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modérément perturbés dans les formes
communes ; dans les formes avec insuffisance hépatocellulaire grave, des taux inférieurs à 10
pour cent sont habituels. L'albumine est normale ou légèrement abaissée. Les
gammaglobulines ou les immunoglobulines IgG et IgM sont normales ou modérément
augmentées.
5.2 EXAMENS HEMATOLOGIQUES
Une leucopénie avec neutropénie est parfois observée. Assez fréquemment le fer sérique est
élevé ; cette hypersidérémie est attribuée à la nécrose des hépatocytes qui libèrent dans le
plasma le fer qu'ils contiennent.
On voit en tout cas que l'hépatite virale aiguë habituelle n'est jamais une indication à biopsie
hépatique.
6 TRAITEMENT ET PROPHYLAXIE
6.1 TRAITEMENT
6.1.1 Généralités
— Il n'y a pas de traitement des hépatites virales aiguës.
— Le repos strict et un régime alimentaire particulier ne sont pas nécessaires.
— A éviter :
- Traitement par corticoïdes : il est formellement contre-indiqué car il risque de
favoriser le passage à la chronicité d'une infection virale B.
- Alcool : arrêt pendant environ 3 à 6 mois.
- Oestroprogestatifs : arrêt généralement conseillé pendant 3 à 6 mois.
6.1.2
Il est actuellement bien montré pour les hépatites B et C que lorsque
l'hypertransaminasémie ou les marqueurs de multiplication virale persistent 3 mois après le
contage, le pourcentage de passage à la chronicité de l'infection est de l'ordre de 100 %. Ceci
justifie, au moins pour le virus de l'hépatite C dont le risque d'évolution vers la chronicité est
de l'ordre de 50 à 80 %, des essais de traitement dès la phase aiguë par Interféron-α afin
d'éviter l'évolution vers la chronicité. Il est aujourd'hui établi que ce risque diminue à 30 % en
cas de traitement précoce.
6.2 PROPHYLAXIE
6.2.1 Hépatite A
Du fait de la contamination entérale des mesures d'hygiène sont nécessaires. L'injection
d'immunoglobulines (gammaglobulines standards ou enrichies en anti-VHA) ne se discute
que rarement et bien sûr chez des sujets séro-négatifs.
Un vaccin efficace et bien toléré contre l'hépatite A a été mis sur le marché en 1992-93. En
France il est aujourd'hui à réserver presque exclusivement aux sujets séro-négatifs faisant de
fréquent séjours en régions endémiques. La vaccination complète (2 injections à un mois
d'intervalle + un rappel à un an) revient à quelques 500-600 F non remboursables par la
Sécurité Sociale.
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6.2.2
Hépatite B
Au stade d'hépatite aiguë la nécessité de la protection de l'entourage est discutée (faible
infectiosité du sérum au moment où les symptômes apparaissent, la période de contagiosité
étant déjà passée à ce stade). Cependant il parait raisonnable de demander chez le partenaire
une recherche d'anti-HBs et anti-HBc. En cas de résultat négatif la prévention est assurée par
une injection d'immunoglobulines spécifiques anti HBs associée à une première dose de
vaccin contre l'hépatite B (3 injections à 1 mois d'intervalle avec une dose de rappel 1 an
après).
Au stade de portage chronique du virus B cette prévention doit être systématique et concerne
également les enfants.
En cas de piqûre accidentelle avec une aiguille souillée la dose d'immunoglobulines
spécifiques doit être injectée dans les 48 heures (1 ampoule de 5 ml pour un adulte).
Par ailleurs, la vaccination contre le virus de l'hépatite B doit être systématiquement
recommandée dans les cas suivants :
— Personnel de santé.
— Entourage du porteur chronique du virus.
— Sujets polytransfusés.
— Enfants nés de mère infectée.
La vaccination n'est pas contre-indiquée chez le nouveau-né et la femme enceinte. Le prix de
chaque injection est d'environ 160 F, remboursés à 70 % par la Sécurité Sociale.
6.2.3
Hépatite C
La majorité des hépatites C observées en France était post-transfusionnelles. La détection
systématique et légale maintenant du VHC chez tout donneur de sang et à chaque don semble
d'ores et déjà porter ses fruits. En effet, le risque d'hépatite post-transfusionnelle liée au virus
de l'hépatite C est actuellement proche de zéro (1 p 700 000 culots globulaires transfusés). Au
contraire, persiste une transmission liée à l'usage de drogues. L'identification d'une hépatite
aiguë C justifie l'administration d'un traitement antiviral précoce qui permet une fréquence
élevée de guérison et évite le risque d'infection chronique chez 70 % des sujets infectés.
7 HEPATITES DUES AUX VIRUS DU GROUPE HERPES
Les infections dues à certains virus du groupe herpès, en particulier le virus EB
(mononucléose infectieuse), le cytomégalovirus et le virus de l'herpès, s'accompagnent avec
une fréquence variable d'atteinte hépatique.
7.1 MONONUCLEOSE INFECTIEUSE
Au cours de la mononucléose infectieuse, l'atteinte hépatique est constante, mais
généralement latente cliniquement. Histologiquement il s'agit d'une infiltration du foie,
principalement des espaces portes, par des cellules mononucléées ; l'atteinte des hépatocytes
est absente ou discrète. Les phosphatases alcalines sont souvent modérément augmentées ;
mais parfois elles sont très élevées, même en l'absence d'ictère. Les transaminases sont
normales ou modérément augmentées.
Dans quelques rares cas, il peut se développer un ictère. Dans quelques cas exceptionnels,
concernant en général des malades atteints d'un déficit immunitaire, la mononucléose
infectieuse peut entraîner une nécrose hépatique étendue.
Le diagnostic repose sur le contexte clinique, les anomalies hématologiques et la positivité
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des tests de la mononucléose infectieuse.
7.2 INFECTION A CYTOMEGALOVIRUS
Au cours des infections à cytomégalovirus du nouveau-né, l'hépatomégalie et l'ictère sont
habituels. Dans l'enfance, l'infection entraîne souvent une hépatomégalie, une perturbation des
tests hépatiques, mais assez rarement un ictère franc. Chez l'adulte, l'infection à
cytomégalovirus peut s'observer après transfusion sanguine (la contamination est dûe au virus
contenu dans le sang) et chez les malades ayant un déficit immunitaire (il semble s'agir alors
d'une réactivation d'un virus latent) ; la maladie se traduit par une hépatomégalie et un ictère ;
histologiquement, il existe des foyers de nécrose ; parfois des cellules contenant des
inclusions virales sont observées dans le foie. Le diagnostic repose sur la mise en évidence du
virus dans le sang et sur l'augmentation des anticorps à deux prélèvements successifs.
7.3 HERPES
Au cours des infections herpétiques disséminées, l'atteinte hépatique est fréquente, sinon
constante. Histologiquement, elle se traduit par des foyers de nécrose. Cliniquement, le foie
est augmenté de volume ; un ictère peut apparaître. Ces formes disséminées surviennent
principalement chez le nouveau-né ; plus rarement chez l'adulte, surtout lorsqu'il existe un
déficit immunitaire. Le diagnostic repose sur les autres signes cliniques, en particulier
l'existence d'une éruption vésiculeuse, sur la présence d'inclusions nucléaires dans les
hépatocytes, sur la mise en évidence du virus dans le sang et enfin sur l'augmentation des
anticorps à deux prélèvements successifs.
7.4 VARICELLE
Une atteinte hépatique, comportant une nécrose hépatocytaire et une réaction granulomateuse,
est exceptionnelle au cours de la varicelle.
8 VIH
Une élévation du taux sérique des transaminases est assez fréquemment observée au cours des
infections par le VIH. La cause de ces élévations de transaminases est souvent difficile à bien
cerner : il peut s'agir d'infections associées (virus de l'hépatite B, virus NonA-NonB) ; on a
également évoqué la possibilité d'une toxicité hépatique directe du VIH qui pourrait rendre
compte de certaines élévations de transaminases au cours de la primo-infection par ce virus.
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HÉPATITES CHRONIQUES
Stanislas Pol, Hélène Fontaine, Anaïs Vallet-Pichard
Unité d'Hépatologie, Hôpital Necker, Paris.
Objectifs (question 83 du programme officiel)
• Diagnostiquer une hépatite virale.
• Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
Points importants
• Le terme " Hépatite Chronique " désigne un groupe de maladies, d'évolution
chronique, associant une nécrose des hépatocytes et un infiltrat inflammatoire. Les
hépatites chroniques ont différentes étiologies et leur présentation clinique et biologique
ainsi que leur réponse au traitement diffèrent considérablement.
• Le diagnostic d'hépatite chronique peut être porté, d'une manière générale, devant
des lésions hépatiques parenchymateuses associant nécrose, inflammation et fibrose
présentes depuis un délai théorique (et discutable !) d'au moins 6 mois.
• Deux grandes formes d'hépatite chronique peuvent être distinguées :
1. Hépatite chronique dite persistante : elle est le plus souvent d'évolution bénigne, ne
nécessitant pas toujours de traitement ; sa surveillance est indispensable car on ne
peut jamais exclure complètement le passage ultérieur à une forme active.
2. Hépatite chronique active : le risque d'évolution vers des lésions de cirrhose est élevé
et doit faire discuter un traitement qui varie selon l'étiologie.
•
Le diagnostic d'hépatite chronique comprend donc plusieurs temps :
1. Estimation de la sévérité des lésions : elle ne pourra être affirmée que par l'examen
histologique du foie qui est nécessaire au diagnostic.
