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Vers une approche interculturelle dans l’enseignement du FLE à travers la méthode TOUT VA BIEN

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RÉSUMÉ DU MÉMOIRE
Notre mémoire porte sur « Vers une approche interculturelle dans l’enseignement
du FLE à travers la méthode TOUT VA BIEN ». Il se compose de 3 chapitres. Dans le
premier chapitre, nous présentons le cadre théorique avec les notions de culture,
d’interculturel, les principes méthodologiques de l’enseignement de la culture en FLE, la
problématique de l’interculturel, les compétences attendues selon le CECR La deuxième
partie est consacrée à analyser le résultat de l’enquête sur la situation d’apprentissage et
d’enseignement de la culture au Département de Langue et de Civilisation Françaises.
Nous envisageons, dans la dernière partie de notre travail, de donner quelques propositions
pédagogiques avec les activités d’éveil dans la classe de langue, les propositions pour une
approche interculturelle dans l’enseignement du FLE pour les étudiants de 1
re
et 2
è
années.

2
TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION
1. Raison du choix du sujet de recherche 4
2. Pertinence de recherche 5
3. Objectifs de recherche 5
4. Questions et hypothèses de recherche 5
5. Méthodologie de recherche 7
6. Limite de recherche 7
7. Composition du mémoire 7
CONTENU
Chapitre I : Cadre théorique 9


1.1. Langue et culture dans l'enseignement/apprentissage des langues étrangères 9
1.1.1. La notion de culture 9
1.1.2. Les deux cultures 10
1.2. Principes méthodologiques de l'enseignement de la culture en FLE 11
1.2.1. Le sentiment d'étonnement et de curiosité devant l'Autre 11
1.2.2. Le phénomère d'acculturation 12
1.2.3. L'ethnocentrisme 12
1.2.4. Le relativisme culturel 13
1.2.5. La notion de "lecture des cultures" 13
1.3. Problématique de l'interculturel 15
1.3.1. La compétence communicative : une compétence interculturelle 17
1.3.2. Former les enseignants de FLE à l'interculturel 18
1.3.3 Former les apprenants de FLE à l'interculturel 19
1.4. Les compétences attendues 21
1.4.1. Savoir 22
1.4.2. Savoir-faire 23
1.4.3. Savoir-être 24
1.4.4. Savoir-apprendre 26
1.5. Les aspects culturels et sociaux français et vietnamiens 27
1.5.1. Les aspects culturels et sociaux français 27

3
1.5.1.1. La distance individuelle (la proxémie) 27
1.5.1.2. Les postures 28
1.5.1.3. Les gestes 29
1.5.1.4. Le visage et les mimiques 31
1.5.1.5. Le regard 32
1.5.2. Les aspects culturels et sociaux vietnamiens 32
1.5.2.1. La notion de "face" 33
1.5.2.2. Le hochement de tête 33

1.5.2.3. Les salutations 34
Chapitre II : Analyse des contenus culturels dans la méthode TOUT VA BIEN 35
2.1. Présentation générale 35
2.1.1. Quelques remarques sur la méthode 35
2.1.2. Méthode TOUT VA BIEN 1 et TOUT VA BIEN 2 36
2.1.2.1. Structure des deux volumes TOUT VA BIEN 37
2.1.2.2. Objectifs et contenus 37
2.1.2.3. Les contenus culturels dans TOUT VA BIEN 39
2.2. Analyse des principes méthodologiques de l'enseignement de la culture à partir des
documents présentés dans la méthode TOUT VA BIEN 1 et TOUT VA BIEN 2 41
2.2.1. Le sentiment d'étonnement et de curiosité devant l'Autre 41
2.2.2. Le phénomène d'acculturation 46
2.2.3. L'ethnocentrisme 48
2.2.4. Le relativisme culturel 50
2.2.5. La notion de "lecture des cultures" 52
2.3. Enquête 54
2.3.1. Déroulement de l'enquête 54
2.3.2. Analyse et interprétation des résultats de l'enquête 54
2.3.2.1. Les sujets-étudiants 54
2.3.2.2. Les sujets-enseignants 56
Chapitre III : Propositions pédagogiques 59
3.1. Les activités d'éveil dans la classe de langue 59
3.1.1. Identifier les stéréotypes 59
3.1.2. Fournir les indicateurs de lecture 63

