac sont des facteurs de risques indépendants dont l’association
est synergique.
Tableau du risque relatif de cancer de l’œsophage en fonction de la consommation
d’alcool et de tabac
alcool en gramme/j / tabac en cigarettes/j 0-9 10-29 >30
40-80
80-120
>120
7,5
11
50
8,5
13
80
35
80
155
Jusqu’à 30% de cancers O.R.L. (+++) ou bronchique sont associés au cancer de l’œsophage
de façon synchrones ou métachrones en raison de facteurs de risque communs.
6.2 Autres facteurs de risque
- Les traumatismes de l'œsophage : brûlures thermiques, chimiques (20% sténoses
peptiques, 10% oesophagites, les brûlures caustiques (20% à 20 ans), l’endobrachyoesophage,
l’achalasie.
- Les carences vitaminiques (E, C, carotène), riboflavine et rétinoïdes.
- Les régimes carencés en végétaux frais, et protéines animales (Iran).
- La consommation régulière de résidus d'opium.
- Les excès de nitrate et de nitrite (Chine) avec production de nitrosamines qui est un
carcinogène.
- Les mycotoxines et les lésions virales (papillomavirus : HPV type 16 et 18)
- Les radiations ionisantes
- La maladie coeliaque
- La tylose (hyperkératose palmo-plantaire héréditaire)
- Le syndrome de Plummer-Wilson,
Certaines agrégations familiales sans que des facteurs génétiques n’aient été mis en évidence
à ce jour.
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7 DIAGNOSTIC
7.1 Circonstances de découverte
- dysphagie, progressive, aux solides puis aux liquides, aphagie ;
- douleurs rétrosternales ;
- odynophagie : sensation de corps étranger, gène à la déglutition ;
- dysphonie (atteinte récurrentielle), toux à la déglutition (fistules oesotrachéale ou
bronchique) ;
- hématémèse, anémie ferriprive ;
- amaigrissement, altération de l’état général ;
- au cours du bilan d’une lésion ORL ou bronchique dont on recherche une lésion
oesophagienne associée.
Il faut se souvenir qu’il s’agit en fait, dans la grande majorité des cas, d’une maladie générale,
complication de la maladie alcoolique et du tabagisme.
7.2 Diagnostic
Endoscopie oeso-gastrique avec biopsies multiples , au mieux après des colorations
sensibilisatrices (bleu toluidine, lugol). Il faut préciser :
- le niveau de la tumeur par rapport aux arcades dentaires,
- son étendue (hauteur et circonférence),
- la présence de résurgences sous-muqueuses, ou de zones de dysplasie adjacentes.
7.3 Diagnostic différentiel
Ne se pose qu’avant l'endoscopie.
- obstacles organiques : tumeur bénigne, compressions extrinsèques, diverticules, anneau de
Schatzki, sténoses fibreuses ;
- obstacles oro-pharyngés ;
- troubles moteurs (maladie de Chagas, achalasie ) ;
- oesophagites ;
- maladie de système (sclérodermie, LED…).
8 Bilan préthérapeutique
Seuls 10 à 20% des malades sont opérables au moment du diagnostic !
Le bilan pré-thérapeutique a pour but de faire le bilan d’extension et d’évaluer l’opérabilité
des malades.
8.1 Extension
8.1.1 Extension locale :
On recherche particulièrement une paralysie récurrentielle (examen O.R.L. et endoscopie), un
envahissement trachéo-bronchique, une fistule oeso-trachéale ou oeso-bronchique
(fibroscopie bronchique et biopsies multiples) et des lésions associées des voies aériennes et
digestives supérieures.
8.1.2 Extension à distance :
Il faut distinguer les extensions ganglionnaires (sus-claviculaire, chaînes cervicales,
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coeliaque), les métastases viscérales (poumon, foie, os…) et les extensions péritonéales
(ascite, nodules de carcinose perceptibles au TR).
8.1.3 Les moyens d’exploration
Outre l’examen ORL et la fibroscopie bronchique peuvent être demandés :
- TOGD. Il n’a aucun intérêt pour le bilan d’extension. Il est parfois demandé pour préciser
la localisation et de l’étendue de la lésion, visualiser une fistule oeso-trachéale et l’estomac
dont on pourra se servir pour faire une plastie de remplacement (gastroplastie de
remplacement oesophagien).
- Tomodensitométrie (TDM) cervico-thoraco-abdominale. Toujours réalisée mais peu
performante pour les petites tumeurs. Elle permet l’étude des rapports avec l’aorte, l'oreillette
gauche, la trachée et la bronche souche gauche et d’objectiver des adénopathies ou des
métastases hépatiques ou pulmonaires.
- L'écho-endoscopie. Elle ne peut franchir les grosses tumeurs et elle est surtout utile pour
l’étude des petites tumeurs. Elle permet l’étude de la paroi en 7, voir 9 couches et celle des
ganglions médiastinaux et coeliaques, de l’extension locale sur 360°, les rapports avec les
organes de voisinage et de rechercher des résurgences sous-muqueuses à distance.
- L’échographie abdominale et la radio de thorax ont peu de place dans la mesure où la
TDM s’impose.
8.1.4 Au terme de ces examens on réalise la classification de la lésion.
Classification T.N.M.
- Tis : Cancer in situ
- T 1 : atteint la sous-muqueuse
- T 2 : atteint la musculeuse
- T 3 : atteint l’adventice
- T 4 : atteint les structures de voisinage
- NO : absence de ganglions envahis.
- N1 : ganglions locaux
- N2 : ganglions régionaux
- M O : absence de métastases à distance
- M 1 : métastases à distance ou adénopathies cervicales ou coeliaques pour les cancers 1/3
moyen.
Classification en stades
Stades TNM Survie à 5 ans
0
I
Tis, N0, M0
T1, N0, M0
80%
50%
IIA
IIB
T2 ou T3, N0, M0
T1 ou T2, N1, M0
35%
III T3 ou T4, N1, M0 15%
IV tous T, tous N, M1 <5%
Classifications spéciales pour les cancers superficiels
Les cancers T1 muqueux :
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m1 : in situ ou dysplasie sévère
m2 : micro invasif (dans la lamina propria)
m3 : envahissant la muscularis mucosae
Les cancers T1 intra muqueux :
sm1 : sous muqueuse superficielle
sm2 : sous muqueuse moyenne
sm3 : sous muqueuse profonde
Statut ganglionnaire :
T1a : sans franchissement de la muscularis mucosae : des ganglions sont envahis chez moins
de 4% des malades
T1b : avec franchissement de la muscularis mucosae : des ganglions sont envahis chez 30 à
60% des malades
8.2 Opérabilité
Il repose sur un examen clinique, complété par un bilan biologique explorant l’équilibre
électrolytique, la fonction rénale, la fonction hépatocellulaire, l’hémostase, la crase sanguine
et l’état nutritionnel. Il comporte aussi, selon les cas, des explorations fonctionnelles soit
systématiques comme l’exploration de la fonction respiratoire en cas de thoracotomie, soit
ciblées sur l’état du patient comme les explorations cardiaques.
Il est indispensable, dans l’évaluation du pronostic opératoire, de prendre en compte
l’importance des tares associées (pulmonaires, hépatiques, vasculaires, cardiaques, état
nutritionnel…) qui peuvent faire récuser un malade pour une intervention alors-même que sa
lésion est résécable.
