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Ebook Anesthésie, analgésie et réanimation du patient âgé: Part 1

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Sommaire
Partie 1. Anesthésie
Chapitre 1 – Spécificités de la consultation d’anesthésie chez le sujet âgé
Chapitre 2 – Modifications physiologiques et pharmacologiques liées à
l’âge
Chapitre 3 – Quels agents anesthésiques choisir chez le sujet âgé et
comment les utiliser ?
Chapitre 4 – Avantages et limites de l’analgésie locorégionale chez le sujet
âgé
Chapitre 5 – Anesthésie et chirurgie ambulatoire : jusqu’à quel âge ?
Chapitre 6 – Dysfonction cognitive postopératoire du sujet âgé
Chapitre 7 – Particularité de la prévention de la maladie thromboembolique veineuse chez le sujet âgé
Partie 2. Douleur postopératoire
Chapitre 8 – Evaluation de la douleur postopératoire du sujet âgé
Chapitre 9 – Faut-il craindre les morphiniques chez le sujet âgé ?
Chapitre 10 – Existe-t-il des indications à la kétamine et à la gabapentine
en analgésie péri-opératoire en gériatrie ?
Chapitre 11 – Quels sont les véritables bénéfices et risques des AINS et
des coxibs chez le sujet âgé ?
Chapitre 12 – La réhabilitation postopératoire chez le sujet âgé
Chapitre 13 – Développement de douleurs chroniques postopératoires
chez les sujets âgés
Partie 3. Réanimation
Chapitre 14 – Morbidité et mortalité postopératoire du patient âgé
Chapitre 15 - Prise en charge cardiovasculaire péri-opératoire de l’opéré
âgé
Chapitre 16 – Complications respiratoires postopératoires chez les patients
âgés
Chapitre 17 – Particularités du sepsis postopératoire chez le sujet âgé
Chapitre 18 – Le polytraumatisé âgé


Chapitre 19 - Réanimation : spécificité du sujet âgé et aspects éthiques
Chapitre 20 - Douleur, fin de vie du patient âgé en milieu de
réanimation : quel cadre juridique ?


Chapitre 1 Spécificités de la Consultation D'anesthésie Chez le Sujet Âgé
Hélène Belœil
Pierre Albaladejo
La consultation d'anesthésie a pour objectifs d'évaluer le risque anesthésique lié
à l'intervention prévue, de proposer des stratégies pour réduire ce risque et
d'informer le patient. La consultation d'anesthésie du sujet âgé et très âgé
présente des spécificités qui touchent chacun de ces aspects. En premier lieu,
l'âge est associé à une fréquence plus élevée des comorbidités et donc du
risque d'événement clinique. Ensuite, en raison d'une altération des réserves
fonctionnelles, l'âge en soi est un facteur de risque pour toutes les
manifestations morbides postopératoires. La conséquence de cette altération
des réserves fonctionnelles est qu'un patient très âgé, sans comorbidité, a une
capacité d'adaptation réduite au stress péri-opératoire. Enfin, le lien entre
facteur de risque, morbidité et mortalité postopératoire présente des
particularités liées à l'âge. La compréhension de ce lien est primordiale pour
évaluer, prévenir et informer le patient des risques péri-opératoires.
Risque péri-opératoire
L'impact de l'âge sur la morbi-mortalité postopératoire a été étudié à partir
d'une cohorte de patients chirurgicaux âgés issue du programme NSQIP du
collège américain de chirurgie [ 1 ]. Cette cohorte comptait près de 7 000
patients chirurgicaux dont 24% étaient âgés de plus de 70 ans. Dans cette
étude, le nombre de facteurs de risque préopératoires augmente régulièrement
avec l'âge, jusqu'à atteindre un plateau vers l'âge de 70 ans. Audelà de cet
âge, le nombre de facteurs de risque (2,7 en moyenne par patient) n'augmente
plus sensiblement. L'explication avancée par les auteurs est que les patients

présentant plus de facteurs de risque sont décédés ou écartés du circuit
chirurgical. La morbidité postopératoire augmente de façon linéaire avec l'âge,
avec une progression de 0,71% par an. En particulier, la fréquence des
infections postopératoires est supérieure à 10% chez les sujets âgés de plus de 60
ans. La mortalité postopératoire augmente de façon exponentielle avec l'âge.
Le poids des facteurs de risque préopératoires augmente avec l'âge et la
morbidité conséquente est associée à une mortalité accrue chez les sujets les
plus âgés ( figure 1 ). Ainsi, une hypertension artérielle préopératoire, un
diabète ou une insuffisance rénale conduisent chez le sujet âgé à une
incidence augmentée d'infarctus du myocarde (5,1%) et de décès d'origine
cardiaque (5,7%) [ 2 ]. Des facteurs de risque péri-opératoires spécifiques aux
sujets âgés sont décrits dans la littérature. Ce sont en fait des facteurs témoins
de la dégradation fonctionnelle: ASA III et IV, chirurgie urgente, comorbidités,
faible capacité fonctionnelle (< 1-4 équivalent métabolique), mauvais état
nutritionnel, hypoalbuminémie, anémie, patient vivant seul, grabataire [ 3 ].
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Évaluation cardiovasculaire
Cette relation particulière entre facteur de risque, morbidité et mortalité est


retrouvée dans le domaine cardiovasculaire.

Figure 1. Facteurs de risque préopératoires, morbidité et mortalité en fonction
de l'âge (d'après Turrentine et al. [ 1 ]).
L'âge est associé à de nombreuses altérations structurales et fonctionnelles du
système cardiovasculaire [ 4 ]. Ces altérations sont responsables d'un seuil de
dyspnée réduit, d'une plus grande prévalence d'arythmie et de fibrillation, d'une
hypertension artérielle associée à une hypertrophie ventriculaire gauche, d'une
diminution de la tolérance à l'effort, d'une plus grande susceptibilité à
l'hypotension orthostatique et aux syncopes [ 5 ].