4
3.1.3. Apprendre à observer dans le pays de la langue cible 64
3.2. Exploitation des documents culturels 65
3.3. Propositions pour une approche interculturelle dans l'enseignement du FLE pour
les étudiants de 1

re
et 2
è
années 71
3.3.1. Détermination de contenus culturels à enseigner 72
3.3.2. Choix de documents 73
3.3.3. Propositions de quelques démarches pédagogiques pour un enseignement efficace
de la culture en classe de FLE 74
3.3.4. Formation des enseignants de FLE en matière de l'enseignement de l'interculturel 76
CONCLUSION 80
BIBLIOGRAPHIE 81
ANNEXES

5
INTRODUCTION

1. Raison du choix du sujet de recherche
À l’heure actuelle, la mondialisation des marchés économiques et le flux croissant
de la population qu’elle engendre amènent de plus en plus les individus à communiquer, à
rencontrer, échanger, vivre et travailler avec des interlocuteurs issus de contextes
linguisitques et socioculturels extrêmement variés. C’est pour cette raison que se former à
ces rencontres, à ces échanges, à ces coopérations, à ces conflits est une tâche qui concerne
tout individu vivant dans le monde entier.
Pourquoi cela ? L’explication est simple. Premièrement, nous savons bien que,
dans une conversation, la bonne maîtrise des formes linguistiques ne suffit pas à la
communication. Louis Porcher (L'enseignement des langues étrangères - Hachette 2004 :
118) a dit : "Quand on apprend une langue étrangère, c'est l'interculturel qui est enjeu
Certes, on vise une communication donc, une capacité technique, mais il ne saurait être
purement linguistique et formelle, sinon l'espéranto suffirait". En effet, les structures
grammaticales, les connaissances lexicales d’une langue ne sont qu’un outil et ne

représentent que la surface visible et émergente de la communication. Ensuite, le processus
de communication n’est parfois pas linéaire. La transmission d’un message n’est jamais
neutre : toute situation de communication est une situation où l’intention et les
représentations des émetteurs et des récepteurs conditionnent la diffusion et l’interprétation
du message.
Le Vietnam est depuis longtemps un pays francophones et le français est une des
langues obligatoires enseignées dans des universités, dans des écoles secondaires et même
dans des écoles primaires. En outre, avec la réforme économique et l’ouverture du
Vietnam, les échanges économiques et culturels entre la France et le Vietnam se
multiplient et engendrent de plus en plus de rencontres entre les deux peuples. Cela peut
permettre aux jeunes Vietnamiens d’aller en France faire des études mais constitue
également un nouveau défi à l’enseignement du français au Vietnam. Car, en faisant des
études à l’étranger, les gens se trouveront confrontés à un environnement tout à fait
différent de leur environnement d’origine et devront s’y adapter. Or, certains étudiants
vietnamiens semblent avoir beaucoup de difficultés à s’habituer à l’environnement

6
français. Donc une question se pose à l’enseignement du français au Vietnam c’est
comment enseigner la culture en FLE (français langue étrangère) aux étudiants
vietnamiens afin de résoudre les problèmes de l’interculturel existant dans l’enseignement
du français au Vietnam.
Étant professeur de français, nous prenons concience de l’importance de l'approche
interculturelle dans l'enseignement/ apprentissage du FLE. Tout cela nous a poussé à faire
un mémoire de fin d’études post-universitaires portant sur une approche interculturelle à
travers la méthode « Tout va bien », méthode utilisée actuellement dans notre département.

2. Pertinence de recherche
Cette recherche part d’un problème que nous avons rencontré dans la réalité de
notre enseignement : le blocage dans la communication même quand les étudiants n'ont pas
beaucoup de problèmes linguistiques. Les résultats obtenus de ce travail permettront de

résoudre en partie le problème dans la communication en FLE chez les apprenants
vietnamiens grâce à nos propositions.

3. Objectifs de recherche
Notre travail a pour but d’appliquer l'approche interculturelle à l’enseignement du
français destiné aux étudiants de premières années du département de Langue et de
Civilisation Françaises à travers la méthode « Tout va bien ». Donc, les objectifs
spécifiques seront :
- de découvrir comment les professeurs interviennent les faits culturels pendant les
cours.
- d’examiner l’efficacité de l’enseignement de l’interculturel à l’université grâce à
des enquêtes auprès des professeurs et des étudiants.
- de donner des propositions pour améliorer le blocage dans la communication en
FLE chez les étudiants vietnamiens.