8.2.1 La fonction respiratoire :
E.F.R. (un VEMS < 1 litre contre-indique la thoracotomie) et gaz du sang, fibroscopie
bronchique si il s’agit d’un carcinome épidermoïde ou si la lésion siège sur les 2 premiers 1/3
de l’œsophage. Arrêt du tabac 10 jours avant l’intervention.
8.2.2 La fonction cardiaque :
Epreuve d’effort, scintigraphie myocardique, coronarographie…
8.2.3 La fonction hépatique :
Signes d’hypertension portale, d’insuffisance hépato-cellulaire, de cirrhose (score de Child-
Pugh). Signes biologiques d’hépatite alcoolique aiguë
8.2.4 L’état nutritionnel et bucco-dentaire :
Mesure du poids et de l’amaigrissement par rapport au poids de forme (mauvais pronostic si
>10%, protidémie, électrophorèse des protides, carences…). On utilisera la classification
OMS
9 Evolution
9.1 L’évolution spontanée
se fait vers une aphagie totale, une fistule oeso-trachéale ou bronchique, des douleurs
thoraciques postérieures, des métastases ganglionnaires et à distance, une fistulisation de la
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tumeur dans la plèvre ou dans le médiastin (médiastinite carcinomateuse) et le décès du
malade.
9.2 L’évolution post-opératoire
Sur 100 malades, 20 seront opérés. Parmi ces 20 malades, 55% ont une résection à visée
curative R0. 5% décèdent en post-opératoire, les autres sortirons vers J21. 40% des malades
seront vivant à 1 an, 30% sans récidive. 20% seront vivants à 2 ans et 10% à 5 ans. Il s’agit de
10% des 20% de malades opérables.
Les facteurs pronostics sont :
- l’accessibilité à la chirurgie,
- l’envahissement ganglionnaire
La survie des malades opérés, est de 30% à 5 ans si ils sont NO et < 5% si ils sont N1.
10 Principes thérapeutiques
10.1 La chirurgie
Le seul traitement curatif est chirurgical. Il faut noter cependant des guérisons rapportées dans
la littérature avec de la radio-chimiothérapie seule.
La morbidité opératoire est le fait des complications pleuro-pulmonaires, des cardiopathies
ischémiques, des fistules anastomotiques (thoraciques surtout), des décompensations
oedémato-ascitique chez le cirrhotique (qui doit être retenue comme une contre-indication
formelle à la chirurgie).
L’œsophage est un organe à cheval sur le cou, le thorax et l’abdomen. L’oesophagectomie
totale nécessite le sacrifice du larynx, aussi réalise-t-on une oesophagectomie sub-totale ou
oesogastrectomie polaire supérieure avec gastroplastie ascensionnée dans le médiastin
postérieur (lit de l'oesophage) pour toute les tumeurs qui restent à distance de la bouche de
Killian. On rétablit la continuité digestive par une anastomose oeso-gastrique cervicale
(intervention d’Akyama avec abord thoracique premier puis abdominal et cervical, ou
intervention dite blunt en l’absence d’abord thoracique), entre les premiers centimètres de
l'oesophage laissés en place et la plastie gastrique (parfois on recourt à une plastie colique en
cas d’impossibilité d’utiliser l’estomac) ou par une anastomose oeso-gastrique au sommet du
thorax (intervention de Lewis-Santi) avec abord abdominal premier, puis thoracique droit.
La taille des marges de résection est importante pour diminuer les récidives locales : >10 cm :
0% ; 8 à 10 cm :7%, <5cm :20%.
Le choix des incisons et de l’étendue de la résection oesophagienne est fonction de la nature
et du siège de la tumeur.
10.2 Radiothérapie chimiosensibilisée
- Elle est exclusive chez les malades inopérables : Cobaltothérapie de 60 à 70 Grays sur la
tumeur, 45 Grays sur les aires ganglionnaires, fractionnés en 6 semaines et associée à une
perfusion de 5FU continu et de Cis-Platine. Elle obtient 27% de survie actuarielle à 5 ans dans
les meilleurs cas.
- Elle peut être combinée à la chirurgie. Dans ce cas, une radiochimiothérapie de 45 Grays
est effectuée avec réévaluation puis décision de chirurgie ou de poursuite de la radiothérapie.
- La radiothérapie seule n’est envisagée qu’en cas de contre-indication à la chimiothérapie
ou dans le cadre d’un traitement palliatif antalgique en cas de lyse osseuse, part exemple.
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10.3 Traitements combinés à la chirurgie :
Ce sont des traitements à visée curative : chimiothérapie préopératoire 5 FU continu et Cis-
Platine (néo-adjuvante trois cures) ou radiochimiothérapie (voir plus haut), puis chirurgie.
10.4 Traitement endoscopique à but curatif :
Exérèse des lésions m1 et m2.
La photothérapie dynamique est en cours d’évaluation.
La curithérapie à haut débit de dose en complément de l’endoscopie pour les m3 et sm1 à 3
peut être proposée.
10.5 Traitements palliatifs :
Leur but premier est de permettre au malade de s’alimenter, parfois de couvrir une fistule
oeso-trachéale ou bronchique.
- Endoscopie : laser, endoprothèses oesophagiennes (tube de Célestin ou prothèses auto-
expensibles), prothèses trachéales pour une fistule oeso-trachéale,
- Gastrostomie d’alimentation : par voie endoscopique si la lésion reste franchissable, sinon
par voie radiologique.
La prise en charge de la douleur, et de la dimension psychologique et sociale du malade ne
doivent pas être ignorées.
10.6 Surveillance et évolution postopératoire
Une surveillance post-thérapeutique est un peu illusoire et doit être d’avantage un
accompagnement car il n’existe pas de traitement de rattrapage. Il s’agira de mettre en place
les traitements palliatifs utiles.
Rythme de la surveillance :
Tous les 3 à 6 mois pendant 3 ans : Gastroscopie, Radiographie du thorax, tomodensitométrie.
Durant cette surveillance, il faut penser au dépistage des cancers métachrones des voies
aériennes et digestives supérieures : ORL, broncho-pulmonaires.
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Ulcère gastrique et duodénal et gastrite
Christophe Cellier
Service d’hépato-gastroentérologie, Hôpital Européen Georges Pompidou
Objectifs (question N° 290 du programme officiel)
• Diagnostiquer un ulcère gastrique, un ulcère duodénal, une gastrite.
• Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
Ì Les situations d'urgence et la planification de leur prise en charge sont traitées dans
hémorragie digestive, péritonite …
Ì Cet ED comporte également une partie de la question N°174 : prescription et
surveillance des anti-inflammatoires non stéroïdiens
LES POINTS IMPORTANTS
• La maladie ulcéreuse gastrique ou duodénale est une affection chronique
évoluant par poussées.
• Le rôle pathogène d’une infection chronique par Helicobacter pylori (Hp) est
maintenant bien démontré et son éradication permet de prévenir les récidives.
• Les ulcères secondaires à la prise d’Aspirine et d’AINS sont en augmentation
croissante. Ils surviennent plus fréquemment chez des sujets âgés,
polymédicamentés avec des pathologies cardiaques, respiratoires, rénales ou
hépatiques associées.