2. Enquête étiologique afin de rechercher les 3 grandes causes des hépatites : virales :
virus de l'hépatite B, D (ou delta) et C, médicamenteuses et autoimmunes"
3. Discussion d'un éventuel traitement : traitements anti-viraux en cas d'hépatite
chronique active liée à un des virus de l'hépatite, B, D ou C, avec multiplication
virale persistante ; traitement immuno-suppresseur (associant corticoïdes et
azathioprine) en cas d'hépatite chronique active autoimmune.
4. Prévention de la dissémination, au conjoint et à l'entourage, quand il s'agit d'une
infection chronique virale.
5. Dépistage systématique, là encore lorsqu'il s'agit d'un virus hépatitique, d'une
infection VIH associée. Cette recherche sera répétée environ tous les six mois chez les
sujets qui demeureraient à risque.
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1 ÉPIDÉMIOLOGIE ET CLINIQUE
1.1 INFECTIONS VIRALES B, D et C
1.1.1 Histoire naturelle de l'infection virale B
Le risque principal de l'infection virale B, en dehors des hépatites fulminantes (qui
représentent moins de 1% des cas) est celui du portage chronique de l'antigène HBs. Il
survient chez 5 à 10 % des adultes immunocompétents, jusqu'à 80 % des enfants infectés tôt
dans la vie, 40 à 60 % des hémodialysés, 100 % des transplantés et 20 à 40 % des sujets
infectés par le VIH. Le portage chronique est dans 1/3 des cas un portage dit sain caractérisé
par l'absence d'hépatopathie et de multiplication virale ; dans 2/3 des cas une hépatite
chronique est observée, associée à une multiplication virale persistante . Le risque en est
l'évolution vers la cirrhose dans 20 à 30 % des cas, exposant elle-même à un risque de
développement de carcinome hépatocellulaire, avec une incidence annuelle de 3 %. Ce risque
est lié non seulement à la cirrhose elle-même mais aussi à des effets directs du VHB
(intégration à l'origine de mécanismes de mutagénèse insertionnelle, transactivation de gènes
cellulaires par les protéines virales X et préS2 S).
L'évolution naturelle de l'infection chronique par le VHB peut être schématiquement
représentée en 3 phases. La première phase, de durée variable (quelques mois à plusieurs
années), est marquée par une multiplication active du virus dont les marqueurs sont l'ADN du
VHB et l'antigène HBe dans le sérum et la présence de l'antigène HBc dans le noyau des
hépatocytes. La deuxième phase est marquée par l'arrêt progressif et spontané de la
multiplication virale qui est parfois associé à une accentuation de la nécrose hépatocytaire
avec élévation transitoire des transaminases, vraisemblablement due à la réponse immunitaire
cytotoxique. L'arrêt spontané de la multiplication virale coïncide souvent dans le temps avec
l'apparition de la cirrhose. Les chances d'arrêt spontané de la multiplication virale au cours de
l'infection chronique par le virus de l'hépatite B sont de l'ordre de 5 à 10 % par an. Au cours
d'une troisième phase, le sujet est toujours porteur chronique du virus (antigène HBs positif)
mais les signes de multiplication virale ont disparu et les anticorps anti-HBe sont présents.
Les risques sont alors l'aggravation possible de la cirrhose et l'apparition d'un carcinome
hépatocellulaire.
1.1.2
Histoire naturelle de l'infection D ou delta
Le virus de l'hépatite delta est un virus défectif dépendant pour son organisation et sa
multiplication de la présence du virus de l'hépatite B. On ne le cherchera donc que chez des
patients AgHBs positif. Il est à l'origine de deux types d'hépatite épidémiologiquement et
évolutivement différentes :
1)
en cas de coinfection (rencontre simultanée entre le VHB et le VHD), l'évolution se fait le
plus souvent vers une hépatite aiguë, résolutive) s'il ne provoque une hépatite fulminante
(5 % des cas)
2)
en cas de surinfection (rencontre avec le VHD chez un porteur chronique du VHB)
l'évolution se fait dans plus de 90 % des cas vers une hépatite chronique considérée
comme plus sévère que l'hépatite chronique B seule, avec des risques identiques de
cirrhose et de carcinome hépatocellulaire.
1.1.3
Histoire naturelle de l'infection virale C
L'histoire naturelle de l'infection virale C est superposable à celle de l'infection virale B.
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Cependant 4 différences seront soulignées :
1)
le risque d'hépatite fulminante est presque nul ;
2)
la réalité du portage sain est discutée, mais environ 10 % des patients ayant une
multiplication virale détectable ont un foie histologiquement normal ou des lésions
minimes ;
3)
le risque de passage à la chronicité est de l'ordre de 50 à 80 % (et sans doute plus élevé
dans les populations immunodéprimées) ;
4)
l'apparition d'une cirrhose survient dans environ 20 % des cas avec son propre risque de
carcinome hépatocellulaire ;
5)
il n'y a pas d'extinction spontanée de la multiplication du VHC dans le temps.
1.2 HÉPATITES CHRONIQUES MEDICAMENTEUSES
Une liste indicative des médicaments susceptibles d'induire l'apparition d'hépatite chronique
est donnée sur le tableau 1.
1.3 HÉPATITES AUTOIMMUNES
Il s'agit d'hépatite chronique active survenant surtout chez des femmes et associée à des
"marqueurs" d'autoimmunité : incidence élevée d'autoanticorps, association à des maladies
autoimmunes, fréquence élevée des antigènes d'histo-compatibilité HLA B8 et DR qui sont
des marqueurs génétiques fréquemment associés à une maladie autoimmune.
Plusieurs autoanticorps ont été identifiés :
1)
anticorps anti muscle lisse (qui sont les plus couramment utilisés pour le diagnostic),
définissant les hépatites auto-immunes de type I.
2)
anticorps anti "L.K.M." dirigés contre les microsomes d'hépatocytes et de rein (LKM :
Liver Kidney Microsomes).
Ces anti LKM peuvent être divisés en 3 classes (anti LKM, 1, 2 et 3).
Les anti LKM1 sont associés à une forme particulière d'hépatite autoimmune de l'enfant et
définissent les hépatites autoimmunes de type II. Elles sont très corticosensibles.
Chez l'adulte, près de 85 % de ces hépatites autoimmunes de type II sont associées à une
infection par le virus de l'hépatite C avec anticorps antiVHC et multiplication virale C. Dans
ce cas, il est possible que l'infection virale ait déclenché une réaction autoimmune manifestée
par la présence des anticorps anti-LKM1. Ce type d'hépatites autoimmunes pose de façon
délicate le problème du traitement : Interféron ? ou corticoïdes ?
Les anti LKM1doivent être distingués des anti LKM2 (associés à une hépatite
médicamenteuse déclenchée par l'acide tiénilique) et des anti LKM3 associés à une hépatite
delta.
2 CLASSIFICATION HISTOLOGIQUE
Elle est possible si la biopsie hépatique n'est pas contre-indiquée et ramène un échantillon
suffisamment grand. Les éléments histologiques suivants sont recherchés : a) nécrose des
hépatocytes ; b) infiltrat inflammatoire dans les espaces portes et/ou dans les lobules
hépatocytaires ; c) importance de la fibrose et sa topographie (limitée aux espaces portes ou
extensive dans les lobules hépatiques modifiant alors l'architecture du foie).
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
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Tableau 1. MÉDICAMENTS AYANT ÉTÉ ACCUSÉS DE POUVOIR CRÉER DES
HÉPATITES CHRONIQUES ACTIVES
(Le point d'interrogation entre parenthèses signifie que la certitude de leur responsabilité n'est
pas établie)
DÉNOMINATIONS COMMUNES PRINCIPAUX NOMS DES SPÉCIALITÉS FRANCAISES
Acide acétylsalicylique* Aspirine
Acide tiénilique Diflurex
Alpha-méthyl dopa Aldomet
Amiodarone** Cordarone
Chlorpromazine Largactil (?)
Clométacine Dupéran
Isoniazide* Rimifon
Nitrofurantoïne Furadoïne
Papavérine
Paracétamol* Doliprane
Perhexiline*** Pexid
* Cas semblant bien documentés mais extrêmement rares et seulement après doses très fortes
et prolongées.
** Histologie particulière avec inclusions cytoplasmiques type phospholipidose et corps de
Mallory possibles.
*** L'histologie peut être strictement celle d'une hépatite alcoolique.
2.1 HÉPATITE CHRONIQUE DITE ENCORE SOUVENT PERSISTANTE :
L'architecture lobulaire est conservée, on trouve un infiltrat inflammatoire fait de cellules
mononucléées dans les espaces portes qui n'envahit pas le lobule hépatique. Les signes de
nécrose hépatocytaires sont rares. La fibrose est limitée aux espaces portes. On préfère
actuellement parler d'hépatites chroniques d'activité minime ou modérée plutôt que d'hépatites
chroniques persistantes.
2.2 HEPATITE CHRONIQUE ACTIVE :
L'infiltrat inflammatoire est plus important et surtout s'étend dans le lobule hépatique,
rongeant ainsi la lame bordante ; cet infiltrat s'associe à des lésions de nécrose hépatocytaire.
Le terme de "piece-meal necrosis" désigne la nécrose d'hépatocytes situés à proximité de
zones de fibrose (soit dans les espaces portes, soit dans les lobules) et entourés de cellules
mononucléées. Cette lésion pourrait refléter la lyse des cellules secondaires à des mécanismes
immunologiques.
Il est important d'analyser en particulier la lame bordante hépatocytaire qui est constituée par
la rangée d'hépatocytes situés à la jonction entre le lobule hépatique et l'espace porte : la
disparition de cette lame bordante reflète le caractère extensif de l'infiltrat inflammatoire et de
la fibrose. L'infiltrat inflammatoire et la nécrose sont associés à une fibrose qui a débordé les
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
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espaces portes et s'étend elle aussi dans les lobules.