4. Questions et hypothèses de recherche
Afin de réaliser les objectifs de recherche, nous nous sommes posés des questions
de recherche suivantes :

7
1. Quelles sont les difficultés d’origine culturelle rencontrées par les étudiants de
français de première et deuxième années dans l'apprentissage du FLE au
Département de Langue et de Civilisation Françaises ?
2. Quelles sont les difficultés que les enseignants de FLE rencontrent dans leur
enseignement de la compétence interculturelle ?
3. Les contenus culturels présentés dans "TOUT VA BIEN" répondent-ils aux
objectifs de l'enseignement du FLE aux étudiants de première et de deuxième années
du Département de Langue et de Civilisation Françaises ?
4. Quelles seront les propositions méthodologiques pour améliorer l'enseignement
de la compétence interculturelle aux étudiants de première et deuxième années au

Département de Langue et de Civilisation Françaises ?
À partir des questions ci-dessus, nous formulons 3 hypothèses suivantes:
Hypothèse 1 : Pour différentes raisons (niveau de langue hétérogène, grandes
différences entre la culture maternelle des étudiants et la culture française, contacts
difficiles avec des réalités étrangères ) surtout le manque de connaissances dans plusieurs
domaines culturels (historique, politique, géographique, social ), nos étudiants de FLE
rencontrent beaucoup de difficultés dans leur apprentissage de la culture Cette lacune en
culture française empêchent une bonne acquisition de la langue.
Hypothèse 2 : Nos enseignants de FLE rencontrent aussi des difficultés
méthodologiques dans la mise en oeuvre de l'enseignement de la culture et de l'interculturel
aux étudiants de première et deuxième années : insuffisance de connaissance en culture
française et aussi en culture vietnamienne, manque d'expérience et de méthodologie en
matière d'enseignement de la culture en classe, hétérogénéité du niveau des étudiants Ces
facteurs constituent un obstacle pour un enseignement efficace de la culture et de
l'interculturel.
Hypothèse 3 : Les contenus culturels présentés dans "TOUT VA BIEN", les
documents authentiques complémentaires et une meilleure méthodologie des enseignants
dans l'enseignement de la culture qui sont accompagnés d’une meilleure conscience dans
l'apprentissage culturel des étudiants peuvent améliorer l'acquisition de la compétence
interculturelle chez les étudiants.



8
5. Méthodologie de recherche
Il s’agit ici d’une recherche à caractère descriptif et analytique. Après avoir décrit
et analysé des documents, des ouvrages, des articles pour constuire un cadre théorique de
la recherche, nous avons utilisé les deux techniques de recherches principales suivantes :
- Méthode d’analyse qualitative : cette méthode nous aide à analyser les contenus du
programme dans le document utilisé pour l’enseignement de la culture au Département

de Langue et de Civilisation Françaises.
- Méthode d’analyse quantitative (statistique) : cette méthode consiste à analyser les
documents choisis et les classer de façons logique et cohérente et les résultats de
l'enquête pour décrire l'état des lieux de l'enseignement de la culture et de l'interculturel
en classe de FLE.

6. Limite de recherche
Le problème de l’interculturel dans l’enseignement/apprentissage du FLE est un
grand domaine. Mais faute de temps et de connaissance, ce travail ne se limite qu’à l’étude
de l’interculturel chez les étudiants de la première et de la deuxième années du
Département de Langue et de Civilisation Françaises, E.S.L.E, U.N.H. avec la méthode
"TOUT VA BIEN 1" et "TOUT VA BIEN 2".

7. Composition du mémoire
Notre mémoire se compose de trois chapitres :
Dans le premier chapitre, nous présenterons le cadre théorique de l'enseignement
de la culture intégré dans l'enseignement de la langue : la notion de culture, les principes
méthodologiques de l'enseignement de la culture en FLE, la problématique de
l'interculturel, les compétences attendues (savoir, savoir-faire, savoir-être, savoir-
apprendre), les principes, les aspects culturels et sociaux français et vietnamiens.
Dans le deuxième chapitre, nous allons présenter d'abord, de façon générale la
méthode "TOUT VA BIEN" surtout les deux niveaux "TOUT VA BIEN 1" et "TOUT VA
BIEN 2" qui sont utilisées actuellement pour l'enseignement du français aux étudiants de
première et de deuxième années au Département de Langue et de Civilisation Françaises,
ESLE, UNH. Nous allons analyser ensuite quelques documents culturels dans ces deux
niveaux pour illustrer les principes méthodologiques de l'enseignement de la culture en