• Le syndrome ulcéreux typique consiste en des épigastralgies rythmées par les
repas avec un intervalle entre le repas et la douleur d’évolution périodique.
• Le diagnostic de la maladie ulcéreuse gastro-duodénale nécessite la réalisation
d’une endoscopie digestive haute qui permet le diagnostic de l’ulcère, sa
localisation, et la réalisation de biopsies pour rechercher une infection à Hp
associée et d’éliminer un cancer en cas d’ulcère gastrique.
• Les principales complications des ulcères gastro-duodénaux sont l’hémorragie
digestive (la plus fréquente), la perforation et la sténose.
• Le traitement de la maladie ulcéreuse repose sur l’éradication d’Hp associant
deux antibiotiques et un inhibiteur de la pompe à protons à double dose.
• Une prévention des ulcères iatrogènes (Aspirine et autre AINS) peut être
proposée chez tout patient de plus de 65 ans, en cas d’antécédents d’ulcère et/ou
d’hémorragie digestive et chez les sujets atteints de pathologies favorisant la
survenue d’ulcère (cardiopathie, insuffisance respiratoire, insuffisance rénale et
hépatopathie) ou de trouble de la coagulation.
• La chirurgie de la maladie ulcéreuse est maintenant quasi exclusivement réservée
aux complications (hémorragie après échec de l’endoscopie, perforation ou
sténose).
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1 DEFINITION – ANATOMOPATHOLOGIE
L’ulcère chronique est une lésion de la paroi digestive creusant plus ou moins profondément
et atteignant le plan de la couche musculaire. Il est limité et entouré par une réaction
inflammatoire. Lors de la cicatrisation de l’ulcère, il y a réépithélialisation en surface et
constitution au fond d’un socle scléreux. Sur le plan anatomopathologique, il est donc
différencié des pertes de substances superficielles de la muqueuse (abrasion, érosion,
exulcération) qui n’atteignent jamais la couche musculaire et ne laissent pas de cicatrice
fibreuse.
2 EPIDEMIOLOGIE
2.1 Fréquence
La prévalence de la maladie ulcéreuse est d’environ 10 % et son incidence est de 3 nouveaux
cas pour 100 000 habitants et par an. L’ulcère duodénal est 5 fois plus fréquent que l’ulcère
gastrique. La prédominance est masculine avec un sexe ratio de 3/1 pour l’ulcère duodénal, et
voisin de 1 pour l’ulcère gastrique. La maladie ulcéreuse est plus fréquente entre 50 et 70 ans.
La survenue de lésions gastriques ou duodénales au cours de la prise de médicaments anti-
inflammatoires non stéroïdiens est d’environ 5 % à cours terme et 30 % en cas de prise
prolongée. Les localisations gastriques iatrogènes sont plus fréquentes après 65 ans.
2.2 Facteurs favorisant
Des antécédents familiaux de maladie ulcéreuse sont présents chez 25 % des patients. Un
tabagisme actif augmente le risque d’ulcère et retarde sa cicatrisation. Le stress n’a pas de rôle
démontré hormis dans des situations telles que un polytraumatisme, un séjour en réanimation
ou en neurochirurgie.
3 PHYSIOPATHOLOGIE DE LA MALADIE ULCEREUSE
La maladie ulcéreuse résulte d’un déséquilibre entre les facteurs d’agression et les facteurs
protecteurs de la muqueuse gastrique. Les trois principaux facteurs d’agression de la
muqueuse gastrique ou duodénale sont l’acidité gastrique, l’infection chronique par Hp et les
médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens.
3.1 1 - Rôle d’Helicobacter Pylori
Hp est le facteur physiopathologique essentiel de la maladie ulcéreuse. C’est une bactérie
spiralée gram (-) qui s’implante à la surface de l’épithélium gastrique antrale chez plus de 90
% des sujets atteints de maladie ulcéreuse. Grâce à un équipement enzymatique (uréase)
produisant de l’ammoniaque qui neutralise localement l’acidité gastrique, Hp survit
durablement dans l’estomac et adhère aux cellules à mucus. Il s’agit d’une bactérie extra-
cellulaire qui ne pénètre pas dans les cellules gastriques. Elle déclenche une réaction
immunitaire locale et des anticorps sériques qui ne permettent pas cependant une éradication
spontanée. Après une phase aiguë, l’infection devient chronique et entraîne une gastrite
chronique qui prédomine au niveau de l’antre mais peut s’étendre au fundus. Cette gastrite
peut évoluer vers une atrophie glandulaire associée à une métaplasie intestinale et évoluer
vers une dysplasie favorisant la survenue d’un adénocarcinome gastrique. La prévalence de
l’infection par Hp dans les pays développés est d’environ 40 % à l’âge adulte. Dans les zones
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de niveau socio-économiques sous-développé, elle est de 90 %. La transmission est inter-
humaine (oro-fécale dans les pays sous-développés ou oro-orale dans les pays développés) et
survient dans l’enfance avec un rôle prépondérant des contacts étroits entre les individus.
La relation de cause à effet entre l’Hp, gastrite antrale et maladie ulcéreuse est certaine.
L’éradication d’Hp permet la guérison de la gastrite et prévient les récidives de la maladie
ulcéreuse. L’Hp induit une maladie ulcéreuse par plusieurs mécanismes : augmentation de la
sécrétion gastrique acide, libération post-prandiale de gastrine, altération des protéines du
mucus, induction de réactions immunologiques cyto-toxiques. Les facteurs de virulence du
germe, de susceptibilité de l’hôte et environnementaux sont également impliqués. L’infection
par Hp est également impliquée dans la survenue de lymphome gastrique et
d’adénocarcinome gastrique.
3.2 Ulcères iatrogènes
La toxicité gastrique de l’Aspirine et des anti-inflammatoires non stéroïdiens est liée à une
altération de la perméabilité de la muqueuse gastrique favorisant la rétro-diffusion des ions
H+. Elle est due à l’inhibition de la ciclo-oxygénase (COX), enzyme impliqué dans la
synthèse de prostaglandine qui protège la muqueuse gastrique en stimulant le flux sanguin, la
production de mucus et la synthèse de bicarbonate. La mise sur le marché récente d’anti-
inflammatoires inhibant de façon sélective l’iso-enzyme inductible (COX2) impliqué dans
l’inflammation respectant l’iso-enzyme constitutif (COX1) impliqué dans la muco-protection
semble réduire la gastro-toxicité de ces médicaments.
4 DIAGNOSTIC
4.1 Diagnostic clinique
Dans 90 % des cas, la maladie ulcéreuse gastro-duodénale chronique est diagnostiquée en
dehors d’une complication. Le diagnostic, suspecté par l’interrogatoire et la négativité de
l’examen physique, repose sur l’endoscopie haute. Les ulcères iatrogènes sont fréquemment
révélés par une hémorragie digestive.
La douleur ulcéreuse typique et épigastrique, sans irradiation, à type de crampe, de torsion ou
de faim douloureuse, post-prandiale est séparée de la fin du repas par un intervalle libre de 1 à
5 heure. La douleur est calmée par ingestion d’aliments. Elle évolue spontanément par
poussée de deux à quatre semaines pendant lesquelles la douleur est quotidienne et par des
phases de rémission complète spontanée de plusieurs semaines à plusieurs mois (périodicité).