Dans les formes sévères d'hépatites chroniques actives la nécrose et la fibrose forment un
"pont" entre différents espaces portes et/ou entre des espaces portes et les veines
centrolobulaires.
Le risque évolutif des hépatites chroniques actives est la constitution d'une cirrhose du
foie qui peut être d'emblée mise en évidence lors du premier bilan d'une hépatite
chronique active.
En fait, la distinction hépatite chronique persistante et hépatite chronique active est artificielle
car il existe des formes de passge de l’une à l’autre selon l’activité de l’hépatopathie, sa
persistance et l’efficacité des mécanismes de fibrolyse contre-balançant les mécanismes de
fibrogénèse. A cette classique distinction, on préfère aujourd’hui les scores histologiques
semi-quantitatifs. Ces scores (score de Knodell ou score Métavir) permettent l'évaluation de la
sévérité de l'hépatopathie (activité nécrotico-inflammatoire et extension de la fibrose). Ils ont
un intérêt indiscutable pour l’ information et le suivi des patients. A côté de ces scores
histologiques, des tests non invasif de fibrose sont développés permettant chez environ deux
tiers des patients dans le cadre des hépatites virales d’éviter la biopsie hépatique.
3 ÉVOLUTION ET NOTION D' "ACTIVITÉ" DE LA MALADIE
Quelle que soit l'étiologie il est important de comprendre que le pronostic final de la maladie
est lié plus à la persistance ou à l'arrêt de l'activité de l'hépatite qu'à l'importance de la seule
fibrose hépatique : des lésions de cirrhose peuvent être mises en évidence par exemple dans le
foie d'un malade en rémission clinique et biologique ; inversement la persistance d'une
nécrose hépatocytaire associée à un infiltrat inflammatoire est un signe de pronostic
défavorable. L'activité sera appréciée sur l'intensité des signes cliniques et biologiques sur
l'examen histologique du foie.
On voit donc la place essentielle qui revient, en cas d'hépatite chronique (et à la différence des
hépatites aiguës virales banales) à la biopsie hépatique. Les principales contre-indications de
celle-ci sont rappelées dans le tableau 2.
Dans le cas d'une infection par le virus de l'hépatite B l'évaluation de l'importance et de
l'éventuelle persistance de la multiplication du virus est devenue essentielle pour décider des
indications thérapeutiques et estimer le pronostic chez les porteurs chroniques du virus de
l'hépatite B, c'est à dire chez les sujets HBsAg positifs. On dispose en effet de marqueurs de
multiplication du virus et donc d'infectiosité du sérum. L'antigène HBe a été pendant
longtemps le seul de ces marqueurs de multiplication virale ; actuellement la recherche de
l'ADN du virus de l'hépatite B dans le sérum (contenu dans des particules virales infectieuses
de Dane) par les techniques d'hybridation puis d’amplification génomique (PCR) est le
meilleur test de multiplication virale. On considère que pour des titres d’ADN viral B
>100.000 copies/ml, il existe un risque d’activité histologique et donc une indication à un
traitement antiviral.
En résumé : la mise en évidence chez un sujet infecté par le virus de l'hépatite B de l'antigène
HBe et surtout d’un titre d'ADN du virus de l'hépatite B dans le sérum >100.000 copies/ml
témoigne de la multiplication virale ; au contraire la mise en évidence de l'anticorps anti-HBe
et et surtout d’un titre d'ADN du virus de l'hépatite B dans le sérum <100.000 copies/ml
reflète un « portage inactif » du VHB. De nombreuses études ont montré que le risque de
développer une hépatite chronique active et une cirrhose est lié à la persistance de la
multiplication virale.
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Pour le VHD, les marqueurs de la multiplication virale sont la détection de l'ARN du VHD et
de l'IgM antiD dans le sérum et de l'AgD dans le foie. Pour le VHC, la multiplication virale
est attestée par la présence de l'ARN du VHC dans le sérum, le foie ou les cellules
mononucléées du sang périphérique.
PRINCIPALES CONTRE-INDICATIONS DE LA PONCTION-BIOPSIE
HÉPATIQUE TRANSCUTANÉE
(Noter que certaines de ces contre-indications disparaissent en cas de biopsie dirigée sous
échographie)
ABSOLUES RELATIVES
Absence de matité hépatique
TROUBLES DE L'HÉMOSTASE * (Quick < 50 % et/ou temps
d'Ivy > 10 min ; plaquettes < 100 000/mm3 ; temps de lyse
des euglobulines < 90 min)
ASCITE
A
MYLOSE
FOIE CARDIAQUE
CHOLESTASE EXTRA HÉPATIQUE avec dilatation des
voies biliaires intra-hépatiques
Emphysème
Tumeur hypervascularisée
* L'existence de troubles de l'hémostase, si la ponction biopsie hépatique est indispensable,
pourra justifier le recours à une biopsie par voie trans-veineuse.
4 SYMPTOMATOLOGIE
4.1 FORME DITE "PERSISTANTE"
La maladie est habituellement tout à fait latente et n'est découverte qu'à l'occasion de la
constatation d'une discrète augmentation des transaminases ou de la découverte de l'antigène
HBs ou des anticorps anti VHC lors d'un don du sang ou d'un examen systématique.
L'examen clinique ne révèle généralement aucune anomalie.
Les tests d'exploration fonctionnelle hépatique sont généralement normaux sauf l'élévation
des transaminases, le plus souvent inférieure à 50 ou 100 UI, et parfois une augmentation
discrète des immunoglobulines (surtout IgG).
Le diagnostic de certitude repose sur la ponction biopsie hépatique.
L'évolution spontanée de la maladie est favorable car généralement, les lésions histologiques
persistent indéfiniment, sans s'aggraver. Toutefois, dans certains cas, un passage vers une
hépatite chronique active et le développement d'une cirrhose ont été observés et c'est pour cela
que le terme de "persistante" tend à être abandonné.
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4.2 FORME "ACTIVE"
Les premières manifestations de l'hépatite chronique active peuvent être l'asthénie, des
douleurs de l'hypochondre droit, une poussée ictérique ou des manifestations systémiques qui
seront décrites plus loin.
A l'examen, le foie peut être augmenté de volume et de consistance ferme ; il est parfois
sensible à la palpation.
La bilirubine est plus ou moins élevée. Les phosphatases sont normales ou modérément
élevées. Les transaminases sont en général modérément élevées entre 100 et 300 UI ; dans
quelques cas elles peuvent atteindre des taux élevés, supérieurs à 500 unités. Les
gammaglobulines sont élevées ; il existe une augmentation polyclonale des trois principales
classes d'immunoglobulines, mais en général, l'augmentation des IgG est relativement plus
importante que celle des IgA et des IgM ; chez certains malades, à l'augmentation
polyclonale, s'ajoute l'augmentation monoclonale d'une immunoglobuline, généralement une
IgG. En cas d'hépatite chronique active virale, l'antigène HBs, l'ADN du VHB, l'ARN du
VHD ou du VHC sont généralement retrouvés dans le sérum ; en cas d'hépatite chronique
autoimmune, les auto-anticorps sont mis en évidence : des anticorps anti-nucléaires dans
environ 40 % des cas, des anticorps anti-muscles lisses dans 60 % des cas. Le diagnostic de
certitude repose sur la ponction-biopsie ; si le fragment est trop exigu pour permettre un
diagnostic histologique, il peut être nécessaire de faire une deuxième ponction-biopsie
hépatique.
Ces manifestations purement hépatiques de l'hépatite chronique active sont souvent précédées
ou accompagnées de manifestations systémiques. Les plus fréquentes sont des éruptions
cutanées de morphologie variée, des poussées thermiques, des arthralgies et le syndrome de
Sjögren. On peut également rencontrer des pleurésies, des infiltrats pulmonaires, une fibrose
pulmonaire, diverses atteintes rénales (en particulier, glomérulopathie et acidose tubulaire
rénale), des anémies hémolytiques par auto-anticorps, une thyroïdite, une colite ulcéreuse, et
des polynévrites. Ces manifestations systémiques sont relativement fréquentes en cas
d'hépatite chronique autoimmune. Elles sont relativement rares en cas d'hépatite chronique
active due au virus B, au cours de laquelle on n'observe guère que des arthralgies et des
glomérulopathies. Une cryoglobulinémie mixte essentielle (rarement symptomatique) peut
être observée dans environ 15 % des cas d'hépatite chronique C et une dysthyroïdie dans
environ 5 % des cas.
L'évolution de l'hépatite chronique active varie considérablement d'un malade à l'autre ; dans
l'ensemble, l'hépatite chronique autoimmune est plus sévère que l'hépatite chronique due au
virus B. L'aggravation se fait soit progressivement, soit par poussées. L'aggravation de
l'insuffisance hépatocellulaire peut entraîner une encéphalopathie et finalement la mort. Il est
habituel qu'il se constitue progressivement une cirrhose : une hypertension portale peu alors
se développer et entraîner des hémorragies digestives ; la cirrhose peut se compliquer de
carcinome hépatocellulaire, surtout en cas d'hépatite chronique active d'origine virale.
Dans le cas particulier des hépatites chroniques actives médicamenteuses, l'arrêt de
l'administration du médicament responsable entraîne généralement une amélioration des
lésions hépatiques ; cependant, chez certains malades, en particulier en cas d'hépatite
chronique active dûe au maléate de perhexiline, les lésions hépatiques peuvent continuer à
s'aggraver malgré l'interruption du médicament responsable. Ce n'est guère que dans ce
dernier cas qu'on pourrait être amené à discuter la corticothérapie.