9
FLE présentés dans le chapitre 1. Et en nous basant sur l'analyse du corpus constitué auprès
des étudiants et des enseignants du Département de Langue et de Civilisation Françaises

lors de nos enquêtes par questionnaire, nous dresserons l'état des lieux de l'enseignement
de la culture mis sur place actuellement en rapport avec les objectifs de l'enseignement du
FLE et de la culture française : le public ciblé (les difficultés au cours de l'apprentissage,
les besoins en matière culturelle, etc.), le corps d'enseignants (expérience, formation
initiale et continue, conception et pratique en classe en matière d'enseignement culturel) et
l'enseignement des contenus culturels dans "TOUT VA BIEN" à travers des remarques et
des jugements des enseignants de FLE et des étudiants Tout ce travail consistera à
esquisser le tableau de l'enseignement de la culture mis en place au Département de
Langue et de Civilisation Françaises. D'où nous pourrons reconnaître les points forts ainsi
que les points faibles qui serviront de bases pour nos propositions méthodologiques afin
d'améliorer l'enseignement de la culture dans le troisième chapitre.
Dans le troisième chapitre, nous apportons les propositions envisageables
concernant les contenus culturels du FLE : les démarches pédagogiques pour un
enseignement efficace de la culture en classe de FLE au Département de Langue et de
Civilisation Françaises.

10
CHAPITRE I
CADRE THÉORIQUE

1.1. Langue et culture dans l’enseignement/apprentissage de langues étrangères.
En réfléchissant sur la didactique des langues, on admet que la langue et la culture
sont liées. Louis Porcher signale que, dans le principe épistémologique, langue et culture
sont "indissociables" (1986, p.43). Jean-Paul Narcy-Combes (2005) rappelle que langage,
culture et savoir(s) entretiennent entre eux une relation transductive, c'est-à-dire qu'ils sont
inséparables les uns des autres.
Dans le domaine de l'enseignement des langues, la langue n'est généralement pas
enseignée à travers un contenu purement linguistique. Les contacts avec les langues
étrangères permettent d'entrer en interaction avec "des individus appartenant effectivement
à une autre société ou ayant un commerce privilégié avec elle" (Beacco, 2000, p.15). En ce

sens, il sera nécessaire, dans l'enseignement d'une langue étrangère, de situer
géographiquement le pays ou les pays où la langue se parle et d'évoquer les comportements
quotidiens, dans lesquels s'insère la communication verbale. "Toute langue véhicule avec
elle une culture dont elle est à la fois la productrice et le produit” (Porcher, 1995, p.53).
Il faut bien remarquer que, dans les faits pédagogiques, il n'en va pas toujours ainsi.
L'enseignement de la culture, qui accompagne et complète l'enseignement linguistique,
cause bien des difficultés aux enseignants ainsi qu’aux apprenants.
Ce qu'on entend par culture constitue un enjeu didactique essentiel dans
l'enseignement des langues. Cette situation nous amène à nous demander quelle définition
on peut donner à la notion de culture et quel statut on donne à la culture dans
l'enseignement du FLE.

1.1.1. La notion de culture
Les définitions de la culture sont nombreuses. Dans son article "Approche
interculturelle de l'enseignement des civilisations” (1986), Abdallah-Pretceille définit,
dans une publication UNESCO, la culture comme un "système de valeurs dynamiques
formé d'éléments acquis, avec des postulats des croyances et des règles qui permettent aux

11
membres d'établir des rapports entre eux et avec le monde, de communiquer et de
développer les capacités créatrices qui existent chez eux"
De ce point-là, le mot « culture » renvoie à une dimension anthropologique. Par
contre, Louis Porcher (1995, p.55) a donné un autre point de vue "toute sociélé est liée à
une culture d'ensemble, qui la caractérise et qui est elle-même le résultat de nombreuses
cultures, qui sont plus petites, plus sectorisées" (Porcher, 1995, p.55). D'après lui, la
culture est le résultat d'un processus historique ; elle évolue et produit en même temps. Elle
contribue à définir les appartenances des individus, elle constitue "une partie de leur
identité".
La culture, d'après le Dictionnaire actuel de l'éducation (Larousse, 1988), est
définies comme "un ensemble de manières de voir, de sentir, de percevoir, de penser, de