L'évaluation cardiovasculaire préopératoire repose sur des marqueurs cliniques,
un risque chirurgical spécifique et la capacité fonctionnelle. L'utilisation des
algorithmes d'évaluation cardiovasculaire préopératoire demande une
adaptation chez le sujet âgé.
Dans les recommandations de l'ACC/AHA sur l'évaluation cardiovasculaire
préopératoire [ 6 ], la position du facteur «âge» est ambiguë. En effet, l'âge
apparaît comme un marqueur clinique mineur. En revanche, l'âge associé aux
situations d'urgences est considéré comme un facteur de risque majeur.
Dans l'index décrit par Lee et al. [ 7 ], l'âge n'apparaît pas parmi les facteurs
de risque (chirurgie à haut risque, coronaropathie, antécédents d'insuffisance
cardiaque ou d'accident vasculaire cérébral, diabète insulinodépendant,
insuffisance rénale). Cela est expliqué, d'une part, par la sélection des patients
(> 50 ans) et, d'autre part, par le poids plus faible de l'âge face aux autres
facteurs.
Ces index et des algorithmes restent néanmoins valides pour les patients âgés.
Leur interprétation doit tenir compte de plusieurs paramètres. Contrairement


aux populations plus jeunes, la capacité fonctionnelle «physiologiquement»
altérée chez le sujet âgé est un facteur de risque sur-représenté dans ces
algorithmes. Les niveaux de risque d'événements et de mortalité sont
augmentés par rapport à une population standard. Ainsi, il paraît déraisonnable
d'exposer des patients très âgés à haut risque clinique pour des chirurgies à
risque. Une étude de la Mayo Clinic, qui décrit l'augmentation de la fréquence
et la mortalité de l'infarctus du myocarde et de l'embolie pulmonaire
postopératoire en chirurgie orthopédique majeure avec l'âge, illustre cette
spécificité du sujet âgé [ 8 ] ( figure 2 ).

Figure 2. Fréquence de l'infarctus du myocarde, de l'embolie pulmonaire et du
décès en chirurgie orthopédique majeure en fonction de l'âge (d'après Mantilla

et al. [ 8 ]).
L'âge est un facteur de risque indépendant, clairement identifié, de maladie
thromboembolique veineuse avec un odd ratio de 2,1 [ 1 , 2 , 3 , 9 , 9 ] pour
un âge supérieur à 85 ans dans une population de patients opérés pour une
arthroplastie de hanche [ 9 ]. Là encore, l'association avec un autre facteur,
comme par exemple un antécédent d'événement thrombo-embolique (odd
ratio 3,4 [ 1 , 1 , 7 , 8 ]), réduit l'importance de l'âge.
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Évaluation neuropsychiatrique
L'âge est en lui-même un facteur de risque de dysfonction cognitive
postopératoire [ 10 ]. L'altération de la vie de relation qui en découle va
marquer un déclin dans la vie du patient. Ainsi, au-delà de 80 ans, 50% des
patients anesthésiés gardent un handicap. L'exemple de la fracture du col est


parlant: seuls 25% des patients retrouveront leur niveau de vie antérieure. La
préexistence de pathologies neuropsychiatriques (syndrome dépressif
préopératoire, maladie de Parkinson, alcoolisme, traitements
anticholinergiques, troubles de l'audition ou de la vue) accroît pour un même
âge le risque d'épisodes confusionnels postopératoires et donc la morbimortalité [ 11 ]. La démence pour un même âge est associée à un risque
important de confusion postopératoire. En préopératoire, les troubles de
mémoire, de compréhension, de langage, la perte de capacité à prendre des
décisions, les risques inconsidérés pris par le patient sont autant de facteurs
participant à la surmorbidité. De nombreux facteurs favorisant la confusion vont
se surajouter en per et en postopératoire (douleur postopératoire, troubles du
sommeil, sevrage en benzodiazépines, hypoxémie, hypothermie, troubles
métaboliques, rétention urinaire…). En consultation d'anesthésie, la présence de
la famille du patient est donc souhaitable afin de l'informer (à défaut du
patient) des risques et conséquences d'une anesthésie. La prévention de la
confusion postopératoire passe par l'identification des sujets à risque et la

prévention des facteurs les plus souvent en cause: de petits gestes comme la
mise à disposition des lunettes ou des prothèses auditives dès le réveil
permettent de diminuer la fréquence et la gravité des épisodes confusionnels
chez le patient âgé. Il faut également tenir compte des interférences entre les
traitements de la démence et l'anesthésie. De façon plus générale, la
polymédication — qui est la règle chez le patient âgé — augmente le risque
d'interactions médicamenteuses. Il convient de prendre en compte le
traitement préopératoire. Par exemple, un traitement par des benzodiazépines
est un facteur de risque de dysfonctions cognitives postopératoires [ 12 ]. Les
données de la littérature concernant le retentissement neuropsychique de
l'anesthésie générale par rapport aux techniques locorégionales ne rapportent
pas de différence entre les deux techniques [ 13 , 14 ].
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Évaluation respiratoire
Il existe une diminution progressive de toutes les fonctions mesurables et
notamment de la capacité vitale. L'altération de la mécanique ventilatoire est
secondaire à des modifications des propriétés élastiques du poumon, à une
baisse de la force musculaire, à une augmentation de la rigidité de la cage
thoracique mais également à des troubles des rapports ventilation-perfusion et
de la capacité de diffusion alvéolaire. Les réponses à l'hypoxémie et à
l'hypercapnie diminuent chez le sujet âgé. Dans la période postopératoire, la
diminution de la clairance muco-ciliaire ainsi que l'altération du réflexe de toux
et de la déglutition peuvent entraîner des troubles de la ventilation. Le risque
d'apnée postopératoire est aussi augmenté. Les réflexes de protection des voies
aériennes sont moins vifs. L'effet dépresseur respiratoire des agents
anesthésiques n'en sera que majoré. L'anesthésie locorégionale n'est pas
dénuée d'effets quand le bloc moteur dépasse D10, en raison des perturbations
ventilatoires induites par la paralysie des muscles de la paroi abdominale, voire
de la diminution de la toux en cas de bloc trop élevé. Il est logique de proposer
plusieurs types d'interventions susceptibles de contrebalancer tout ou partie de