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
221
4.3 FORME CHOLESTATIQUE
Chez certains malades, l'hépatite chronique active entraîne une cholestase marquée, avec
ictère plus ou moins intense, prurit et augmentation des phosphatases alcalines. Tantôt la
cholestase est permanente, dominant le tableau clinique, qui ressemble alors d'assez près à
celui d'une cirrhose biliaire primitive. Tantôt la cholestase survient par périodes,
accompagnant les poussées évolutives de l'hépatite chronique active.
4.4 FORME ASYMPTOMATIQUE
Dans un certain nombre de cas, il existe des lésions plus ou moins intenses d'hépatite
chronique active, sans aucun signe fonctionnel, en particulier sans asthénie et avec peu ou pas
d'anomalies biochimiques, en particulier sans élévation marquée des transaminases. Ces
formes asymptomatiques sont découvertes soit à l'occasion d'un examen biologique
systématique qui révèle une élévation modérée des transaminases, soit chez un porteur
apparemment sain chez qui l'antigène HBs peut être détecté à l'occasion d'un don du sang. Il
semble que ces formes asymptomatiques puissent, en l'absence de tout traitement, être
longtemps bien tolérées.
4.5 FORME SELON L'ETIOLOGIE
Certaines particularités peuvent être remarquées suivant l'étiologie :
♦
Hépatite chronique active virale B :
Souvent un homme de 30 à 50 ans.
Manifestations systémiques rares.
Antigène HBs présent, Anticorps antinoyaux absents.
Risque de transmission sexuelle élevé
Risque de carcinome hépatocellulaire élevé en cas de cirrhose (environ 20-30 %).
♦
Hépatite chronique active virale C :
Homme ou femme
Facteurs de risque principaux : transfusion d'avant 1990, toxicomanie par voie
injectable même épisodique et ancienne
Risque de transmission sexuelle très faible mais non nul
Risque de carcinome hépatocellulaire élevé en cas de cirrhose (environ 20-30 %).
♦
Hépatite chronique active autoimmune :
Le plus souvent une femme.
Activité élevée.
Manifestations systémiques fréquentes.
Antigène HBs absent. Anticorps antinoyau et/ou anti-muscle lisse (ou anti LKM1)
présents à titre élevé.
Risque de carcinome hépatocellulaire faible.
5 DIAGNOSTIC DIFFÉRENTIEL
Une hépatite chronique active B doit être distinguée d'une hépatite virale aiguë quand la
maladie est révélée par une élévation importante des transaminases ; celle-ci peut alors être
liée soit à une poussée évolutive de la maladie soit à une surinfection par le virus delta (voir
aussi le chapitre hépatites virales aiguës).
Dans certains cas d'hépatite chronique active, C en particulier, la présence d'une cholestase
importante fait discuter une maladie des voies biliaires (cirrhose biliaire primitive ou
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
222
cholangite sclérosante).
Une maladie de Wilson (maladie héréditaire avec surcharge en cuivre et symptoma-tologie
hépatique et neurologique) doit être systématiquement recherchée devant un tableau d'hépatite
chronique sans signe d'infection virale, la D-Pénicillamine permettant d'arrêter l'évolution de
la maladie.
De même une hémochromatose doit être cherchée par principe devant une hépatite chronique
sans étiologie apparente.
6 PRINCIPES THÉRAPEUTIQUES
6.1 TRAITEMENT DE L'HEPATITE CHRONIQUE B
Le rationnel thérapeutique, les indications, les modalités et résultats du traitement de
l’infection virale B sont détaillés dans l’annexe « traitements de l’hépatite chronique B ». On
retiendra que nous avons le choix entre un traitement par Interféron pégylé pour 48 semaines
et/ou un traitement prolongé virosuppresseur par analogues nucléosidique (lamivudine) ou
nucléotidique (Adéfovir). Ces traitements permettent une virosuppression efficace et
bénéfique pour les patients (régression de l’hépatopathie, réduction des risques de
complications de la cirrhose) mais qu’ils ne permettent pas de guérison virologique
contrairement aux traitements de l’infection virale C.
6.2 2. TRAITEMENT DE L'HEPATITE D
Le but du traitement est l'éradication de l'infection virale. Ses indications sont le traitement
d'une hépatite chronique delta, histologiquement prouvée avec présence des marqueurs de
réplication virale. Pour le VHD, la multiplication virale est définie par une
hypertransaminasémie, la détection des IgM anti-delta et de l'ARN du VHD dans le sérum et
de l'Ag delta dans le foie ; ces anomalies coexistent souvent avec une multiplication B faible,
voire nulle.
Les données ne sont que parcellaires pour le traitement des hépatites D. La réponse au
traitement est souvent médiocre et les rechutes sont fréquentes. C'est l'Interféron-α qui est
utilisé ; la posologie généralement conseillée est de 9 MU 3 fois par semaine pour 48
semaines. Avec ce type de traitement, la moitié des patients normalisent leurs transaminases
et négativent leur virémie D avec une amélioration histologique ; après l'arrêt du traitement, la
moitié des patients traités avec ce régime garde des transaminases normales mais la virémie
réapparaît le plus souvent ; le traitement de l'hépatite delta apparaît donc relativement
décevant. Cependant, la gravité potentielle de l'hépatite D amène à la retenir comme
indication à traitement, d'autant que les résultats histologiques à long terme suggèrent un
bénéfice histologique notable chez les patients ayant reçu un traitement renforcé. Aujourd’hui,
l’interféron pégylé est utilisé avec des résultats encore préliminaires, mais, semble-t-il,
supérieurs à ceux de l’interféron standard.
6.3 TRAITEMENT DE L'HEPATITE CHRONIQUE C
Le rationnel thérapeutique, les indications, les modalités et résultats du traitement de
l’infection virale C sont détaillés dans l’annexe « traitements de l’hépatite C ». On retiendra
que le traitement associe l’Interféron pégylé et la ribavirine pour des durées de 24 ou 48
semaines selon les génotypes. Ces traitements permettent une guérison virologique dans
environ 50% des cas avec une guérison progressive des lésions histologiques hépatiques
autorisée par les capacités de régénération hépatique et de remodelage de la fibrose.
La Ribavirine en monothérapie est peu efficace dans le traitement de l'hépatite chronique C et
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
223
pourra être proposée aux patients ayant des contre-indications à l'utilisation de l'Interféron
telles que les dysthyroïdies sévères, les maladies auto-immunes associées, des contre-
indications hématologiques, des cryoglobulinémies mixtes symptomatiques sévères ne
répondant pas au traitement antiviral.
Le problème des patients non répondeurs à l'Interféron-α reste entier. D'autres traitements
anti-viraux, incluant les inhibiteurs de protéases ou de polymérase du VHC ou des
immunomodulateurs, sont en cours de développement.
6.4 EFFETS SECONDAIRES.
6.4.1 Effets secondaires de l'Interféron-α.
Les effets secondaires liés à l'utilisation de l'IFN-α sont nombreux, dominés par une asthénie,
un syndrome pseudo-grippal (fièvre, frissons, myalgies, céphalées), des troubles digestifs à
type de nausées voire de diarrhée, et des troubles thymiques observés chez 1/3 des patients
(irritabilité, dépression, labilité émotionnelle), sécheresse cutanée et troubles
ophtalmologiques. Ces troubles conduisent rarement à l'arrêt du traitement ou à l'introduction
de traitements additionnels, si ce n'est le Paracétamol qui permet souvent de contrôler le
syndrome pseudo-grippal. L'inconvénient principal est lié à l'asthénie dont il est difficile de
dire si elle est induite par le traitement ou liée à l'hépatopathie sous-jacente.
Biologiquement, une leuconeutropénie ou une thrombopénie peuvent être observées,
principalement chez les patients cirrhotiques. L'ensemble de ces effets secondaires est
réversible et plus de 95 % des patients feront leur traitement dans son intégralité. Quelques
effets secondaires sévères (cardio-vasculaires, psychiatriques, ophtalmologiques, thyroïdiens
ou l'exacerbation de maladies auto-immunes jusqu'alors méconnues) sont possibles mais rares
; ils doivent être reconnus précocément de façon à arrêter au plus tôt le traitement.
6.4.2
Les effets secondaires de la Ribavirine :
Des effets tératogéniques et des fétopathies ont été décrits dans les modèles expérimentaux
animaux. Chez l'homme, dans les essais cliniques, les effets secondaires usuels sont
habituellement minimes et réversibles et dominés par :
1.
un inconfort abdominal spontanément résolutif malgré la poursuite du traitement ;
2.
une hyperuricémie asymptomatique ;
3.
une anémie hémolytique souvent modérée avec une diminution de l'ordre de 1 g de
l'hémoglobinémie mais pouvant entrainer des modifications thérapeutiques en cas de
baisse plus importante. Des accidents ischémiques cardiaques ont été rapportés
probablement favorisés par l'anémie hémolytique. Une coronaropathie évolutive est donc
une contre-indication à la Ribavirine.
D'autres effets inhabituels peuvent être observés : un prurit, une toxidermie, une toux sèche.
L'ensemble de ces résultats montre que si la Ribavirine en monothérapie a peu d'indication
dans le traitement de l'hépatite chronique C, l'association Ribavirine/Interféron-α est
supérieure à l'Interféron-α seul chez des patients naïfs, rechuteurs et à un moindre degré non
répondeurs. Ceci a été confirmé par deux récentes méta-analyses montrant que la combinaison
dans l'ensemble des populations traitées multipliait par un facteur 2 ou 3 l'activité de
l'Interféron-α .