Le syndrome ulcéreux typique, rythmé par les repas et périodique est très spécifique mais sa
sensibilité est médiocre car plus de 50 % des ulcères se manifestent par des symptômes
atypiques.
La symptomatologie de la maladie ulcéreuse est fréquemment atypique : brûlures
épigastriques, localisation ou irradiation atypique, horaires irréguliers, absence de périodicité.
Des nausées et des vomissements peuvent être observés en cas de localisation pylorique. Dans
20 % des cas, la maladie est asymptomatique et est découverte lors d’une endoscopie réalisée
pour une autre raison ou révélée par une complication (hémorragie ou perforation).
4.1.1 Interrogatoire et examen clinique
L’examen clinique est le plus souvent normal. L’interrogatoire est essentiel et recherche les
antécédents familiaux et personnels, les habitudes (alcool, tabac), et les traitements en cours
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(aspirine, AINS, anti-coagulants).
4.1.2 Diagnostic positif
L’endoscopie digestive est l’examen clé du diagnostic de la maladie ulcéreuse gastro-
duodénale. Elle permet de préciser le site de l’ulcère, sa taille, la présence d’une hémorragie
et également de réaliser des biopsies pour rechercher l’Hp ou en cas d’ulcère gastrique.
4.1.3 Endoscopie digestive haute
L’endoscopie est réalisée à jeun, le plus souvent après une simple anesthésie pharyngée. Elle
peut être effectuée dans certains cas sous sédation.
• Au cours de la maladie ulcéreuse, l’ulcère a la forme d’une perte de substance à fond
blanchâtre, bordée d’un bourrelet œdémateux. Au niveau de l’estomac, il siège
habituellement au niveau de l’antre et principalement au niveau de la jonction antro-
fundique (petite courbure angulaire). L’ulcère est rond, ovalaire ou plus rarement linéaire.
L’aspect régulier et non induré des berges avec des plis convergents est en faveur du
caractère bénin de l’ulcération. Compte tenu du risque de cancer se présentant comme un
ulcère, il est néanmoins nécessaire de réaliser de multiples prélèvements sur les berges de
l’ulcération. Au niveau du bulbe et du duodénum, l’ulcère siège le plus fréquemment au
niveau bulbaire. Il est habituellement rond, parfois triangulaire ou linéaire. Dans certains
cas, la maladie ulcéreuse est présente sur les faces antérieures et postérieures réalisant le
« kissing » ulcère. A ce niveau, les biopsies de l’ulcère sont inutiles car il n’existe aucun
risque de cancérisation. Des érosions multiples (bulbite érosive) ont la même signification
qu’un ulcère duodénal classique.
• Dans les ulcères liés à la prise d’aspirine ou d’AINS, les pertes de substance sont plus
souvent multiples et superficielles et prédominent au niveau de l’estomac.
Des biopsies antrales, et éventuellement fundique, doivent être systématiquement réalisées
pour rechercher une gastrite associée à l’Hp. La mise en évidence de l’infection par Hp
s’effectue par un examen anatomopathologique des biopsies antrales avec une coloration
spécifique. Cette recherche a une sensibilité et une spécificité proches de 100 %. La mise en
culture des prélèvements pour antibiogramme n’est réalisée qu’en cas de résistance après une
ou deux tentatives d’éradication. Le test rapide à l’uréase (résultat au décours de
l’endoscopie), repose sur le virage d’un indicateur coloré du fait de l’alcalinisation du milieu
par transformation de l’urée en ammoniaque et CO2 en raison de l’activité uréasique du
fragment biopsique maintenu à 37°. Ce test n’a d’intérêt que du fait de sa rapidité d’obtention
et n’est que rarement réalisé en pratique courante. Les tests non invasifs pour rechercher l’Hp
(test respiratoire à l’urée) ne sont indiqués que pour vérifier l’éradication afin d’éviter
d’imposer au malade une nouvelle endoscopie.
4.1.4 Autres explorations
Le transit baryté œsogastroduodénal n’est plus qu’exceptionnellement indiqué en cas de
sténose rendant la progression de l’endoscope impossible. L’étude de la sécrétion gastrique
acide basale et stimulée n’a plus d’indication en dehors d’une suspicion de gastrinome
(syndrome de Zollinger Ellison).
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
42
4.2 Diagnostic différentiel
Avant la réalisation de l’endoscopie, les douleurs peuvent faire évoquer une pathologie
biliaire, pancréatique, colique ou extra-digestive (coronarienne ou pulmonaire). Un reflux
gastro-œsophagien peut se manifester par des douleurs épigastriques. Le principal diagnostic
différentiel est celui de la dyspepsie fonctionnelle (traitée au chapitre « troubles fonctionnels
intestinaux »).
Lorsque l’endoscopie met en évidence un ulcère gastrique, le principal diagnostic
différentiel est celui d’un cancer gastrique ulcéré. L’aspect endoscopique en faveur
d’une lésion néoplasique sont la présence d’irrégularités et d’une induration des berges,
une attraction des plis au contact de l’ulcération. Il est impératif de réaliser
systématiquement au moins 8 à 10 biopsies sur les berges de tout ulcère gastrique et de
contrôler la cicatrisation par endoscopie et biopsies.
D’autres tumeurs gastriques comme les lymphomes et les tumeurs stromales peuvent se
révéler par un syndrome ulcéreux. Le diagnostic est porté par l’examen anatomopathologique
des biopsies et dans certains cas par une écho-endoscopie.
Le gastrinome ou syndrome de Zollinger Ellison est exceptionnel. Le diagnostic peut être
suspecté devant une maladie ulcéreuse sévère, résistant à un traitement habituel avec des
lésions ulcéreuses multiples ou atypiques (ulcère, ou duodénite ulcérée post-bulbaire).
L’association à une œsophagite, une diarrhée et des antécédents personnels ou familiaux de
néoplasie endocrine peuvent être présents. La tumeur (gastrinome) siège le plus souvent au
niveau du pancréas ou parfois dans la paroi duodénale. Elle a un potentiel malin avec
présence de métastases ganglionnaires et hépatiques dans plus de la moitié des cas. Elle
s’intègre dans le cadre d’une néoplasie endocrine multiple de type I dans 20 % des cas. Le
diagnostic est orienté par la mise en évidence d’un débit acide gastrique basal élevé (supérieur
à 15 mmol/heure) et est affirmé par une gastrinémie augmentée à jeun et après injection
intraveineuse de sécrétine et par la mise en évidence de la tumeur responsable (scanner et/ou
écho-endoscopie).
Une hyperparathyroïdie, qui est le plus souvent associée à une néoplasie endocrine multiple
de type I, peut également être à l’origine d’une maladie ulcéreuse.
5 EVOLUTION ET PRONOSTIC
5.1 Evolution spontanée
En l’absence de traitement, la douleur régresse dans 60 % des cas en 4 à 6 semaines. Il n’y a
pas toujours de parallélisme entre la cicatrisation anatomique de l’ulcère et la disparition des
douleurs. En cas de maladie ulcéreuse régressant spontanément ou après un traitement par
anti-sécrétoire, la récidive ulcéreuse survient dans l’année dans 70 % des cas en l’absence
d’éradication d’Hp.