ces anomalies: prévention de l'hypoxémie (préoxygénation systématique,


oxygénothérapie postopératoire, induction ou anesthésie en ventilation
spontanée en léger procubitus), prévention de la fatigabilité respiratoire
(indications de la ventilation mécanique invasive ou non en postopératoire),
protection des voies aériennes (extubation alors que le patient est parfaitement
réveillé), prévention de l'altération de la réponse à l'hypoxémie et à
l'hypercapnie (utilisation d'anesthésiques de courte durée d'action, titration et
monitorage de la curarisation), kinésithérapie respiratoire. En fonction du type
de chirurgie — notamment thoracique ou abdominale — et de l'état clinique
du patient, une évaluation précise de la fonction respiratoire est nécessaire. On
discutera la voie d'abord chirurgicale et l'indication de séances de
kinésithérapie préopératoire.
Outre les problèmes ventilatoires, il faut anticiper les difficultés de ventilation et
d'intubation. Les critères prédictifs de ventilation difficile au masque ont
récemment été précisés par la conférence de consensus de la Société
française d'anesthésie-réanimation [ 15 ]. Parmi ceux-ci, on retrouve l'âge
supérieur à 55 ans et l'absence de dents, fréquente chez le vieillard. L'âge n'est
pas en lui-même un critère d'intubation difficile mais le risque d'intubation
difficile est multiplié par 4 chez les patients ayant eu une ventilation difficile.
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Évaluation de la fonction rénale
La détérioration de la fonction rénale secondaire à une réduction liée à l'âge
du flux sanguin rénal et de la filtration glomérulaire est un déterminant
fondamental du risque de toxicité médicamenteuse chez le sujet âgé [ 16 ].
L'excrétion rénale des médicaments est en effet étroitement liée au débit de
filtration glomérulaire. Les risques principaux sont la toxicité directe de certains
médicaments et l'accumulation de métabolites actifs excrétés par le rein
(morphine 6-glucuronide, par exemple), ce qui augmente leurs effets

secondaires. Des situations d'hypovolémie et de diminution de la perfusion
rénale, souvent présentes lors d'une anesthésie, aggravent la fonction rénale
déjà précaire des sujets âgés. Au final, la réduction de l'élimination rénale des
médicaments est le facteur pharmacologique le plus important chez le vieillard.
En consultation d'anesthésie, une diminution de la clairance de la créatinine
doit être systématiquement recherchée. La prise de médicaments altérant la
fonction rénale (par exemple, inhibiteurs de l'enzyme de conversion ou antiinflammatoires non stéroïdiens) chez un patient âgé à la fonction rénale
précaire n'est pas exceptionnelle et doit attirer l'attention. Une adaptation du
traitement peut être nécessaire. De plus, le choix des médicaments du périopératoire doit être adapté avec une vigilance particulière pour les héparines
de bas poids moléculaire (HBPM) et la morphine qui peuvent s'accumuler et
engendrer des surdosages. Rappelons que, pour les antiinflammatoires non
stéroïdiens (AINS), le respect des contre-indications mais aussi les posologies et
la durée du traitement (2 à 5 jours) doivent être impérativement respectés.
Selon les recommandations du Royal College of Anaesthetists, une clairance de
la créatinine estimée inférieure à 50 mL/min doit être une contre-indication à la
prescription d'AINS [ 17 ].


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Gestion péri-opératoire des traitements
La consultation d'anesthésie a évolué en passant d'une recherche de
comorbidité à traiter pour diminuer un risque péri-opératoire à une gestion de
traitement d'une comorbidité connue.
Plusieurs études ont mis en évidence l'importance des traitements en
préopératoire. Dans une étude de Kluger et al. [ 18 ], 44% des patients étaient
traités par au moins un médicament (70% chez les sujets de plus de 70 ans),
avec une moyenne de 2,1 médicaments par patient, principalement des
médicaments cardiovasculaires. Les auteurs ont observé que près de 50% des
patients ne prenaient pas leur traitement le jour de la chirurgie. Baillard et al.
ont noté l'importance de l'automédication par des plantes, ce qui peut induire

des effets significatifs en périopératoire [ 19 ].
Kennedy et al. [ 20 ] ont étudié le devenir postopératoire en chirurgie
générale et vasculaire d'environ un millier de patient. Cette étude montre,
évidemment, que ce sont les patients traités de façon chronique qui présentent
des complications médicales post-opératoires. Plus important, une association
entre l'interruption des traitements chroniques et la survenue de complications
post-opératoires a été mise en évidence. Ces complications postopératoires
étaient d'ordre cardiovasculaire et neuropsychiatrique. Une régression logistique
a montré qu'un des facteurs importants dans la survenue d'une complication
postopératoire était la durée de l'interruption du traitement chronique. Les
traitements les plus souvent en cause dans cette série étaient les traitements
antihypertenseurs, la L-dopa, les benzodiazépines et les antidépresseurs. La
réintroduction de ces traitements a permis de rééquilibrer les pathologies en
cause.
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Examens préopératoires
L'idée qu'une prescription d'examens complémentaires préopératoires plus
fréquente chez le sujet âgé permette de dépister plus fréquemment des
anomalies susceptibles de modifier la conduite de l'anesthésie est une idée
fausse. La prescription systématique d'examens préopératoires n'est pas fondée
car cette stratégie n'est pas performante pour détecter des anomalies
pertinentes. Cette stratégie induit une morbidité associée aux explorations
rendues nécessaires par la détection d'anomalies asymptomatiques. Dans une
étude contrôlée randomisée, 19 557 patients âgés (74 ± 8 ans) opérés de
cataracte ont été répartis en deux groupes, l'un dans lequel des examens
complémentaires étaient prescrits et l'autre sans examen préopératoire. Les
taux d'événements per et postopératoires étaient similaires dans les deux
groupes [ 21 ]. Dans une étude de cohorte concernant 544 patients âgés de 78
± 6 ans, la prévalence des anomalies détectées par les examens préopératoires
était faible (de 0,5 à 5%) pour les anomalies hydro-électrolytiques et la

thrombocytopénie, plus élevée pour l'anémie, l'insuffisance rénale et
l'hyperglycémie (10, 12 et 7% respectivement), mais aucune de ces anomalies