s’exprimer, de réagir, des modes de vie, des croyances, des connaissances, des
réalisations, des us et coutumes, des traditions, des institutions, des normes, des valeurs,
des mœurs, des loisirs et des aspirations". En d’autres termes, la culture est une manière de
résoudre les problèmes auxquels nous sommes confrontés. Pour l’anthropologie, et c’est
généralement la définition retenue lorsque l’on aborde les problématiques interculturelles,
la culture est l’ensemble des traits distinctifs caractérisant le mode de vie d’un peuple ou
d’une société.

1.1.2. Les deux cultures
Dans l'enseignement des langues étrangères, il convient de distinguer deux
composantes fondatrices de la culture : la culture cultivée et la culture anthropologique.
La première, "la culture cultivée" (Porcher, 1995, p.66), ou "la culture savante"
chez Robert Gallison, correspond à des savoirs touchant la littérature, les arts, l'histoire,
etc. D'après Porcher (1995), la culture cultivée tient une place importante dans une société,
par laquelle la société distingue sa propre identité. Cette culture doit être impérativement
transmise par l'institution éducatice, parce qu'elle "reflète une culture nationale tout
entière" (Porcher, 2004, p.54). Elle a été longtemps la seule présente dans les méthodes de
langues.
La deuxième, "la culture anthropologique" (Porcher, 1995, p.66), ou la culture
partagée, correspond à des manières dont les indigènes "voient le monde, la façon qu'ils
ont de se comporter dans telle situation, ce qu'ils croient, leurs représentations de

12
l'étranger, leur image de l'interculturel" (Porcher, 2004, p.55). Porcher met l’accent sur
l'importance de cette culture dans l'enseignement du FLE, car ce sont les pratiques
culturelles qui marquent les comportements et les conduites des citoyens français par
exemple. Par rapport à « la culture cultivée », « la culture anthropologique » se trouve
dans une place inférieure dans l'enseignement des langues étrangères depuis toujours.
Jusqu'au milieu des années quatre-vingt, cette dimension de l'enseignement du FLE n'a
quasiment pas pénétré dans le cours de français.

Cependant, cette culture est un obstacle dans l'apprentissage des langues
étrangères, car ces connaissances sont non verbales. Depuis ces dernières années, de plus
en plus de didacticiens se sont rendu compte de la place importante de cette culture. Maguy
Pothier (2003, p.26) a ainsi dit dans son livre "Si l'on retient l'idée que la culture partagée
est la clé d'un certain nombre de comportements sociaux collectifs et individuels, une
compétence culturelle plus axée sur cette culture partagée devient incontournable pour
l'apprenant étranger (appelé à vivre dans le pays cible ou être en contact avec des natifs),
s'il veut véritablement comprendre et être compris sans malentendus interculturels".

1.2. Principes méthodologiques de l'enseignement de la culture en FLE
Yann Tourtel, professeur à l'Université de Rouen, nous a présenté dans son cours
télé-enseignement "Anthropologie culturelle", 5 principes méthodologiques de
l'enseignement de la culture en FLE que nous trouvons nécessaires pour tout
l'enseignement.

1.2.1. Le sentiment d'étonnement et de curiosité devant l'Autre
C'est sans doute le premier pré-requis indispensable chez les apprenants pour
aborder l'étude d'une culture étrangère, le pré-requis que l'enseignant se doit d'évaluer en
tout début de l'apprentissage et qu'il ne cessera d'activer car l'apprenant n'est jamais un
débutant complet devant la culture cible. Les cultures maternelles véhiculent toujours sur
la culture étrangère des stéréotypes qui réduisent ses traits distinctifs en les banalisant.
Sans cette éducation du regard, l'apprenant reste myope ou presbyte.