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
224
6.5 CAS PARTICULIERS
6.5.1 L'infection associée par le VIH.
L'infection par le VIH augmente le risque de passage à la chronicité mais aussi la sévérité
histologique des hépatopathies virales B et C, notamment chez les toxicomanes. Les résultats
des traitements antiviraux chez les sujets coinfectés par le VIH, montrent de moins bons
résultats, en terme d'éradication virale, que chez les sujets non infectés par le VIH. Cependant,
l'espoir d'une amélioration durable chez des sujets ayant une hépatopathie sévère justifie la
poursuite des essais thérapeutiques.
6.5.2
Autres situations d'immunodépression.
Elles ont toutes les mêmes conséquences que celles signalées avec la co-infection par le VIH ;
elles comprennent les hémodialysés et transplantés rénaux, bon nombre de patients
hématologiques mais aussi, fait souvent moins connu, les alcooliques chroniques. Dans toutes
ces populations la prévalence des infections chroniques par les virus B et C est
particulièrement fréquente, survenant il faut le rappeler, chez des sujets qui sont tous de très
mauvais répondeurs à la vaccination contre le virus B (comme, sans doute, à la plupart des
autres vaccins) ; un effort particulier restera donc à faire, dans l'avenir, pour travailler sur des
protocoles de vaccination renforcée chez tous ces patients.
6.5.3
Les infections hépatotropes multiples.
Certains sujets sont infectés par plusieurs virus hépatotropes (B et C, ou B, C et D). Quoiqu'il
ait été décrit un "équilibre" de multiplication des différents virus (avec un risque de rupture de
cet équilibre en cas d'efficacité des traitements sur l'un ou l'autre virus), il est aujourd'hui
logique de proposer un traitement antiviral dans ces cas, particulièrement lorsque l'hépatite est
histologiquement très active, la décision étant cependant moins claire en cas de virus D
associé.
EN CONCLUSION, le traitement par Interféron pégylé et ribavirine a une efficacité
indiscutable quoiqu'encore insuffisante pour le contrôle des hépatites chroniques virales C.
Les profils de réponse varient selon le type du virus suggérant des mécanismes d'action
différents et selon le stade de la maladie. De façon à éviter la cascade hépatite
chronique/cirrhose/carcinome hépatocellulaire, il apparaît aujourd'hui justifié de dépister les
très nombreux porteurs chroniques d'une infection virale B ou C de façon à leur proposer au
plus tôt une tentative thérapeutique par Interféron, dont l'inefficacité fera discuter d'autres
associations thérapeutiques si l'activité histologique de l'hépatopathie le justifie. Mais la vraie
priorité reste à la prévention, possible et efficace contre l'hépatite B grâce au vaccin, limitée
aux contrôles rigoureux des produits transfusionnels et apparentés en ce qui concerne le virus
C.
6.6 HÉPATITE CHRONIQUE ACTIVE AUTOIMMUNE
Elimination d'une étiologie médicamenteuse ou virale C ou B.
Indication des corticoïdes (cliniques, biologiques et histologiques) associés à
l'Azathioprine (Imurel : 50 à 100 mg/j) : Prednisolone à dose initiale forte (1/2 mg/kg/j)
jusqu'à la diminution des signes d'activité puis dose d'entretien (5-15 mg/j).
Comme on a vu dans les chapitres précédents, l'association d'une infection virale C à
certaines hépatites d'allure autoimmune (avec anti LKM1) pose le problème de la décision
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
225
de traitement soit par Interféron (avec le risque d'aggraver une pathologie autoimmune
mais une efficacité potentielle sur le virus C) ou par corticoïdes (efficace sur la partie
autoimmune de la maladie mais bien sûr contre-indiquée par l'infection virale).
6.7 HÉPATITE MEDICAMENTEUSE
Après l'arrêt du médicament responsable il est rare, mais possible, d'observer la persistance de
signes importants d'activité qui feraient éventuellement discuter les corticoïdes.
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226
ANOMALIES BIOLOGIQUES HEPATIQUES CHEZ UN
SUJET ASYMTOMATIQUE
Anaïs Vallet-Pichard et Stanislas Pol
Service d’hépatologie, Hôpital Necker
Objectifs (question 83 du programme officiel)
Interpréter des anomalies biologiques hépatiques chez un sujet asymptomatique
Points forts à comprendre
Devant une hypertransaminasémie supérieure à dix fois la valeur normale, il faut
rechercher en priorité :
- une prise médicamenteuse suspecte dans les trois mois précédant l’hépatite et devant
faire suspendre le traitement;
- une hépatite aigüe virale (virus hépatotropes classiques A, B, C ou autres types CMV,
HSV, VZV,EBV…) ou parasitaire (toxoplasmose);
- une étiologie toxique;
- une hépatite auto-immune (en particulier chez la femme de plus de 40 ans).
On ne méconnaitra pas le diagnostic de migration lithiasique et dans des contextes
cliniques évocateurs seront discutés le foie de choc ou le foie septique.
Devant une hypertransaminasémie inférieure à dix fois la valeur normale, trois grandes
causes sont à rechercher principalement:
- l’alcoolisme chronique;
- les troubles dysmétaboliques ;
- l’hépatite C chronique.
Devant une cholestase, il faut différencier les causes intra-hépatiques et les causes extra-
hépatiques au moyen d’une échographie.
Devant une augmentation isolée des GGT, il faut principalement rechercher:
- un alcoolisme chronique;
- une prise médicamenteuse;
-un surpoids ou des variations pondérales brutales
Points forts à retenir
Les anomalies biologiques hépatiques sont fréquentes (5% de la population générale).
La démarche diagnostique doit être simple et étagée: les principales étiologies pourront
être recherchées par un interrogatoire (consommation quotidienne d’alcool, prise
médicamenteuse, facteurs de risque viraux, poids et variations pondérales…) et un
examen clinique complets et des examens complémentaires simples (biologiques et
échographique).
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
227
Le recours à la ponction biopsie hépatique ou à des examens radiologiques plus
complexes pourra être nécessaire en seconde intention.
La prise en charge thérapeutique précoce conditionne le pronostic et la réversibilité de
l’éventuelle hépatopathie sous-jacente.
En cas d’hépatite aigüe, quelle qu’en soit l’étiologie, il faut éviter de prescrire des
médicaments et arrêter tous les traitements en cours non indispensables. Une hépatite
aigüe sévère peut évoluer vers une hépatite fulminante ou sub-fulminante définie par un
une encéphalopathie hépatique associée à un TP<20 à 30% devant faire discuter une
transplantation hépatique en super-urgence. Tout retard à la prise en charge spécialisée
est une perte de chance pour le patient.
Les anomalies biologiques hépatiques sont fréquentes (environ 5% de la population générale).
Elles sont habituellement regroupées dans des grands syndromes (cytolyse ou
hypertransaminasémie ; cholestase avec augmentation des phosphatases alcalines et des
GGT), volontiers associés. Leurs causes sont multiples et justifient une prise en charge
diagnostique et thérapeutique précoce qui conditionnent le pronostic et notamment la
réversibilité de l’hépatopathie correspondante.
1 HYPERTRANSAMINASEMIES
L'hypertransaminasémie est une situation clinique fréquente. Souvent découverte
fortuitement, elle met le médecin face à l'ensemble de la pathologie hépatique. Une démarche
diagnostique simple et étagée peut permettre de conduire à un diagnostic étiologique qui
appuiera une prise en charge thérapeutique adaptée. La démarche diagnostique est largement
dépendante de l'importance et de la durée de l'hypertransaminasémie
1.1 Hypertransaminasémies supérieures à dix fois la valeur normale
Cette situation, en fait rare, pose les problèmes du diagnostic d'une hépatite aiguë. Moins que
l'examen clinique, c'est l'interrogatoire, extrêmement détaillé, qui s’attachera à rechercher des
facteurs de risque de contamination virale (voyage récent en zone d'endémie, toxicomanie
intraveineuse, transfusion sanguine, sexualité à partenaires multiples), une prise
médicamenteuse ou l'exposition à un toxique et les examens complémentaires qui permettront
d'en établir l'étiologie
(fig. 1).
•
Toute prise médicamenteuse suspecte dans les trois mois précédant la découverte de
l'hypertransaminasémie conduira à l’arrêt du traitement en raison des risques de progression
de l'hépatite médicamenteuse toxique ou immuno-allergique. On retiendra comme principales
molécules capables de donner des hépatites cytolytiques : l’halothane, le cyclophosphamide,
la vincristine, la methyldopa, le verapamil, la salazosulfapyridine, les fibrates, les sulfamides,
l’isoniazide, les imipraminiques, les AINS, le paracétamol, l’allopurinol …
•
L’exposition à un toxique doit être recherchée à l’interrogatoire (en particulier la
consommation de champignons vénéneux ou de stupéfiants métamphétamine-ectasy ou
cocaïne).
•
Dans des contextes cliniques évocateurs, les diagnostics de foie de choc, de foie septique ou
de formes pseudo-hépatitiques de maladies lithiasiques seront discutés. Le foie de choc
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
228
survient au décours d’un choc hypovolémique ou cardiogénique, qui a d’ailleurs pu passer
inaperçu (troubles du rythmes spontanément résolutifs, bas débit au cours d’une dialyse) et se
caractérise par un tableau d’hépatite aigüe fréquemment associée à une insuffisance
hépatocellulaire et à une insuffisance rénale. Les anomalies biologiques hépatiques (ASAT,
ALAT, TP) se normalisent rapidement dans les 48 heures avec la correction du choc. Le foie
septique est exceptionnel, survenant, en dehors du contexte de choc septique, chez des
patients immunodéprimés et se traduisant par une altération franche de l’état général, une
hépatomégalie douloureuse et un ictère. Enfin, les migrations lithiasiques sont diagnostiquées
dans un contexte clinique évocateur associant douleurs de type biliaire, ictère et fièvre. Les
perturbations du bilan hépatique régressent rapidement dans les 24 à 48 heures. Des formes
frustres sans fièvre, ni ictère, ni douleur typiques peuvent rendre le diagnostic plus difficile.