n'était associée à une complication postopératoire [ 22 ]. Il existe trop peu de
littérature de haut niveau de preuve pour rationaliser la prescription d'examens
préopératoires. En conséquence, les stratégies adoptées restent trop souvent
défensives [ 23 , 24 ].
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Relation médecin-patient
La relation entre le patient et le médecin en consultation d'anesthésie est
fondée sur la nécessité de communiquer au patient les informations nécessaires
à la compréhension du processus d'anesthésie et de ses risques [ 25 ]. La fin des
années 1990 a été marquée par l'obligation pour le médecin d'apporter la
preuve qu'une information était donnée au patient, en particulier pour les
complications des actes et des procédures. La relation entre le patient et le
médecin devait évoluer vers plus de transparence, moins de paternalisme,
davantage de respect de l'autonomie. Cette nouvelle situation a été
clairement formalisée dans la loi du 4 mars 2002, dite loi Kouchner, intitulée
«Démocratie sanitaire». La consultation d'anesthésie a été fondée sur la
nécessité de réduire l'anxiété préopératoire [ 26 ]. Or, il apparaît que, face à un
événement potentiellement menaçant, les relations entre information et anxiété
sont complexes [ 27 , 28 ]. Si ces relations sont peu étudiées dans le domaine
de l'anesthésie [ 29 ], elles le sont encore moins chez le sujet âgé. Dans une
cohorte de 1300 patients [P. Albaladejo-P. Catoire, données non publiées]
interrogés en consultation d'anesthésie sur leur désir d'information concernant
divers aspects de la prise en charge péri-opératoire, les patients les plus âgés
semblent plus réticents à obtenir des informations sur la douleur ou les
complications ( figure 3 ). Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce résultat: la
plus grande importance d'antécédents chirurgicaux chez ces patients, la

relation plus volontiers de type paternaliste avec le médecin, le fatalisme face
aux possibles complications, la plus grande fréquence de gestes invasifs
impératifs.


Figure 3. Désirs d'information des patients en fonction de l'âge (d'après
Albaladejo et Catoire, données non publiées).
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Stratégies
Choix de l'anesthésie
Il n'existe pas, dans la littérature, d'argument formel pour favoriser l'anesthésie
locorégionale par rapport à l'anesthésie générale. Malgré les critiques émises à
la suite de la publication de la méta-analyse de Rodgers et al. en 2000 [ 30 ],
cette étude a mis en évidence un bénéfice des blocs neuraxiaux (anesthésie
péridurale ou spinale) par rapport à l'anesthésie générale en termes de
morbidité et de mortalité. L'auteur retrouvait une diminution significative de la
mortalité (30%) dans le groupe des blocs neuraxiaux ainsi qu'une diminution des
incidences des thromboses veineuses profondes, des embolies pulmonaires, des
transfusions, des pneumonies, des dépressions respiratoires, des infarctus du
myocarde et des défaillances rénales postopératoires. En pratique, les deux
types d'anesthésie se valent quand elles sont correctement réalisées. Pour des
raisons de confort, l'anesthésie générale peut être préférée à l'anesthésie
rachidienne quand la durée prévisible du geste chirurgical est anormalement
longue, surtout quand la position imposée par le chirurgien n'est pas
physiologique. De même, il n'y a ni plus ni moins d'épisodes confusionnels
postopératoires avec une technique ou une autre. Les fonctions intellectuelles
évoluent également de façon identique après anesthésie rachidienne et
anesthésie générale. Quand il s'agit de comparer anesthésie générale et
anesthésie locorégionale non rachidienne ou anesthésie locale, la littérature est
très pauvre. L'absence ou la quasi-absence, dans les conditions normales

d'utilisation et de sécurité, d'effets systémiques de l'anesthésie plexique,


tronculaire ou locale est probablement un avantage considérable chez le
grand vieillard. Ainsi, l'anesthésie locorégionale ou topique en ophtalmologie a
probablement permis à des patients très âgés de bénéficier de techniques
chirurgicales jusque-là réservées à des patients plus jeunes.
L'anesthésie ambulatoire est-elle possible chez le grand vieillard?
La multiplication des pathologies et des handicaps acquis lors d'une
hospitalisation suggère que la chirurgie ambulatoire est plutôt souhaitable chez
le grand vieillard. Néanmoins, les critères de sélection doivent être très stricts.
L'existence d'un entourage familial fiable et l'absence de gêne aux
mouvements de la vie habituelle à la sortie de l'hôpital (pansements ou attelles
gênant la mobilité, la préhension, la vision ou l'audition) sont des conditions
importantes de sécurité.
Choix de l'analgésie
Sénescence et perception de la douleur
Les variations des seuils de perception et de tolérance à la douleur avec l'âge
restent controversées dans la littérature [ 31 , 32 ]. Indépendamment de savoir
si les personnes âgées souffrent plus ou non, l'évaluation et le traitement de la
douleur sont fondamentaux. En effet, les personnes âgées sont plus vulnérables
aux conséquences négatives de la douleur qui est souvent sous-traitée chez eux
[ 33 ]. L'évaluation de la douleur postopératoire est difficile chez le sujet âgé du
fait d'altération fréquente des fonctions sensitives (acuité visuelle et auditive) et
supérieures (fonctions cognitives). Les patients âgés considèrent souvent la
douleur comme un élément inévitable du vieillissement. L'intérêt des échelles
comportementales d'hétéro-évaluation dans ce contexte a récemment été
montré [ 34 ].
Choix d'une stratégie analgésique
La prescription des antalgiques classiquement utilisés en postopératoire doit être

prudente et répondre à certaines règles chez le patient âgé. Un certain nombre
de facteurs concourent aux modifications de la pharmacologie de la morphine
chez le patient âgé:









le volume de distribution et la clairance de la morphine sont réduits de
moitié chez le sujet âgé. Les concentrations plasmatiques de morphine
après une administration par voie veineuse sont 1,5 fois plus élevées que
chez le sujet jeune [ 35 ] et la durée d'action est prolongée;
l'altération de la fonction rénale entraîne l'accumulation de la morphine
6-glucuronide, métabolite 8 à 40 fois plus actif que la morphine selon la
voie d'administration. Ce métabolite induit une analgésie et surtout une
sédation parfois marquées;
les morphiniques provoquent une réduction dose-dépendante de la
réponse des centres respiratoires bulbaires aux stimuli hypoxémiques et
hypercapniques et cela est particulièrement marqué chez les sujets âgés.
L'incidence de la dépression respiratoire est augmentée [ 36 ];
les opiacés favoriseraient également les syndromes confusionnels;
enfin, les patients âgés ont une augmentation de la sensibilité cérébrale


aux effets des opiacés.
Tous ces facteurs justifient une adaptation posologique. Les principes généraux

sur lesquels les auteurs s'accordent sont les suivants:










titration prudente de la morphine adaptée à l'âge, réinjections prudentes
adaptées à l'effet analgésique recherché et aux effets secondaires;
diminution de 40 à 50% des doses de morphine sous-cutanée et
adaptation à la demande de l'intervalle entre deux doses;
surveillance et traitement précoce des effets secondaires: dépression
respiratoire, sédation, nausées/vomissements, constipation, rétention
urinaire, confusion;
vigilance sur les associations de médicaments sédatifs et/ou dépresseurs
respiratoires;
oxygénation des patients en postopératoire;
en dehors des limites de compréhension, il n'y a pas de contre-indications
au mode PCA(Patient Controlled Analgesia) en adaptant les doses;
la voie intrathécale est possible en se limitant à 100 µg de morphine.
Cette dose offrirait le meilleur équilibre entre les effets analgésiques et
l'incidence des effets secondaires chez les patients âgés après chirurgie
de la hanche;
l'analgésie péridurale est une avancée importante dans le traitement de
la douleur postopératoire. Elle améliore la prise en charge de la douleur
postopératoire et le devenir général des patients âgés après chirurgie

abdominale comparée à la PCA [ 37 ]. Les effets secondaires à type
d'hypotension, dont les conséquences peuvent être importantes chez le
sujet âgé, sont cependant fréquents. Il convient de mettre en balance le
rapport bénéfice/risque lors de la réalisation d'une péridurale chez le sujet
âgé. Les doses maximales recommandées sont de 2 à 3 mg de morphine.

Dans le cas particulier de la titration de morphine en salle de surveillance postinterventionnelle (SSPI) chez le patient âgé, le débat sur la sécurité reste
d'actualité. Aubrun et al. [ 38 ] ont montré que la dose de morphine lors de la
titration chez le patient âgé n'est pas modifiée par rapport aux sujets jeunes. En
d'autres termes, une titration de morphine peut être administrée sans risque en
appliquant le protocole utilisé chez les sujets jeunes (3 mg toutes les 5 minutes, 2
mg si le poids est inférieur à 60 kg). Ces résultats contradictoires avec ceux des
études précédentes ne concernent que le postopératoire immédiat et ne
doivent pas être appliqués au long cours. De l'avis même de l'auteur, ces
résultats ne pourraient s'appliquer à la population très âgée la plus fragile et aux
patients souffrant de dysfonction cognitive sévère [ 31 ].
L'intérêt des AINS dans le traitement de la douleur postopératoire est connu
depuis longtemps [ 39 ]. L'association AINS-morphine en postopératoire permet
une épargne morphinique et une réduction des effets secondaires liés aux
morphiniques [ 40 ]. La difficulté dans la prescription des AINS vient de leurs
effets indésirables quelquefois graves. La demi-vie des AINS utilisés pour
l'analgésie postopératoire est brève (4 à 5 heures pour le kétorolac). Les AINS de
demi-vie plus longue n'ont pas leur place en postopératoire, notamment chez le
sujet âgé en raison du risque encore majoré de rétention hydrosodée,


d'insuffisance rénale, d'irritation gastroduodénale (ulcère, gastrite) et
d'allongement du temps de saignement. Les contreindications mais aussi les
posologies et la durée du traitement (2 à 5 jours) doivent être impérativement
respectées. La demi-vie d'élimination et la clairance des AINS sont diminuées

chez les patients âgés. Il convient donc d'être prudent en diminuant les doses
de 25 à 50% et en augmentant l'intervalle entre deux doses. Ces précautions
prises, il faut savoir que le risque rénal reste le problème majeur de la
prescription des AINS chez le sujet âgé. Le risque rénal lié aux AINS chez ces
patients dont la fonction rénale est déjà précaire est augmenté dans des
situations d'hypovolémie et de diminution de la perfusion rénale, souvent
présentes lors d'une anesthésie. La déshydratation fréquente chez ces patients
et un traitement par inhibiteur de l'enzyme de conversion sont d'autres facteurs
favorisant la dégradation de la fonction rénale.
Le métabolisme des autres antalgiques (paracétamol, néfopam) n'est pas
modifié avec l'âge. Ces agents non dépresseurs respiratoires peuvent être
facilement utilisés chez les sujets âgés et permettent de réduire la
consommation de morphine. Le tramadol est un opiacé central
monoaminergique. Le principal métabolite du tramadol étant plus actif sur les
récepteurs opiacés que le médicament mère, il convient de doubler l'intervalle
entre deux prises [ 41 ].
Au vu de ces limitations à la prescription d'antalgiques classiques en
postopératoire chez le patient âgé, l'analgésie locorégionale par bloc nerveux
périphérique est une excellente alternative. Réalisé dans des conditions
normales, un bloc nerveux en injection unique ou la mise en place d'un
cathéter péri-nerveux ne présente pas ou que peu de risques et d'effets
secondaires [ 42 ]. L'analgésie locorégionale périphérique est, chez le patient
âgé, la technique analgésique de choix lorsqu'elle est possible. Il faut
cependant noter que la durée d'un bloc périphérique est prolongée alors que
son délai d'installation est comparable à celui des sujets jeunes [ 43 ].
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Conclusion
Les patients âgés présentent des caractéristiques spécifiques en termes de
risque et d'évaluation préopératoire. En termes de risque, la principale
caractéristique est la faible réserve d'organe. Cette caractéristique explique,

pour un risque donné, une plus grande incidence de morbidité postopératoire
et, pour une complication postopératoire, une plus grande mortalité. La
dysfonction cognitive postopératoire illustre cette sensibilité d'organe, c'est-àdire la susceptibilité accrue du cerveau âgé aux conséquences de l'anesthésie
et de la chirurgie. Par ailleurs, la limitation des capacités métaboliques des
patients âgés et très âgés modifie de façon significative la pharmacocinétique
et la pharmacodynamique des médicaments utilisés en anesthésie et en
postopératoire. En pratique, il est raisonnable, pour une indication pertinente
d'un geste invasif, de réaliser des procédures d'évaluation spécifiques et de
mettre en place une stratégie péri-opératoire spécifique pour ces sujets fragiles.
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Chapitre 2 Modifications Physiologiques et Pharmacologiques Liées à L'âge
Jacques Boddaert
Le vieillissement de l'organisme traduit en pratique clinique l'absence de réserve
fonctionnelle: face à une situation donnée, le sujet âgé n'a plus les capacités
de tolérer «longtemps» un événement aigu (hypoxie, anémie, etc.). Or, cette
notion de «temps», témoin de la vulnérabilité liée à l'âge, est quasiment
impossible à appréhender au lit du malade. Il faut donc agir vite pour ne pas
laisser se pérenniser une situation dont les conséquences, une fois démasquées,
peuvent être dramatiques et trop souvent liées à une surestimation de la
tolérance, inadaptée vis-à-vis du patient âgé. Gardons à l'esprit cet adage qui
veut que «l'on ne meurt jamais d'être trop vieux, mais toujours de maladie»:
l'expression «c'est normal vu son âge» doit être remplacée par la recherche d'un
facteur déclenchant potentiellement curable, nettement plus rentable pour le
patient [ 1 ].