5.2 Complications
5.2.1 Hémorragie digestive
Il s’agit de la plus fréquente des complications de la maladie ulcéreuse qui survient chez près
de 30 % des patients. La prise en charge et le traitement de cette complication seront traités
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
43
au chapitre « Hémorragies Digestives ».
5.2.2 Perforation
Une perforation, parfois révélatrice, survient dans environ 5 % des cas. Elle se manifeste par
une péritonite aiguë. Son diagnostic et son traitement seront traités dans le chapitre
« Péritonites ».
5.2.3 Sténose
En cas d’ulcère prépylorique ou bulbaire, l’évolution vers une sténose pylorique est possible.
Il s’observe surtout chez les patients non traités avec le développement progressif d’une
fibrose péri-ulcéreuse. Le diagnostic est évoqué devant des vomissements post-prandiaux
tardifs associés à un clapotage gastrique à jeun. L’endoscopie permet de poser le diagnostic,
de réaliser des biopsies pour éliminer une sténose néoplasique et dans certains cas de dilater à
l’aide d’un ballonnet la sténose. En cas de sténose infranchissable, une exploration
radiologique barytée peut être utile.
5.2.4 Cancérisation
Le risque de cancérisation ne concerne que l’ulcère gastrique. Le schéma évolutif est celui
d’un ulcère avec une gastrite chronique atrophique sur lequel survient une dysplasie puis un
cancer. Ce risque estimé à environ 2 % des ulcères gastriques justifie une surveillance
endoscopique et histologique de tout ulcère gastrique et le recours à la chirurgie en cas
d’absence de cicatrisation après traitement médical bien conduit.
6 TRAITEMENT DE LA MALADIE ULCEREUSE
Le traitement médical vise à soulager un syndrome douloureux, cicatriser l’ulcère et prévenir
les récidives et les complications. Il repose sur la diminution de la sécrétion gastrique acide et
l’éradication d’Hp.
6.1 Modalités du traitement médical
6.1.1 Antisécrétoires gastriques
Les antagonismes des récepteurs H2 (anti-H2) ont maintenant été supplantés par les
inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) qui inhibent de façon plus puissante et prolongée la
sécrétion gastrique acide. Les IPP ont très peu d’effets secondaires ou d’interactions
médicamenteuses.
6.1.2 Muco-protecteurs et anti-acides
Les agonismes des prostaglandines (cytotec) ont proposés en association aux AINS pour
prévenir les complications gastro-duodénales induites par ceux-ci. Leurs fréquents effets
secondaires en limitent l’utilisation. Le sucralfate n’est plus prescrit en dehors de la
prévention des ulcères de stress, en réanimation (sans preuve de son efficacité). Les anti-
acides n’ont qu’un intérêt antalgique avant la confirmation endoscopique du diagnostic.
6.1.3 Antibiotiques
Les schémas thérapeutiques les plus efficaces pour éradiquer Hp associé à un IPP prescrit en
double dose et en deux prises journalières à deux antibiotiques sont : amoxycilline 1 g x 2/j,
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
44
imidazolé (métronidazole ou tinidazole) 500 mg x 2/j, claritromycine (500 mg x 2/j) pendant
7 à 10 jours. Le taux d’éradication d’Hp est d’environ 70 % en France. Les effets secondaires
(diarrhée et intolérance digestive, allergie) surviennent dans 20 % des cas. Une observance
parfaite du traitement est indispensable au succès de l’éradication et est une des principales
causes d’échec du traitement.
Dénomination
commune
internationale
Spécialités Posologie habituelle
cimétidine Tagamet®
Cimétidine
800 mg
800 mg
ranitidine Azantac®
Raniplex®
300 mg
300 mg
famotidine Pepdine® 40 mg
Antagonistes des
récepteurs
histaminiques H2
(Anti-H2)
nizatidine Nizaxid® 300 mg
oméprazole Mopral®
Zoltum®
20 mg
20 mg
lanzoprazole Lanzor®
Ogast®
30 mg
30 mg
pantoprazole Eupantol®
Inipomp®
40 mg
40 mg
rabèprazole Pariet® 20 mg
Inhibiteurs de la
pompe à protons
(IPP)
esoméprazole Inexium 20 mg
6.2 Conduite pratique et résultat du traitement médical
6.2.1 Traitement de la maladie ulcéreuse
Les stratégies diagnostiques et thérapeutiques des maladies ulcéreuses duodénales et
gastriques sont résumées dans les figures ci-dessous.
Le traitement initial associe un IPP à double dose (par exemple oméprazole 20 mg matin et
soir, amoxycilline et claritromycine selon les modalités définies ci-dessus. Les douleurs
régressent habituellement quelques jours et la cicatrisation de l’ulcère est obtenue dans près
de 90 % des cas en moins de 4 semaines. Si l’éradication d’Hp est obtenue, ce traitement
permet la survenue des récidives à long terme dans plus de 90 % des cas. L’arrêt des
médicaments gastro-toxiques (aspirine et AINS) et des médicaments anticoagulants ou anti-
aggrégants plaquettaires doit être préconisé. En cas de nécessité absolue, ils peuvent être
poursuivis sous traitement anti-sécrétoire avec une surveillance médicale attentive.
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
45
Stratégie diagnostique et thérapeutique de la maladie ulcéreuse duodénale
SYMPTOMES EVOCATEURS
Ð
Endoscopie gastroduodénale + biopsies antrales pour recherche d’Hp
Ð
IPP + antibiotiques
(Supprimer, si possible, gastrotoxiques et anticoagulants)
Ð
PERSISTANCE OU RECIDIVE DES SYMPTOMES
Ð
endoscopie + biopsies antrales et fundiques
Ð
Si Hp + Si Hp – (situation exceptionnelle)
IPP + antibiotiques Eliminer un gastrinome ou une hypercalcémie
IPP
Ð
ECHEC
Traitement par IPP, lors des poussées ou prolongé
Traitement chirurgical
Stratégie diagnostique et thérapeutique de la maladie ulcéreuse gastrique
SYMPTOMES EVOCATEURS
Ð
Endoscopie gastroduodénale + biopsies de l’ulcère + biopsies antrales pour recherche d’Hp
Ð
IPP + antibiotiques*
(Supprimer, si possible, gastrotoxiques et anticoagulants)
Ð
endoscopie de contrôle + biopsies antrales et fundiques
Ð
PERSISTANCE ou RECIDIVE
Vérifier absence de prise d’AINS
IPP + antibiotiques si persistance d’Hp
Ð
Endoscopie de contrôle + biopsies
Ð
PERSISTANCE
Chirurgie
Pour l’ulcère duodénal non compliqué (non hémorragique par exemple) chez un sujet ne
présentant pas de pathologie à risque associée (cardiopathie, insuffisance rénale, insuffisance
hépatique ou insuffisance respiratoire), de moins de 65 ans et sans trouble de la coagulation
(spontanés ou liés à des prises médicamenteuses), le traitement d’attaque peut être interrompu
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
46
après les 7 jours de trithérapie (deux antibiotiques + anti-sécrétoire à double dose). La
poursuite du traitement anti-sécrétoire (à simple dose) pendant trois semaines supplémentaires
et le contrôle endoscopique (six semaines après la fin du traitement anti-sécrétoire) sont
recommandés en cas de poursuite d’un traitement par anti-coagulant, aspirine ou AINS, de
complication inaugurale ou de persistance des symptômes malgré un traitement initial bien
conduit. En l’absence d’une endoscopie de contrôle, l’éradication d’Hp doit être contrôlée par
un test respiratoire (cf ci-dessus) réalisé quatre semaines après l’arrêt des IPP et des
antibiotiques.