Ce tableau de migration lithiasique justifie la réalisation d’une échographie hépatique devant
une hypertransaminasémie supérieure à dix fois la valeur normale pour explorer la voie
biliaire principale.
•
Le diagnostic d’hépatite virale aigüe sera fondé sur l’interrogatoire retrouvant des facteurs
de risque de contamination et sur les sérologies. En première intention, on recherchera les
IgM anti HAV, l’Ag HBs et les Ac anti HBc de type IgM, la PCR virale C
afin de
diagnostiquer une infection virale liée aux virus hépatotropes classiques (A, B, C). On en
profitera pour dépister le VIH, les facteurs de risque étant identiques à ceux des hépatites B et
C. En seconde intention, on discutera d’autres atteintes infectieuses, virales ou non, et on
recherchera les Ac anti delta (chez les porteurs de l’Ag HBs), les IgM anti CMV, anti EBV
(VCA), anti HSV, anti VZV, anti toxoplasmose, la sérologie syphilitique (TPHA VDRL).
•
Les hépatites auto-immunes seront recherchées en particulier chez la femme de plus de 40
ans en dosant les anticorps anti-tissus : anti-nucléaires, antimitochondries, anti-muscle lisse et
anti LKM1 (voir : Pour approfondir).
•
Enfin, et plus particulièrement chez des sujets de moins de 40 ans, le dosage de la cuprémie
et de la ceruléoplasmine sera demandé à la recherche d’une poussée de Maladie de Wilson.
1.2 Hypertransaminasémies modérées, inférieures à dix fois la normale
Une augmentation de l'activité sérique de l'alanine aminotransférase (ALAT) ou de l'aspartate
aminotransférase (ASAT) supérieure ou égale à 1,5 fois la normale et inférieure à 10 fois la
valeur supérieure de la norme est une situation fréquente. Elle est observée dans 2 à 5% de la
population générale. Elle justifie une démarche diagnostique simple
(tabl. I).
La priorité est d'affirmer la réalité ou le caractère prolongé de l'hypertransaminasémie : en
effet dans la moitié des cas environ, un contrôle un mois après le premier dosage de l'activité
sérique des transaminases montre que celle-ci s'est normalisée (il en est ainsi de
l'hypertransaminasémie portant sur les ASAT au décours d'un exercice musculaire).
A l’interrogatoire du sujet on précisera : son poids et sa surface corporelle (en notant
d'éventuels amaigrissements ou prises de poids récents) ; sa consommation d'alcool
quotidienne (souvent sous-estimée et à tort banalisée): une surconsommation d'alcool sera
affirmée par un interrogatoire efficace ou suggérée par une augmentation du VGM, des
ASAT, des GGT et des IgA; ses prises médicamenteuses (incluant la phytothérapie prolongée
sous forme de pilules, herbes, tisanes ou décoctions, dont l’hépatotoxicité n'a été décrite que
récemment) particulièrement les trois derniers mois précédant l'apparition des anomalies
biologiques hépatiques ; les facteurs de risque de contamination virale, et plus
particulièrement une toxicomanie intraveineuse même ancienne et anecdotique ou des
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
229
antécédents transfusionnels; l'éventuelle exposition à des toxiques industriels.
L'examen clinique complet (incluant l'examen de la thyroïde, l'examen cardiovasculaire avec
la mesure du pouls…) est le plus souvent pauvre.
1.2.1
Diagnostics les plus fréquents
Les trois causes principales d'hypertransaminasémie prolongée modérée sont l'alcoolisation
chronique, l'obésité ou la surcharge pondérale et l'infection virale C.
• L'alcoolisation chronique ou la consommation excessive d'alcool (plus de 4 verres par jour
chez l’homme et de 2 verres par jour chez la femme) touche 3 à 5 millions de français et est
responsable de 30 à 50% des hypertransaminasémies modérées prolongées. Il s'agit d'une
alcoolisation trop souvent considérée comme banale et sans risque. Pour l'ensemble des
buveurs excessifs, un tiers a un foie normal, un tiers a une cirrhose et un autre tiers a une
maladie alcoolique du foie non cirrhotique (stéatose ou hépatite alcoolique) témoignant de
l'inégalité génétique et constitutionnelle vis-à-vis de l’hépatotoxicité de l'alcool. Le risque
d'hépatopathie alcoolique n'est pas clairement corrélé à la consommation d'alcool ; le patient
doit être prévenu du probable retentissement hépatique de sa surconsommation d’alcool. Le
seul traitement à lui proposer est l’abstinence qui permettra également l'amélioration d'autres
problèmes, tels qu'une dyslipidémie, une hypertension artérielle, des troubles de l'humeur ou
du comportement pouvant poser des problèmes socio-professionnels ou familiaux. Si le
sevrage ambulatoire ne peut être obtenu par le médecin généraliste, des prises en charge
alcoologiques (consultations, voire hospitalisations) seront discutées.
•
Les troubles dysmétaboliques (dyslipidémies, dysglycorégulation, obésité) représentent
20% environ des causes d'hypertransaminasémies prolongées. Chez environ deux tiers des
sujets ayant un surpoids, après avoir éliminé d'autres causes potentielles d'augmentation des
transaminases, une échographie pourra montrer une stéatose hépatique (« foie gras ») sous la
forme d'un foie hyperéchogène (brillant). Récemment, une nouvelle entité a été décrite, la
NASH (non alcoholic steato-hepatitis) associant des lésions de stéatose et d’hépatite pseudo-
alcoolique (corps de Mallory, infiltrat à polynucléaires neutrophiles, lésions hépatocytaires
centrolobulaires)
qui ont un potentiel fibrosant et peuvent évoluer vers la cirrhose dans un
tiers des cas. Cela justifiera une prise en charge thérapeutique sérieuse (diététique,
médicamenteuse) des différents troubles métaboliques ; un amaigrissement progressif de 10%
du poids corporel permet, dans ces situations, une normalisation des transaminases dans 90%
des cas. A l'opposé, un amaigrissement marqué peut aussi s'accompagner d'une stéatose avec
les mêmes anomalies biologiques hépatiques.
•
Le virus de l'hépatite C est responsable de 15 à 20% des hypertransaminasémies modérées
prolongées. Dans 2/3 des cas, un facteur de risque de contamination est identifié (risque
paréntéral principalement : usage de drogues intraveineux ou inhalé, transfusions de produits
sanguins ou gestes médicaux lourds); la coexistence des anticorps anti-VHC et de
l'hypertransaminasémie témoigne dans plus de 95% des cas d'une hépatite chronique (voir :
Pour approfondir).
Par un interrogatoire approfondi et des examens complémentaires simples (VGM, GGT, bilan
lipidique, anticorps anti-VHC), le diagnostic sera le plus souvent suspecté, voire établi. La
prise en charge thérapeutique sera principalement diététique pour les deux principales causes,
et justifiera une prise en charge hépatologique spécialisée pour la troisième. Il ne faudra pas
méconnaître la possibilité dans près de la moitié des cas de pathologie intriquée (alcoolique et
Paris V - Pôle 2 – Hépato-gastroentérologie – R Jian 19/01/2005
230
dysmétabolique ou alcoolique et virale).
Enfin, il faut signaler que des données récentes modifient l'approche diagnostique des
hypertransaminasémies puisque 10% des patients ayant une hypertransaminasémie
inexpliquée auraient une maladie coeliaque asymptomatique. Il est donc licite de rechercher
les anticorps antigliadine et antiendomysium et de poursuivre s'ils sont positifs par une
endoscopie digestive haute avec biopsies duodénales à la recherche d'une atrophie villositaire.
1.2.2
Maladies générales à éliminer
En dehors des étiologies évidentes (qui peuvent cependant elles-mêmes justifier la réalisation
d'une PBH, notamment pour la pathologie alcoolique ou en cas de suspicion de NASH),
la
PBH sera souvent l'examen clé du diagnostic de l'hypertransaminasémie isolée et prolongée.
Avant que cette PBH soit réalisée, auront été éliminées les maladies générales suivantes :
¾ Les maladies thyroïdiennes : l'hypo mais surtout l'hyperthyroïdie donne volontiers des
hypertransaminasémies avec une augmentation de la GGT; la tachycardie est fréquente et
devra au moindre doute conduire aux dosages hormonaux (TSH). Le diagnostic d'une
dysthyroïdie ne doit pas conduire à la réalisation d'une PBH mais à l'initiation d'un
traitement qui permet souvent rapidement (dans les deux mois) la normalisation du bilan
biologique hépatique avec l'euthyroïdie.
¾ La dysglycorégulation : le diabète déséquilibré non insulino ou insulino-dépendant peut
être responsable d’une hypertransaminasémie modérée. Un traitement bien conduit par
régime, anti-diabétiques oraux ou insuline permet, dès lors que la glycémie est normale,
de normaliser les transaminases.