Le vieillissement représente une vulnérabilité physiologique. Néanmoins, le poids
de l'âge n'est que peu de choses en regard des nombreuses pathologies
cumulées chez le patient âgé; le véritable défi dans la prise en charge du
patient âgé est de réussir en toutes circonstances (consultation d'anesthésie,
urgence…) à «mettre à plat» la dimension médicale (pour laquelle on discute
des traitements), l'autonomie (saura-t-il gérer ce traitement?) et, parfois, l'aspect
social (qui donnera alors les traitements?) du patient âgé. Ainsi, il faut considérer
la pathologie aiguë menaçante (anémie liée à l'hématome sur fracture du col),
la pathologie chronique qui ne demande qu'à parler (cardiopathie ischémique
peu symptomatique), la pathologie chronique quiescente (détérioration
cognitive qui gênera la rééducation, la prise et l'observance des traitements)
sans oublier le cumul d'autant de traitements… La consultation d'anesthésie
représente une autre rare occasion de faire le tri parmi les traitements
potentiellement dangereux (anti-inflammatoires non stéroïdiens — AINS), les
antagonistes (anti-cholinéstérasiques/anti-cholinergiques), les traitements
redondants (cumul de dérivés nitrés) ou encore les traitements inutiles, sans
parler des associations délétères (antivitamines K — AVK — et aspirine, AVK et
antifongiques, etc.).
Vieillissement d'organes: modifications physiologiques
Système nerveux autonome
Mécanismes
Le vieillissement a des conséquences sur le système nerveux autonome (SNA) et
la paroi artérielle, capteur des signaux de déclenchement et principal effecteur
de la réponse hémodynamique à l'orthostatisme. Dans l'ordre de leur mise en
jeu, on note, avec l'âge, une diminution de la sensibilité des barorécepteurs,
une modification du contrôle baroréflexe sur le système sympathique — qui
s'accompagne d'une augmentation de l'activité basale sympathique —, une
réduction de l'activité cardiaque vagale et une corrélation inverse entre le
vieillissement et le contrôle sino-aortique de la fréquence cardiaque,
témoignant du déclin du contrôle baroréflexe artériel [ 2 ]. Par ailleurs, on note



une diminution de la sensibilité des récepteurs β-adrénergiques vasculaires, de
la réponse vasomotrice des vaisseaux à la noradrenaline [ 3 ] et de la
vasoconstriction efficace. De plus, il a été rapporté une défaillance de
l'autorégulation du débit cérébral à l'orthostatisme.
Conséquences cliniques
L'hypotension orthostatique (HO) est l'une des complications les plus fréquentes
impliquant le vieillissement du SNA, même si sa cause répond à de très
nombreuses pathologies au premier rang desquelles la pathologie iatrogène. Sa
fréquence varie selon de très nombreux facteurs, jusqu'à atteindre 68% en
gériatrie aiguë [ 4 ], augmentant avec l'âge, l'autonomie, les pathologies
associées. L'HO est un événement grave; elle est associée à un risque élevé de
chute, en particulier chez les sujets âgés fragiles institutionnalisés, et représente
un facteur prédictif indépendant de mortalité chez le sujet âgé [ 5 ] et un risque
élevé de développer une maladie cérébrovasculaire.
Paroi artérielle
Mécanismes
L'âge est considéré comme le principal déterminant de la rigidité artérielle (RA)
[ 6 ], également liée à des facteurs génétiques (angiotensine II, endothéline,
collagène, élastine, métalloprotéases, nitric oxid synthase). Les mécanismes
impliqués comprennent une dégradation de la matrice extracellulaire (élastine,
collagène) ainsi que la glycation non enzymatique des protéines qui crée des
liaisons covalentes stables entre les protéines. Par ailleurs, le vieillissement est
associé à une dysfonction endothéliale, avec altération de la relaxation NOdépendante, diminution de la production de prostacycline PGI2, augmentation
de l'expression des molécules d'adhésion et de l'adhérence des monocytes à la
surface de l'endothélium.
Conséquences cliniques
La RA augmente la post-charge et participe largement au développement de
l'hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) et de la dysfonction ventriculaire

gauche [ 7 ]. Évaluée par la pression pulsée, la RA est indépendamment
associée au risque d'insuffisance cardiaque, augmente également le besoin en
oxygène et altère la relaxation myocardique. La pression pulsée représente un
facteur de risque indépendant du risque cardiovasculaire, de l'insuffisance
coronaire et de l'insuffisance cardiaque. La RA évaluée par la mesure de la
vélocité de l'onde de pouls aortique est le plus puissant facteur prédictif de
mortalité cardiovasculaire chez les sujets âgés, associée à la mortalité totale et
cardiovasculaire, au risque de cardiopathie ischémique et d'accident
vasculaire cérébral [ 8 ].
Vieillissement cardiaque
Mécanismes
Le vieillissement du cœur permet un fonctionnement normal dans des
conditions de repos. L'âge s'accompagne d'une moindre efficacité du


remplissage ventriculaire. En réponse à l'augmentation de la rigidité des gros
troncs artériels, le myocarde s'hypertrophie [ 9 ]; les modifications des
myofibrilles et du métabolisme calcique intracellulaire cardiaque prolongent la
systole ventriculaire; enfin, les modifications de la matrice extracellulaire altèrent
les propriétés contractiles intrinsèques du myocarde [ 10 ]. L'ensemble de ces
éléments explique 50% du déclin du remplissage diastolique. Pour compenser
ce défaut de remplissage «passif», la contribution active auriculaire (systole)
augmente, passant de 20% à 30 ans à 40% à 80 ans [ 11 ]. Par ailleurs,
l'accélération de la fréquence cardiaque à l'effort diminue avec l'âge, avec
une réduction de l'ordre de 30 à 50% [ 12 ].
Conséquences cliniques
Avec le vieillissement, les troubles de la relaxation myocardique expliquent une
des particularités de l'insuffisance cardiaque du sujet âgé, dite à fonction
systolique normale, qui représente près de 50% des insuffisances cardiaques audelà de 80 ans [ 13 ]. Si le patient n'est jamais symptomatique du simple fait de
l'âge, ces modifications peuvent favoriser une insuffisance cardiaque brutale,