En cas d’ulcère gastrique, un traitement anti-sécrétoire (IPP à dose classique) complémentaire
de quatre semaines est préconisé après la trithérapie initiale de 7 jours. Un contrôle
endoscopique avec des biopsies systématiques sur la cicatrice de l’ulcère doit être effectué six
semaines après la fin du traitement anti-sécrétoire. En l’absence de cicatrisation, un nouveau
traitement de six semaines est prescrit par un IPP associé à un traitement antibiotique différent
(remplacement de la claritromycine par un imidazolé) en cas de persistance de l’infection par
Hp. Un nouveau contrôle endoscopique est réalisé douze semaines avec réalisation de
biopsies systématique. En l’absence de cicatrisation à ce terme, un traitement chirurgical peut
être proposé.
En l’absence d’infection par Hp, une éradication de principe est cependant recommandé. En
cas d’ulcère duodénal non lié à Hp, et persistant malgré une tentative d’éradication d’ Hp. Un
traitement préventif peut être proposé en utilisant des anti-H2 ou des IPP dans certains cas.
6.2.2 Echec d’éradication d’Helicobacter Pylori
L’échec d’éradication d’Hp peut être reconnu par la pratique du test respiratoire (maintenant
disponible et remboursé par la sécurité sociale). Après une ou deux tentatives d’éradication
inefficaces, la réalisation de biopsies avec antibiogramme peut être préconisée pour adapter le
traitement antibiotique. En pratique courante, après un premier échec de l’association
classique, il est recommandé de remplacer la claritromycine par un imidazolé pendant une
durée de 10 à 14 jours. En cas de nouvel échec, de nouveaux antibiotiques (quinolones,
refabutine), sont en cours d’évaluation.
En cas d’échec d’éradication, un traitement d’entretien par IPP au long cours peut être
préconisé chez les patients traités au long cours par anticoagulants ou AINS, ou avec un
risque vital important en cas de complication (sujet âgé, insuffisance cardiaque ou
respiratoire) et en cas de survenue d’une complication inaugurale (hémorragie) non traitée
chirurgicalement.
6.2.3 Traitement de l’ulcère iatrogène
Le traitement repose sur l’arrêt des médicaments responsables (aspirine ou AINS) et la
prescription d’un IPP pendant quatre semaines. Si le maintien du traitement gastro-toxique est
nécessaire, un IPP sera associé pendant toute la durée du traitement. En cas d’infection
associée à l’Hp, son éradication est recommandée car l’infection potentialise l’action gastro-
toxique de l’aspirine et des AINS.
Une prévention de la gastro-toxicité des AINS par IPP est préconisé chez les sujets de plus de
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
47
60 ans, en cas d’antécédents d’ulcère gastro-duodénal et/ou d’hémorragie digestive, en cas de
pathologie cardiaque, respiratoire, rénale ou hépatique sévère ou de prise d’anticoagulants.
6.3 Traitement chirurgical
Le traitement chirurgical est maintenant quasi exclusivement réservé aux complications de la
maladie ulcéreuse duodénale.
Pour l’ulcère gastrique, la chirurgie est proposée pour les ulcères gastriques chroniques non
cicatrisés après au moins douze semaines de traitement médical ou en cas de dysplasie sévère
sur les berges de l’ulcère. Le traitement consiste en une gastrectomie partielle avec un
rétablissement de la continuité par une anastomose gastro-duodénale ou une anastomose
gastro-jéjunale.
Les indications du traitement chirurgical de l’ulcère duodénal à froid ont quasiment disparu.
Ce traitement visait à réduire la sécrétion gastrique en sectionnant le nerf vague, soit par une
vagotomie fundique, ou une vagotomie tronculaire associée à une antrectomie.
Les complications sont actuellement les motifs les plus fréquents d’indication chirurgicale de
la maladie ulcéreuse. En cas d’ulcère hémorragique et après échec d’un traitement médical et
endoscopique (voir chapitre « Hémorragies Digestives), un traitement chirurgical doit être
proposé. Il associe une vagotomie tronculaire associée à une pyloroplastie et à une suture
hémostatique de l’ulcère ou une vagotomie tronculaire avec antrectomie enlevant l’ulcère. La
perforation est une indication quasi formelle du traitement chirurgicale de la maladie
ulcéreuse. Le traitement consiste le plus souvent à une excision suture de la perforation. Dans
certains cas, lorsque le diagnostic est fait précocément chez un sujet jeune et en l’absence de
signe évident de péritonite, un traitement initial peut être proposé et consiste en une aspiration
gastrique, des anti-sécrétoires par voie intraveineuse et des antibiotiques. Les sténoses
ulcéreuses pyloriques ou bulbaires cicatricielles nécessitent le plus souvent un traitement
chirurgical avec dérivation gastro-jéjunale ou vagotomie et antrectomie. Celles-ci sont
habituellement proposées après échec d’une dilatation endoscopique.
7 GASTRITES AIGUES ET CHRONIQUE
7.1 GASTRITES AIGUES
Il s’agit d’une inflammation aiguë de la muqueuse gastrique définie par des lésions
endoscopiques et histologiques. Les gastrites aiguës peuvent être cliniquement latentes ou
bien se manifester par des douleurs épigastriques. L’endoscopie et les biopsies montrent des
lésions souvent diffuses, multiples et de degrés variables : œdème, lésions pétéchiales et
purpuriques, érosions superficielles, lésions ulcéro-nécrotiques … Ces lésions aiguës sont
susceptibles de cicatriser en quelques jours ou parfois d’entraîner des complications
hémorragiques ou perforatives.
Les causes les plus fréquentes sont l’alcool, les médicaments (aspirine et AINS), la primo-
infection à Hp, l’injection de caustique et les défaillances multi-viscérales (gastrite de stress).
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
48
7.2 Gastrite chronique
7.2.1 Définition, histologie
Une gastrite chronique signifie la présence à l’examen histologique de la muqueuse gastrique,
de lésions inflammatoires et atrophiques plus ou moins étendues (muqueuse antrale et
muqueuse fundique) et plus ou moins sévères.
La gastrite chronique est susceptible d’aboutir à la disparition des glandes gastriques (atrophie
gastrique). Schématiquement, on peut observer à l’examen histologique d’une gastrite
chronique :
- des signes d’activité comportant une infiltration du chorion et de l’épithélium par des
polynucléaires neutrophiles ; la gastrite peut être légère, modérée ou sévère ; elle est
généralement caractéristique de l’infection par Hp ;
- des signes d’inflammation comportant une infiltration du chorion par des lymphocytes ;
cette infiltration peut être légère, modérée ou sévère ;
- des signes d’atrophie caractérisés par une réduction des glandes gastriques ; elle peut être
légère, modérée ou sévère ;
- une métaplasie intestinale ainsi qu’une fibrose du chorion peuvent se développer et
s’associer à des signes histologiques de dysplasie qui peut être légère, modérée ou sévère.
la dysplasie sévère est synonyme de cancer débutant.