¾ Les maladies cardiaques : les cardiopathies infracliniques et principalement les
cardiopathies droites ou globales peuvent s'accompagner d'anomalies biologiques
hépatiques. La cholestase est plus fréquente que la cytolyse. Devant une cytolyse
prolongée et inexpliquée, l'examen clinique du cœur, l'électrocardiogramme, voire
l'échocardiographie sont cependant justifiés. L'échographie montre le plus souvent une
dilatation de la veine cave inférieure ou des veines sus-hépatiques en cas de cardiopathie
rendant compte d'un « foie cardiaque ».
¾ Les maladies musculaires : elles sont habituellement peu ou pas symptomatiques et le plus
souvent bénignes, notamment chez l'adolescent. Evoquées par le contraste entre l'élévation
des aminotransférases (et principalement de l'aspartate aminotransférase) et la normalité
de la GGT, elles seront confirmées par le dosage des enzymes musculaires (CPK) et de la
créatinurie. Cette hypertransaminasémie peut s'observer chez les sportifs et notamment les
marathoniens au décours d'un effort prolongé justifiant la répétition de la mesure des
transaminases.
1.2.3
Diagnostics rares à évoquer
Toute la pathologie hépatique peut être discutée devant une hypertransaminasémie prolongée
et la ponction biopsie hépatique sera souvent l’examen clé du diagnostic. On évoquera
principalement les maladies suivantes :
¾ Les hépatites auto-immunes : elles sont principalement rencontrées chez l'enfant et la
femme au-delà de la quarantaine, d'autant qu'existent cliniquement des anomalies
compatibles avec une maladie auto-immune (syndrome sec, polyarthralgies, dysthyroïdie,
vascularite cutanée ou neurologique) et un syndrome biologique inflammatoire. La
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présence d'anticorps anti-tissus permettra d'affirmer le diagnostic et la PBH permettra de
déterminer le degré de l’atteinte hépatique (activité nécrotico-inflammatoire et fibrose).
Un traitement immunosuppresseur sera débuté.
¾ L’hémochromatose génétique pour laquelle l'antécédent familial n'est qu'inconstamment
retrouvé doit être recherchée ; un bilan du fer perturbé (augmentation du fer sérique,
augmentation de la ferritinémie, mais surtout coefficient de saturation de la sidérophiline
> 60%) permettra d'évoquer fortement le diagnostic et justifiera la recherche de la
mutation C282Y du gène HFE. En cas d’homozygotie pour la mutation, le diagnostic
d’hémochromatose génétique sera certain et la biopsie inutile avant 50 ans (si les
transaminases sont inférieures à 5 fois la normale et la ferritinémie inférieure à 1500 µg/l)
et en l’absence d’argument pour une cirrhose. Un traitement par saignées sera entrepris
pour obtenir une stricte normalisation du bilan martial et un dépistage génétique familial
sera proposé. Les signes extrahépatiques de l'hémochromatose (mélanodermie, diabète,
cardiopathie, chondrocalcinose, autre endocrinopathie…) seront recherchés. La biopsie
hépatique avec le dosage du fer intra-hépatique à visée diagnostique a perdu de son intérêt
depuis l’apparition du diagnostic génétique mais garde des indications dans les situations
douteuses, en cas de perturbation du bilan martial sans mutation retrouvée ou associée à
une hétérozygotie.
¾ La maladie de Wilson, maladie de surcharge beaucoup moins fréquente, sera suspectée
devant des perturbations du bilan du cuivre (cuprémie, cuprurie, céruloplasmine),
l’existence de signes extra-hépatiques (troubles neuropsychiques, anémie hémolytique,
anneau cornéen de Kaiser-Fleicher) et sera confirmée par la biopsie hépatique et le dosage
du cuivre intra-hépatique. Une enquête familiale sera entreprise une fois le diagnostic
posé.
¾ L’exposition à des substances toxiques industrielles, domestiques ou à la phytothérapie
pourra justifier, en cas de difficulté diagnostique, la réalisation d'une PBH.
1.2.4
En résumé et en pratique
Devant une hypertransaminasémie modérée et prolongée, confirmée à au moins deux dosages
à un mois d'intervalle, trois situations principales s'observent.
¾ Facteur étiologique précis
Alcoolisme, surpoids ou hyperlipidémie : la PBH n'est pas justifiée à titre diagnostique. On
proposera un sevrage alcoolique et/ou un amaigrissement progressif, suivi quelques semaines
(deux mois environ) plus tard d'un contrôle biologique. La normalisation du bilan ne justifiera
que la poursuite des règles hygiéno-diététiques. La persistance des anomalies pourra justifier
la PBH.
¾ Absence de diagnostic étiologique précis
Après avoir éliminé une dysthyroïdie, un diabète, une pathologie cardiaque ou musculaire par
des examens cliniques et complémentaires simples, le patient sera adressé dans un service
spécialisé de façon que soient réalisés des examens plus spécifiques à la recherche des
diagnostics d'hémochromatose, d'hépatite auto-immune, médicamenteuse ou toxique et de
maladie de Wilson . Dans la plupart des cas, on aura recours à une PBH.
¾ Hépatite C
En cas d'hépatite C identifiée lors du premier bilan, le patient justifiera d'une prise en charge
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hospitalière pour la biopsie hépatique et le traitement éventuel de son hépatite chronique.
Enfin, on évitera quelques erreurs courantes dans la gestion des hypertransaminasémies
¾ Méconnaître la possible gravité d'une hépatite aiguë quelle qu'en soit l'étiologie : toute
hépatite aiguë justifie une prise en charge diagnostique et thérapeutique incluant le suivi
du patient jusqu'à sa guérison. La mesure du TP permet de s’assurer de la présence ou de
l’absence d’une insuffisance hépatique : un TP< 50% définit une hépatite aigüe sévère qui
doit être prise en charge dans un centre spécialisé, au mieux pouvant réaliser une
transplantation hépatique en urgence. Une hépatite aigüe sévère peut évoluer vers une
hépatite fulminante ou sub-fulminante définie par un une encéphalopathie hépatique
associée à un TP<20 à 30% devant faire discuter une transplantation hépatique en super-
urgence.
¾ Devant une hépatite aiguë quelle qu'en soit l'étiologie, abuser de prescriptions
médicamenteuses non absolument indispensables qui risquent plus d'aggraver le patient
que de lui rendre service. A ce titre, tout médicament, éventuellement responsable de
l'hépatite aiguë, doit être aussitôt arrêté étant donné les risques d'aggravation.
¾ Devant une hypertransaminasémie modérée, méconnaître un problème d'alcool souvent
sous-estimé, voire nié par le patient ou imputer cette hypertransaminasémie à une prise
médicamenteuse « de confort » alors qu'il existe une étiologie (par exemple virale)
éventuellement curable.
Pour ces différentes raisons, toute interrogation sans réponse face à une
hypertransaminasémie, soit élevée, soit modérée mais constante ne fera pas reculer le médecin
non spécialiste et conduira à une consultation spécialisée.
2 CHOLESTASE
La cholestase se définit comme l’ensemble des signes liés à la diminution ou à l’arrêt du flux
biliaire. Toute lésion altérant ce flux à un niveau quelconque entre sa source hépatocytaire
(canalicule biliaire) et sa terminaison ampullaire entraîne une cholestase.
Cliniquement, la cholestase peut être asymptomatique ou se compliquer de prurit, d’ictère
avec urines foncées et selles décolorées. Dans les formes sévères de cholestase chronique,
diverses atteintes sont possibles telles que l’amaigrissement et la diarrhée liés à une
stéatorrhée, les ecchymoses par carence en vitamine K, les xanthomes sous-cutanés par
hypercholestérolémie, les douleurs osseuses voire les fractures spontanées par ostéomalacie,
les signes ophtalmiques par carence en vitamine A….
Biologiquement, il existe une augmentation des phophatases alcalines (test sensible mais peu
spécifique du fait d’une possible origine osseuse, placentaire ou intestinale), des GGT (test
sensible mais aspécifique car il peut traduire une cytolyse ou une induction enzymatique) et
de la 5’nucléotidase (test plus spécifique mais moins sensible et de réalisation plus délicate).
C’est finalement l’élévation couplée des phophatases alcalines et des GGT qui a la plus
grande valeur pour le diagnostic. Il peut s’associer à ces anomalies une hyperbilirubinémie à
prédominance conjuguée.
Devant une cholestase biologique, il faut en premier lieu déterminer s’il s’agit d’une
cholestase extra-hépatique (consécutive à un obstacle sur la voie biliaire principale) ou intra-
hépatique (consécutive à une obstruction sur les voies biliaires intra-hépatiques ou à un arrêt
ou une diminution de production de la bile par les hépatocytes). La distinction entre ces 2
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situations, classiquement de traitement chirurgical ou médical, est basée sur des arguments
cliniques (triade associant douleur, fièvre, ictère orientant vers une pathologie lithiasique de la
VB ou ictère et AEG orientant vers un cancer de la tête du pancréas) et surtout radiologiques.
L’échographie est l’examen clé permettant d’affirmer le siège extra-hépatique de la cholestase
si elle visualise une dilatation des voies biliaires intra-hépatiques ; si elle met en évidence une
grosse vésicule, on peut situer l’obstacle au dessous de l’abouchement du canal cystique. Il est
important de préciser que cette dilatation peut manquer en cas d’obstacle récent.
2.1 Causes extra-hépatiques de cholestase
¾ La lithiase du cholédoque survient habituellement chez une femme et se traduit par la
triade douleur, fièvre et ictère sur 24 à 48 heures. L’échographie visualise inconstamment
(environ 50% des cas) le calcul, mais une lithiase vésiculaire est fréquemment présente.