massive, à l'occasion de nombreux événements intercurrents. C'est le cas du
passage en fibrillation atriale, dont la fréquence augmente dramatiquement
avec l'âge, responsable de la perte de la systole auriculaire devenue
indispensable au remplissage ventriculaire.
Vieillissement cognitif
Mécanisme
Le vieillissement cérébral s'accompagne d'une diminution du nombre de
neurones corticaux, d'une déplétion en neurotransmetteurs au premier rang
desquels l'acétylcholine [ 14 ]. Le vieillissement cognitif se traduit
essentiellement par une diminution des temps de réaction, par des
modifications de la mémoire de travail, de la mémoire épisodique, et par des
troubles attentionnels.
Conséquences
Le vieillissement cognitif n'a aucune conséquence sur l'autonomie du sujet âgé.
Et le dogme qui veut qu'avoir des troubles mnésiques fasse partie du
vieillissement a fait long feu. Tolérer des troubles de l'attention est acceptable.
Mettre sur le compte de l'âge une plainte mnésique, éventuellement associée à
une atteinte des autres fonctions (jugement, raisonnement, langage, etc.), est
une des erreurs parmi les plus fréquentes, source de retard diagnostique de
pathologies neurodégénératives. Mettre sur le compte de l'âge une perte
d'autonomie, même discrète, liée à des troubles cognitifs est une mauvaise
pratique. Rappelons la prévalence d'environ 20% de syndrome démentiel chez
les patients de plus de 75 ans [ 15 ].
Vieillissement de la fonction rénale
Mécanisme
Le vieillissement s'accompagne d'une réduction néphronique, d'une diminution


du taux de filtration glomérulaire [ 16 ] et d'une dégradation de la fonction
tubulaire. Cependant, le déclin de la fonction rénale avec l'âge, de l'ordre de

0,75 ml/min/an, n'est pas une constante du vieillissement dans la mesure où 30%
des sujets ne sont pas concernés [ 17 ].
Conséquences
En pratique clinique, une diminution de la clairance de la créatinine jusqu'à 60
ml/min peut n'être que le fait de l'âge. Souvent, cette réduction de la filtration
glomérulaire ne requiert pas de précaution lors de l'introduction d'un traitement.
Par contre, elle est un témoin de l'absence de réserve fonctionnelle rénale du
sujet âgé, qui l'expose à une dégradation importante de la fonction rénale lors
d'événements intercurrents (déshydratation, infection, etc.) et à la
néphrotoxicité de certains traitements ou produits de contraste.
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Données pharmacologiques
Le patient âgé paye un lourd tribu à la pathologie iatrogène, qui représente
une des principales causes de mortalité [ 18 ], responsable de 10 à 20% des
hospitalisations des patients de plus de 75 ans. Différents facteurs peuvent être
incriminés, parmi lesquels les modifications pharmacodynamiques et/ou
pharmacocinétiques avec l'âge. Mais les éléments déterminants du risque
iatrogène dans la population âgée sont surtout représentés par la
polymédication découlant directement de la polypathologie. De nombreux
facteurs intercurrents sont fréquemment observés: l'absence de réévaluation
des traitements préexistants, le nombre de thérapeutes et le manque de
coordination entre eux, les problèmes d'observance générés par les déficits
neurologiques et/ou cognitifs ou sensoriels, sans parler de l'automédication, la
nonobservance ou encore le tri du patient dans les traitements pour ne
sélectionner que ceux qu'il juge utiles pour lui. Autant de points qui ne seront
pas abordés dans ce chapitre mais qu'il faut avoir à l'esprit.
Pharmacocinétique
Biodisponibilité
La biodisponibilité des médicaments administrés par voie orale est la proportion
du médicament ingéré qui va atteindre la circulation systémique. Le

vieillissement a peu de conséquences sur l'absorption, même s'il s'accompagne
d'une réduction de la sécrétion acide, du débit sanguin splanchnique et de la
surface muqueuse capable d'absorption [ 19 ]. À l'opposé, des pansements
gastriques peuvent beaucoup plus efficacement interférer avec l'absorption de
certains médicaments. L'impact de l'âge sur l'activité du cytochrome P450
intestinal n'est pas connu; une étude utilisant un inhibiteur de l'expression du
cytochrome P450 a suggéré que ce mécanisme de régulation restait actif chez
le sujet âgé [ 20 ]. L'effet de premier passage hépatique, qui aboutit à la
formation de métabolites inactifs ou au contraire transforme une pro-drogue en
molécule active, est modifié avec l'âge; des drogues telles que le propranolol [
21 ], le labétolol [ 22 ], le vérapamil [ 23 ], la lidocaïne [ 24 ] voient leur


biodisponibilité augmentée par une réduction de l'effet de premier passage
hépatique (extraction) après administration intraveineuse. Ces modifications,
liées à certaines molécules seulement, incitent à débuter un traitement par la
plus petite dose efficace. Cette règle prudente d'initiation de prescription est
justifiée chez le sujet âgé, surtout du fait de l'absence de données
pharmacologiques. Elle doit cependant éviter l'écueil d'une posologie
insuffisante, en essayant constamment d'atteindre la dose efficace.
Transport et distribution
Le volume de distribution des médicaments change avec le vieillissement,
associant une diminution de la masse maigre, une augmentation de la masse
grasse [ 25 ] et une diminution de l'eau totale [ 26 ]. Ainsi, les médicaments
liposolubles, comme les bêtabloquants, augmentent leur volume de distribution
donc le risque de sous-dosage tandis que les médicaments hydrosolubles,
comme la digoxine, voient leur risque de surdosage augmenter. L'âge influence
également les protéines de transport des médicaments. Les taux d'albumine
diminuent avec l'âge, mais avec des variations peu significatives, tandis que les
taux d'alpha 1 glycoprotéine acide augmentent [ 27 ]. Ainsi, la fraction libre des