7.2.2 Causes des gastrites chroniques
Les causes des gastrites chroniques sont l’infection par Hp, le reflux biliaire, la prise
d’aspirine au long cours et des manifestations auto-immunes (maladie de Biermer ou gastrite
lymphocytaire ou varioliforme).
La gastrite secondaire à Hp a une localisation antrale préférentielle et comporte une
infiltration du chorion par des polynucléaires et des lymphoplasmocytes définissant l’activité
et l’inflammation qui sont caractéristiques de l’infection. Chez l’enfant et l’adulte jeune, la
présence d’une formation de nodules lymphoïdes dans le chorion n’est pas exceptionnelle.
7.2.3 La filiation gastrite chronique atrophique – dysplasie – cancer
La gastrite chronique atrophique peut s’accompagner d’une dysplasie épithéliale pouvant
aboutir au développement d’un adénocarcinome. Une surveillance endoscopique et
histologique des malades atteints de gastrite chronique atrophique avec dysplasie peut être
proposée. Il n’y a pas de consensus concernant l’indication d’éradication d’l’Helicobacter
Pylori à titre préventif du cancer. Cependant quand cette infection est mise en évidence, une
éradication peut légitimement être proposée.
7.3 Gastrites chroniques spécifiques
7.3.1 Maladie de Biermer
Elle se manifeste par une anémie, macrocytaire, non régénérative, parfois associée à des
signes neurologiques et à une glossite. Elle peut se révéler par une macrocytose isolée. La
maladie de Biermer est liée à une atrophie gastrique fundique. L’aspect endoscopique est
parfois évocateur avec un aspect en « fond d’œil » confirmé par les biopsies fundiques.
L’atrophie peut être confirmée par achlorydrie au tubage gastrique, associée à une
hypergastrinémie. L’atrophie des cellules pariétales fundiques empêche la sécrétion du facteur
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
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intrinsèque nécessaire à l’absorption de la vitamine B12 au niveau iléal. Cela peut être
confirmé par le test de Schilling que la prise orale de facteur intrinsèque normalise. La
maladie de Biermer résulte d’un mécanisme immunologique avec mise en évidence
d’anticorps sériques anti-cellules pariétales (non spécifiques) et anti-facteur intrinsèque. Le
traitement comporte une administration parentérale de vitamine B12 (1 mg tous les 6 mois).
Le principal risque évolutif est la survenue d’un cancer gastrique qui justifie une surveillance
endoscopique.
7.3.2 Maladie de Ménétrier
La maladie de Ménétrier ou gastropathie hypertrophique géante est une affection rare
caractérisée par un épaississement de la muqueuse (2 mm ou plus), dû à une hyperplasie de
l’épithélium muco-sécrétant. Elle peut se manifester par une exsudation protéique anormale
par l’estomac, induisant une hypoprotéinémie avec amaigrissement et œdème des membres
inférieurs. Elle peut se compliquer d’hémorragie ou de cancer. En cas d’infection associée à
HP, l’éradication doit être proposée.
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50
Vomissements
Christophe Cellier
Service d’hépato-gastroentérologie, Hôpital Européen Georges Pompidou
Objectifs (question N° 345 du programme officiel)
• Devant des vomissements de l'adulte, argumenter les principales hypothèses
diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.
• Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi de l'évolution.
LES POINTS IMPORTANTS
• Le diagnostic de vomissement est souvent facile il doit être distingué des
régurgitations ou d’un mérycisme.
• Les causes des vomissements sont multiples mais fréquemment bénignes en
rapport avec une gastro-enetérite infectieuse ou un excès alimentaire. Le contexte
clinique permet le souvent une orientation diagnostique.
• Les vomissements aigus sont fréquemment d’origine digestive. L’essentiel est de
ne pas méconnaître une urgence chirurgicale. Les causes neurologiques ou
iatrogènes doivent être évoquées en particulier chez le sujet âgé ou
polymédicamenté.
• Les vomissements chroniques correspondent le plus souvent à une obstruction
intestinale dont le siège sera précisé par les explorations morphologiques. Les
troubles moteurs gastriques ou intestinaux sont rares. Dans certains cas, les
vomissements chroniques sont secondaires à une maladie psychiatrique
1 DIAGNOSTIC
1.1 Diagnostic positif
Le diagnostic repose sur l’interrogatoire. Le vomissement est un rejet actif, avec une
contraction du diaphragme et des muscles de la paroi abdominale, de tout ou partie du
contenu gastrique par la bouche.
1.2 Diagnostic différentiel
Les vomissements doivent être distingués des régurgitations et du mérycisme.
- les régurgitations sont des remontées passives dans la bouche du contenu gastrique ou
œsophagien. Leur cause est le reflux gastro-œsophagien, plus rarement une achalasie, une
tumeur de l’œsophage ou un diverticule de Zenker.
- Le mérycisme est une remontée volontaire des aliments dans la bouche où ils sont à
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
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nouveau mastiqués (rumination). Les régurgitations et le mérycisme ne sont pas précédés
des nausées.
2 COMPLICATIONS
2.1 Troubles hydroélectrolytiques
Ils surviennent si les vomissements sont abondants et répétés. Cliniquement, il existe une
déshydratation extracellulaire. Biologiquement, on note une hémoconcentration, une
insuffisance rénale fonctionnelle et une alcalose métabolique avec hypokaliémie et
hypochlorémie.
2.2 Complications respiratoires
Les vomissements peuvent être associés à des troubles de la déglutation ou de la vigilance
(anesthésie, ivresse aiguë) et induire une pneumopathie d’inhalation siégeant habituellement à
droite.
2.3 Complications mécaniques
- Le syndrome de Mallory Weiss est une déchirure longitudinale de la muqueuse située au
niveau du cardia. Il complique les vomissements habituellement violents et répétés
(grossesse, intoxication éthylique aiguë). Classiquement, ces vomissements sont d’abord
alimentaires puis suivis d’une hématémèse d’abondance variable. Le diagnostic est
confirmé par la fibroscopie œsogastrique qui met en évidence l’ulcération longitudinale du
cardia, parfois recouverte d’un caillot.
- Rupture spontanée de l’œsophage (syndrome de Boerhaave) est une complication
exceptionnelle de vomissement. Le diagnostic repose sur l’apparition brutale au cours
d’effort de vomissement d’une douleur thoracique aiguë irradiant dans le dos et le cou,
associée à une odynophagie ou une dysphagie, une dyspnée, une chute tensionnelle et un
emphysème sous-cutané. La radiographie de thorax peut mettre en évidence l’emphysème
sous-cutané, le pneumodiastin ou un épanchement pleural. Le diagnostic est confirmé par
la tomodensitométrie thoracique.
3 CAUSES
On distingue les vomissements aigus des vomissements chroniques.