13
1.2.2. Le phénomène d'acculturation
Cette notion intéresse tout particulièrement l'enseignement de la culture. Elle
permet de repérer, de catégoriser et d'interpréter. Ces emprunts culturels qui résultent du

contact avec l'Autre, c'est-à-dire avec la culture cible. L'acculturation désigne "l'adoption et
l'assimilation par une société ou par un individu des valeurs venues d'ailleurs et qui les
transforment de l'intérieur" (Histoire des moeurs, "Pléiade", 1991, tom 3, "Thèmes et
systèmes culturles")
Il est nécessaire d'en faire prendre conscience à des apprenants, dans la culture
maternelle comme dans la culture cible. En tout début d'apprentissage, l'étude
étymologique de quelques termes de la culture maternelle et dont la paternité "revient" à la
culture cible peut, aux yeux des apprenants, témoigner de ces transferts culturels, leur faire
découvrir l'enrichissement mutuel qui résulte des brassages culturels et aussi mieux
"apprivoiser" la culture étrangère en dédramatisant le choc culturel inhérent à toute
rencontre avec l'Autre.

1.2.3. L'ethnocentrisme
Le simple fait d'entrer en contact avec des personnes appartenant à d'autres univers
culturels ne peut garantir le développement d'une attitude ouverte et de tolérance. En effet,
les recherches ont montré que dès que les cultures se rencontrent, c'est le réflexe de
généralisation et le jugement de valeur qui sont premier chez la plupart des individus.
Alors, l'ethnocentrisme est considéré comme un obstacle majeur dans
l'enseignement de la culture pour l'apprenant ainsi que pour l'enseignant. Ce phénomène
caractérise "l'attitude des membres d'une société qui, ramenant les formes culturelles et les
faits sociaux étrangers à ceux qu'ils connaissent, les jugent selon leurs propres normes et
estiment que leur culture est supérieure ou préférable à toute autre, les méprisent ou les
condamnent" (Dictionnaire des sciences humaines)
Tout au long de l'histoire humaine, les groupes sociaux, pour préserver leur identité
culturelle, ont pensé l'altérité à travers des schémas mentaux imprégnés de fantasme.
L'autre, désigné souvent comme le Barbare est généralement celui qui inquiète et donc il
faut se protéger les populations achaïques, s'autodésignaient comme les "hommes", les
"excellents" et qualifiaient le groupe étranger de "singes de terre" ou "d'oeufs de pou"
(Levi-Strauss, in Race et Histoire).


14
Il est donc important, dans le processus d'enseignement/apprentissage, d'aborder la
diversité culturelle sans tomber dans l'ethnocentrisme.

1.2.4. Le relativisme culturel
La théorie du "relativisme culturel" postule : "Tout fait culturel, toute production
humaine n'ont de sens que dans le contexte de la culture qui les fait naître" (Dictionnaire
des sciences humaines)
Ce principe méthodologique (qui ressort à ce qu'il est convenu d'appeler
"interculturel") opère sur deux niveaux :
- Il permet de saisir, par un effet de contraste, les ressemblances et les différences
entre la culture cible et la culture maternelle.
- Cette démarche comparative peut être transposée au sein même de la culture
cible. En effet, elle améliore la perception entre le dit et le non-dit, entre des références
culturelles parfois trop théoriques, trop formelles et les faits, les pratiques réelles des
membres de la société étudiée. À ce sujet, il nous faut rappeler le passage de G. Zarate
dans "Enseigner une culture étrangère" (1986) : "Pour éviter un décodage naïf - à la lettre
- de la culture étrangère, il est bon de savoir que "l'ordre des mots ne reproduit jamais
strictement l'ordre des choses". De même que l'organigramme d'une entreprise - qui
systématise pourtant les principes de hiérachie de cette communauté - ne rend pas toujours
compte des relations de pouvoir effectives (un sous-chef peut cumuler plus de prestige ou
plus de pouvoir que son chef), de même la lecture des règles particulières qui régissent
toute communauté spécifique exige que distinction soit faite entre l'ordre explicite et
l'ordre implicite des choses"
Un apprenant averti sera mieux capable de démystifier ce que G. Zarate nomme
"fiction pédagogique", comme par exemple la présentation du Français moyen, construite à
partir d'agendas ou d'emploi du temps types. Le personnage représenté y est le porte-parole
du groupe tout entier et non l'expression d'un individu dans toute sa complexité et son
authenticité.


1.2.5. La notion de "lecture des cultures"
Dans une publication déjà ancienne mais toujours pertinente, F. Debyser (1973)
propose trois principes d'approches complémentaires pour toute questions de culture.