AVK ou de la phénytoïne augmente, ce qui accroît leur effet thérapeutique. À
l'opposé, des traitements comme l'imipramine ou le propranolol, se liant à
l'acide alpha 1 glycoprotéine, auront une fraction libre et donc un effet
thérapeutique diminués. Les taux d'albumine doivent être particulièrement
considérés chez les patients âgés polypathologiques dénutris.
Métabolisme
Le vieillissement s'accompagne d'une diminution du débit sanguin et de la
masse hépatique, responsable de la diminution de la capacité métabolique
hépatique. Sur le plan métabolique, parmi le peu de données disponibles,
l'activité du cytochrome P450 in vitro ne semble pas changer avec l'âge, tout
comme le contenu hépatique en protéines microsomales et en cytochrome
P450. Cependant, dans une étude comparant des sujets de moins de 30 ans à
des sujets de plus de 70 ans [ 28 ], la diminution de la clairance de l'antipyrine
(de 30%), métabolisée par le cytochrome P450, témoigne d'une modification du
métabolisme hépatique avec l'âge. Dans la mesure où le métabolisme diminue,
sans dysfonction enzymatique clairement authentifiée, le rôle de modification
de la fonction endothéliale sinusoïdale interférant avec le métabolisme de
l'oxygène a été suggéré [ 29 ].
L'ensemble de ces données sur le métabolisme doit être revu à la lumière des
données typiquement gériatriques. En effet, la fragilité des patients, vaste
concept allant de la précarité physiologique au retentissement sur les actes de
la vie quotidienne, semble avoir plus d'impact sur le métabolisme des
médicaments que l'âge lui-même. En ce sens, l'activité de certaines estérases
est sensible à la condition des patients. Ainsi, l'activité aspirine-estérase
(déterminée par la détermination du taux de salicylate dans le plasma) est
diminuée chez les patients fragiles, sans effet de l'âge [ 30 ]; la clairance de
l'acétaminophène est sensible à l'effet de l'âge mais surtout à la fragilité des
patients âgés [ 31 ], comme la clairance du métoclopramide [ 32 ]. Des
données identiques ont été rapportées sur l'activité aspirine-estérase en cas de



pathologie aiguë comme une chirurgie de hanche [ 33 ]. Encore une fois, le
poids de l'âge s'efface derrière celui des comorbidités associées.
Demi-vie des médicaments
Dans la mesure où le volume de distribution et l'élimination rénale se modifient
avec le vieillissement, la demi-vie des médicaments peut être allongée,
responsable d'un décalage de l'effet du médicament et d'un risque accru
d'effets secondaires.
Élimination des médicaments
En raison de la réduction de la masse musculaire observée avec le
vieillissement, de la réduction néphronique déjà mentionnée et de la fréquence
des pathologies rénales chez le sujet âgé, la créatininémie est un témoin moins
fiable de la fonction rénale. Le calcul de la clairance de la créatinine doit lui
être préféré, évaluée par la formule de Cockroft, même si cette formule tend à
sous-estimer la fonction rénale [ 34 ].
Formule de Cockroft:

Ainsi, une créatininémie qui peut paraître normale à 95 µmol/l chez une
patiente de 90 ans pesant 45 kg témoigne déjà, selon la formule de Cockcroft,
d'une insuffisance rénale avec une clairance de la créatinine à 24 ml/min. Or, la
réduction de l'élimination des médicaments est l'une des principales causes
d'accumulation et d'effets secondaires. En étudiant des patients âgés avec un
taux de filtration glomérulaire normal (104 ± 12 ml/min par clairance de l'inuline),
Fliser et al. ont montré peu d'effets de l'âge sur la clairance de différents
traitements (hydrochlorothiazide, aténolol, triamtérène, piracétam) et ont
conclu à de faibles conséquences en pratique clinique [ 34 ].
Pharmacodynamique
La pharmacodynamie étudie le médicament dans l'organisme. Il tient donc
compte du vieillissement d'organe et des modifications pharmacocinétiques
des médicaments. Certaines données suggèrent que la sensibilité de certains

organes est augmentée avec l'âge. La sensibilité aux psychotropes varie chez le
sujet âgé. La sensibilité aux benzodiazépines semble différente chez les sujets
âgés mais variable selon les benzodiazépines étudiées. En étudiant le
midazolam intraveineux, une étude a rapporté, par rapport aux sujets jeunes,
des doses moins importantes nécessaires à la sédation des patients âgés
quantifiée par électroencéphalogramme. Cette différence était indépendante
des données pharmacocinétiques (clairance) mais elle était liée à une plus
grande sensibilité du système nerveux central au midazolam [ 35 ]. De même,
les sujets âgés sont plus sensibles aux effets anticholinergiques des
neuroleptiques et des antidépresseurs tricycliques [ 36 ].
La réponse aux agonistes β adrénergiques et aux bêtabloquants est différente
chez le sujet âgé, avec une diminution de l'inotropisme et du chronotropisme [
22 ]. Les patients âgés sont moins sensibles aux effets chronotropes de


l'isoprénaline [ 37 ]. Les données initiales rapportant une raréfaction des
récepteurs cardiaques β adrénergiques n'ont pas été confirmées mais un
défaut de transduction de la protéine G de couplage a été rapporté [ 38 ].
La sensibilité des patients âgés aux anticoagulants est plus élevée [ 39 ], avec
un risque accru d'accidents hémorragiques. L'utilisation d'abaques, en débutant
un traitement à faibles doses, permet d'ajuster la dose efficace chez les patients
âgés [ 40 ].
Le risque d'ulcère gastroduodénal sous AINS augmente avec l'âge [ 41 ]. Il suffit
de traiter 50 patients de plus de 70 ans pour favoriser la survenue d'une
hémorragie digestive [ 41 ]. De même, le risque de dégradation de la fonction
rénale double sous AINS chez les patients âgés [ 42 ].
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Conclusion
L'âge représente une vulnérabilité du patient, difficile à appréhender, et modifie
les données pharmacocinétiques et pharmacodynamiques. Cependant, les

pathologies associées, souvent cumulées, ont les conséquences les plus lourdes
en pratique clinique. Si aucun médicament n'est proscrit chez le sujet âgé sur le
simple fait de l'âge, certaines classes médicamenteuses doivent être évitées
dans la mesure du possible lorsqu'il existe une alternative satisfaisante. Surtout, il
faut garder à l'esprit que, le plus souvent, nous ne disposons pas de données
spécifiques chez le sujet âgé, a fortiori polypathologique. Il faut ainsi savoir initier
un médicament prudemment mais aller jusqu'à la dose efficace, pour éviter les
deux écueils de la prescription gériatrique: l'accumulation du médicament par
manque de précaution ou le sous-dosage par excès de prudence.
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