3.1 Causes de vomissements aigus
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52
Tableau 1. Causes de vomissements aigus
Causes digestives Gastro-entérite aiguë et toxi-infection alimentaire
Occlusion complète ou partielle
Lithiase biliaire (colique hépatique, cholécystite aiguë)
Ulcère gastroduodénal
Appendicite aiguë
Hépatite aiguë
Pancréatite aiguë ou chronique
Péritonite
Infarctus mésentérique
Iléus postopératoire
Causes médicamenteuses et
toxiques
Antimitotiques
Digitaliques, Opiacés, Théophylline
Inhalation de toxiques industriels ou d’oxyde de carbone
Intoxication alcoolique aiguë
Causes neurologiques Méningite
Hémorragie méningée ou cérébro-méningée
Hypertension intracrânienne
Syndrome labyrinthique
Migraine
Causes métaboliques et
endocriniennes
Acidocétose diabétique
Insuffisance rénale aiguë
Hypercalcémie
Insuffisance surrénale aiguë
Causes diverses Infarctus du myocarde
Colique néphrétique
Torsion de kyste ovarien
Glaucome aigu
Mal des transports
3.1.1 Vomissements aigus bénins
Ce sont les plus fréquents. Ils peuvent être liés à une gastro-entérite infectieuse et être
associée à une fièvre et/ou une diarrhée. L’examen clinique est normal et les vomissements
cèdent en quelques heures à quelques jours.
3.1.2 Vomissements aigus évoluant dans un contexte d’urgence avec une cause digestive.
Le diagnostic est orienté par la présence d’autres signes digestifs (douleurs abdominales,
diarrhée, ou arrêt du transit) et l’examen abdominal (douleurs provoquées, défense,
contracture, météorisme, diminution des bruits hydroaériques, anomalies au toucher pelvien).
Une radiographie d’abdomen sans préparation est indiquée pour rechercher un pneumo-
péritoine ou des niveaux hydro-aériques. Un bilan biologique (numération formule sanguine,
lipasémie), et éventuellement échographie abdomino-pelvienne (ou scanner) permettent de
préciser le diagnostic.
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53
3.1.3 Causes neurologiques
Les vomissements d’origine neurologique surviennent en jets sans nausée préalable. Le
diagnostic repose sur la présence de céphalées, d’un syndrome méningé, de signe
neurologique de localisation ou de syndrome vestibulaire associé. Des examens (ponction
lombaire, tomodensitométrie cérébrale, IRM) préciseront le diagnostic.
3.1.4 Causes médicamenteuses et toxiques
Une recherche auprès du patient ou de son entourage recherchera des prises médicamenteuses
ou toxiques susceptibles d’induire des vomissements (surdosage en digitaliques,
chimiothérapie en cours par exemple).
3.1.5 Autres causes
Les urgences gynécologiques (torsion du kyste ovarien), néphrologiques (colique
néphrétique) ou cardiaque (infarctus du myocarde, ou embolie pulmonaire) doivent être
également évoquées en fonction du contexte clinique. Une migraine accompagnée (céphalées
intenses) à topographie hémi-crânienne avec photophobie précédant les vomissements, un
glaucome aigu, un mal transport peuvent s’accompagner de vomissements, mais
l’interrogatoire permet d’évoquer le diagnostic.
3.2 Causes de vomissements chroniques
Tableau 2. Causes de vomissements chroniques
Obstruction du tractus digestif
Sténose antro-pyloro-bulbaire
Ulcère antro-pylorique ou duodénal
Tumeur gastrique (carcinome, lymphome, tumeur bénigne)
Sténose inflammatoire (maladie de Crohn, tuberculose)
Sténose duodénale
Tumeur duodénale
Compression extrinsèque (pancréas)
Sténose de l’intestin grêle
Tumorale (lymphome, adénocarcinome)
Inflammatoire (Crohn, entérite radique, prise d’AINS)
Ischémique
Compression extrinsèque (tumeur abdominale, carcinose péritonéale)
Causes digestives non obstructives
Ulcère gastroduodénal, cancer gastrique, fistule gastrocolique
Pancréatite chronique
Trouble de la motricité gastro-intestinale
Gastroparésie idiopathique ou secondaire
Pseudo-obstruction intestinale chronique idiopathique ou secondaire
Causes extradigestives
Grossesse (1er trimestre) et complications de la grossesse
Causes neurologiques, médicamenteuses, métaboliques ou toxiques
Vomissements psychogènes
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
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Tableau 3. Démarche diagnostique devant des vomissements chroniques
Grossesse, migraine
Médicaments, toxiques
Gastro-entérite aiguë
Orientation vers une
cause précise
Lésions digestives
Affections pancréatiques
et péritonéales
Affections neurologiques
Troubles moteurs digestifs
Vomissements psychogènes
Interro
g
atoire, examen
p
h
y
si
q
ue et bilan
b
iolo
g
i
q
ue*
ASP
Endoscopie digestive haute
Transit du
g
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Echographie et/ou
bd i l
TDM ou IRM
bl
Explorations motrices
Evaluation
p
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q
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3.2.1 Obstruction du tractus digestif
Les vomissements sont post-prandiaux, plus ou moins tardifs selon le siège de l’obstacle,
associés à une sensation de réplétion gastrique, de douleurs abdominales soulagées par les
vomissements. L’examen clinique met en évidence un météorisme, une masse abdominale,
des ondulations péri-statiques, une voussure épigastrique avec un clapotage gastrique à jeun.
Un cliché d’abdomen sans préparation met en évidence une stase gastrique ou des niveaux
hydro-aériques intestinaux. Une endoscopie digestive haute après aspiration gastrique ou un
transit œsogastro-duodénal permettent habituellement de préciser la nature de l’obstacle
antro-pyloro-bulbaire ou duodénal. En cas d’obstacle sur l’intestin grêle, ou au niveau du
côlon, une échographie ou une tomodensitométrie abdominale, un transit du grêle et une
coloscopie devront être discutés.
3.2.2 Causes digestives non obstructives
Un trouble moteur digestif tel qu’une gastroparésie peut être évoqué si les explorations
digestives sont négatives et en fonction du contexte (diabète insulino-dépendant par exemple).
La gastro-parésie peut être quantifiée par une scintigraphie (de l’évacuation d’un repas
marqué). La pseudo-obstruction intestinale chronique est exceptionnelle et est due à des
anomalies de l’innervation ou de la musculature intestinale. Elle se manifeste par des épisodes
répétés d’occlusion complète ou partielle. La manométrie de l’intestin grêle peut permettre le
diagnostic, mais est rarement réalisée en pratique. Dans ce contexte, il est souvent difficile,
chez les patients avec des antécédents de chirurgie abdominale d’éliminer des épisodes
d’occlusion sur bride. La plupart de ces troubles moteurs peuvent idiopathiques ou
secondaires à une affection systémique (diabète, neuropathie végétative ou vagotomie).
3.2.3 Causes extra-digestives
Chez une femme en âge de procréer, une grosse doit toujours être évoquée ou confirmée par
le dosage des béta-HCG. Les vomissements sont souvent modérés, matinaux et en début de
grossesse et s’atténuent au cours du deuxième trimestre. Des vomissements survenant plus
tardivement au cours de la grossesse doivent faire évoquer d’autres causes en particulier la
toxémie gravidique, ou la stéatose hépatique aiguë.
3.2.4 Vomissements psychogènes
Ils représentent une cause fréquente de vomissements chroniques. Ils doivent être évoqués
devant des vomissements chroniques intermittents, déclenchés par des périodes de stress. Ils
surviennent en cours ou à la fin du repas et ne sont pas associés à une altération de l’état
général. Les vomissements provoqués s’observent également chez des patients atteints de
troubles du comportement alimentaire tels la boulimie ou l’anorexie mentale. Une évaluation
psychiatrique est nécessaire dans ce cas.