Le traitement est urgent et repose sur l’antibiothérapie couvrant les bacilles à gram
négatifs en attendant la levée rapide de l’obstacle par chirurgie (cholécystectomie et
extraction des calculs) ou cholangiographie rétrogade endoscopique qui permet d’affirmer
le diagnostic et d’éliminer le calcul (sphinctérotomie endoscopique).
¾ Le cancer de la tête du pancréas survient typiquement chez un sujet âgé et se révèle par un
ictère progressif sans douleur ni fièvre associé à une altération de l’état général.
L’échographie et le scanner mettent en évidence la tumeur. Le traitement curatif est
chirurgical si la tumeur est localisée sans envahissement locorégional ou métastatique
(duodéno-pancréatectomie céphalique). Dans le cas contraire, le traitement est palliatif par
drainage de la VBP soit chirurgical, soit endoscopique, suivi ou non d’une chimiothérapie.
¾ L’ampullome vatérien est d’évolution très lente et a une expression pseudo-
angiocholitique
¾ Le cholangiocarcinome de la voie biliaire principale ou du hile hépatique est révélé par les
mêmes symptômes que le cancer de la tête du pancréas. Le diagnostic repose sur le
scanner et la cholangioIRM. Seul le traitement chirurgical peut être curatif. Le traitement
palliatif assurant le drainage de la VBP peut être chirurgical, endoscopique ou
radiologique.
¾ Le cancer de la vésicule biliaire ou de l’estomac ayant envahi le pédicule hépatique
¾ Le syndrome de Mirizzi : il s’agit d’un calcul enclavé dans le canal cystique à l’origine
d’une grosse vésicule qui comprime la VBP.
¾ La pancréatite aigüe ou chronique, la cholangite sclérosante (cf infra) lorsque la maladie
touche la VBP, les parasitoses biliaires (douve, ascaris) ou la compression du pédicule
hépatique par une adénopathie tuberculeuse ou néoplasique sont plus rares et s’inscrivent
habituellement dans des contestes évocateurs. La combinaison des examens
morphologiques (échographie, TDM ou IRM abdominale, cholangioIRM, CPRE ou écho-
endoscopie) permet un diagnostic rapide et participe éventuellement au traitement
(drainage chirurgical par cholangiographie transhépatique, sphinctérotomie endoscopique,
mise en place d’une endo-prothèse biliaire, kystostomie pancréatique…).
2.2 Causes intra-hépatiques de cholestase
¾ Les lésions comprimant les voies biliaires intra-hépatiques : cancer hépatique primitif ou
secondaire, infiltration hépatique des hémopathies malignes, granulomatose dont la
sarcoïdose.
¾ Les lésions des canaux biliaires :
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o La cirrhose biliaire primitive (CBP) ou cholangite chronique destructrice non
suppurée active des canaux biliaires interlobulaires : chez une femme d’âge
moyen, elle se manifeste par une cholestase d’aggravation très progressive. Il
existe une hypergammaglobulinémie prédominant sur les IgM. Le diagnostic
se fait sur la positivité des anticorps anti-mitochondrie de type 2. Des
manifestations extra-hépatiques auto-immunes peuvent se rencontrer
(dysthyroïdie, Sjögren …). La biopsie hépatique confirme le diagnostic en
montrant une infiltration inflammatoire des canaux biliaires interlobulaires,
une ductopénie, une prolifération cholangiolaire et une fibrose pouvant aller
jusqu’à la cirrhose. Le traitement repose sur l’acide ursodésoxycholique (10-20
mg/kg/j) pour freiner la constitution de la cirrhose qui, lorsqu’elle est installée,
pourra conduire à une transplantation hépatique.
o La cholangite sclérosante primitive (CSP): elle se caractérise par une atteinte
des canaux biliaires de toute taille. Elle survient plutôt chez un homme de 40
ans, elle est fréquemment associée à une recto-colite hémorragique. Le
diagnostic est posé sur l’imagerie (écho-endoscopie, cholangioIRM ou CPRE)
devant un aspect de sténose et dilatatation sur les voies biliaires intra-
hépatiques et de sténose sans dilatation sus-sténotique sur les voies biliaires
extra-hépatiques. La biopsie, si elle est réalisée, peut être normale ou montrer
une infiltration lymphocytaire des canaux biliaires de toute taille, une fibrose
concentrique autour de ces canaux, une ductopénie et une fibrose pouvant aller
jusqu’à la cirrhose. Le risque est donc l’évolution vers la cirrhose secondaire
qui justifiera la réalisation d’une transplantation hépatique avant la survenue
d’un cholangiocarcinome. L’acide ursodésoxycholique ne semble pas efficace
pour éviter l’évolution cirrhogène.
o Les syndromes de recouvrement (overlap syndrome) : c’est l’association d’une
hépatite auto-immune (HAI) et d’une CBP ou d’une HAI et d’une CSP ou
d’une CBP et d’une CSP
o Les cholangiopathies auto-immunes : elles se caractérisent par une cholestase,
des lésions histologiques prédominantes des voies biliaires, la négativité des
anticorps anti-mitochondrie et la positivité des anticorps anti-muscle lisse et/ou
des facteurs anti-nucléaires et une faible réponse au traitement (corticoïde ou
acide ursodésoxycholique). Il s’agit peut-être d’un terme générique pour des
formes atypiques de CBP, HAI ou CSP, d’un état de transition ou d’une entité
distincte.
¾ Les lésions hépatocytaires : les hépatites aigües ou chroniques peuvent comporter une
expression cholestatique partielle ou dominante (virales, médicamenteuses,
alcooliques…), de même que la cirrhose également par le biais de l’insuffisance
hépatocellulaire ; enfin, la cholestase récurrente bénigne est une cause rare de cholestase
liée à un désordre intermittent de la sécrétion biliaire par les hépatocytes.
3 AUGMENTATION ISOLEE DE LA GGT
La GGT est souvent augmentée au cours des cytolyse et constamment au cours des
cholestases. Son augmentation peut être isolée et c’est alors un motif fréquent de consultation,
notamment par le biais de la médecine du travail.
Cette anomalie est sensible dans les pathologies hépato-biliaires mais elle est non spécifique
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car les GGT ont une répartition ubiquitaire dans les tissus et les organes: elles sont retrouvées
dans le foie mais aussi dans le pancréas, les glandes mammaires, les villosités intestinales, le
tube contourné proximal rénal, les vésicules séminales. Ainsi, une atteinte de ces différents
organes peut expliquer une augmentation isolée des taux sériques des GGT. En outre, les taux
peuvent présenter des variations physiologiques: par exemple, elles sont plus élevées chez les
hommes que chez les femmes, en post-ménopause qu'en période d'activité génitale, elles sont
plus faibles en cas de grossesse.
Avant de débuter un bilan étiologique, il faut vérifier la persistance de l'augmentation des
GGT dans un délai de 1 à 3 mois et son caractère isolé. En effet, les taux se normalisent dans
la moitié des cas au contrôle. Dans le cas contraire, on recherchera à l'interrogatoire et à
l'examen clinique une intoxication alcoolique chronique, une prise de médicament, une
surcharge pondérale, des variations pondérales brutales. On pratiquera des examens
biologiques simples (NFS, plaquettes, cholestérolémie, triglycéridémie, glycémie, TSH,
anticorps antimitochondries) et une échographie hépatique. Au terme de ce bilan on pourra
avoir une orientation étiologique.
3.1 Causes fréquentes d'augmentation des GGT.
o L’alcoolisme chronique: c'est le premier diagnostic à évoquer. L'augmentation des GGT
n'est pas correlée à la durée ou à l'importance de l'intoxication. Elle se voit même en cas
de foie histologiquement normal du fait de l’induction enzymatique par l’alcool et les
médicaments (l’activité est alors habituellement inférieure à 2 fois la normale). Elle est
cependant plus fréquente et plus importante en cas d'hépatopathie alcoolique associée
(stéatose, stéato-fibrose, hépatite alcoolique, cirrhose); cependant, dans ces cas, les autres
paramètres du bilan hépatique sont le plus souvent perturbés. Le traitement consiste à
obtenir un sevrage qui doit permettre de normaliser le taux des GGT en 2 mois. En cas de
suspicion d'hépatopathie constituée, une PBH pourra être réalisée.
o La prise médicamenteuse: l’augmentation des GGT est secondaire à une induction
enzymatique et/ou une toxicité. Les GGT sont généralement entre 2 et 4 fois la normale.
Les principaux médicaments en cause sont les anticonvulsivants (barbiturique,
phénytoïne, carbamazépine), les antidépresseurs tricycliques, les hypnotiques, la
rifampicine, le rimifon. Le traitement est l'arrêt du médicament responsable.
o Les troubles dysmétaboliques: l'obésité par l'intermédiaire d'une stéatose simple ou d'une
NASH constitue une des causes fréquents d’augmentation des GGT ainsi que les
hypercholestérolémies et hypertriglycéridémies; les variations pondérales brutales soit
dans le sens de la prise de poids, soit dans le sens de l'amaigrissement peuvent également
expliquer de telles anomalies.
3.2 Causes plus rares d'augmentation isolée des GGT
o
Les causes métaboliques et nutritionnelles: le diabète pourrait entraîner une augmentation
des GGT par l'intermédiaire d'une stéatose mais son implication est controversée selon les
études; l'hyperthyroïdie est une cause classique, mais comme nous l'avons signalé plus
haut, une hypertransaminasémie modérée peut être associée; la nutrition parentérale totale
et la dénutrition peuvent faire augmenter isolément les taux des GGT mais plus
fréquemment en association avec une augmentation des phosphatases alcalines réalisant
un vrai syndrome de cholestase.
o Les causes hépatiques non alcooliques: tumeurs hépatiques primitives ou secondaires,