15
* L'approche sociologique
La question étudiée est traitée comme un phénomène social et dans ses relations à
l'ensemble de la société française. Par exemple, dans le domaine du sport, on étudiera :
- Les données statistiques (sports pratiqués, nombre de clubs, etc.)
- La place du sport dans l'institution scolaire.
- La pratique du sport selon les différentes classes sociales et professionnelles.
- Le rôle et la politique des pouvoirs publics.
- Les implications économiques
- etc.
Cette approche fournit aux apprenants les informations de base et la donnée
générale d'un problème ou d'un fait. Elle permet aussi des approches comparatives avec
d'autres sociétés, approche fondée non sur de "vagues impressions" mais sur des données
plus objectives.
* Approche anthropologique
S'appuyant sur des témoignages spontanés, des enquêtes directes et d'une façon
générale sur des matériaux bruts, cette approche corrige la part abstraite de la précédente et
motive davantage les apprenants. Les questions de culture sont abordées sous l'angle du
vécu, des réalités quotidiennes. Si l'on reprend l'exemple du sport, on privilégiera :
- La place du sport dans la vie quotidienne des Français.
- Les moments et les lieux de pratique
- Les préférences
- Les réactions
- etc.
* Approche sémiologique
Avec cette approche, la culture est abordée comme un langage, composé de

"signes", au sens linguistique du terme. Ce que l'on observe dans les faits, les objets ou les
institutions d'une société, ce n'est plus le signifié primaire (plan de la dénotation) mais les
connotations culturelles, les représentations collectives. Il s'agit d'interpréter le réel à partir
de la polysémie des données culturelles. Cette approche croise bien les différents faisceaux
de connotations et ouvre sur de très riches perspectives de travail. Elle doit être
certainement modulée selon le niveau du public.


16
1.3. Problématique de l'interculturel
Actuellement, la mondialisation engendre de plus en plus de rencontres et
d'échanges avec les interlocuteurs venant de contextes linguistiques et socio-culturels
variés ; nous sommes de plus en plus confrontés à la diversité culturelle. Un problème de
l'interculturel apparaît alors : la compréhension entre individus de cultures différentes ne va
pas de soi. Dans une situation de communication, il peut y avoir des accords réciproques
entre les interlocuteurs, et vice versa, il peut y avoir des habitudes non partagés, des
normes et des valeurs différentes. L'enseignement des langues s'effectue toujours dans une
situation de contact entre plusieurs cultures (deux au moins). Il faut remarquer aussi qu'on
n'enseigne jamais une langue à travers un simple contenu linguistico-linguistique.
Alors, comment aborder la diversité culturelle sans tomber dans les ambiguïtés et
l'incompréhension ?
Des didacticiens ont proposé l'approche interculturelle. Dans cette appelation, le
préfixe "inter" indique une mise en relation et une prise en considération des interactions
entre des groupes, des individus, des identités. Le terme "interculturel" est plus
généralement utilisé non seulement comme appartenant à des milieux d'origine distincts,
mais aussi comme exprimant deux perspectives distinctes : l'une plutôt descriptive, l'autre
plus centrée sur l'action. L'interculturel a pris sa place dans la didactique du FLE depuis
une dizaine d'année et ici, il se trouve réduit au contact de deux cultures, celle de la langue-
source (ou la langue maternelle) et celle de la langue-cible.
Louis Porcher (2004, p.118) a précisé "quand on apprend une langue étrangère,

c'est l'interculturel qui est en jeu, et nullement l'international. Certes, on vise une
communication, donc une capacité technique, mais qui ne saurait être purement
linguistique et formelle, sinon l'espéranto suffirait. On cherche aussi à respecter chacun
des cultures, des croyances, chacun des modes de vie, à aller vers un métissage possible
sans abondon de son identité. Apprendre une langue étrangère c'est affirmerà la fois sa
propre identité et celle de l'étranger en allant vers les conditions d'une coopération et en
se donnant les moyens d'éviter des affrontements"
Donc, l'approche interculturelle n'a pas pour but d'identifier autrui en l'enfermant
dans un réseau de significations, ni d'établir des comparaisons sur la base d'une échelle
ethnocentrée. Elle donne une place plus importante à l'individu en tant que sujet qu'aux
caractéristiques culturelles de l'individu. La rencontre avec un étranger, c'est d'abord une

17
rencontre avec un sujet ayant des caractéristiques propres. La compétence interculturelle
n'est pas une compétence qui permet de communiquer avec un étranger (avec une personne
de nationalité, de culture différentes), mais tend vers la reconnaissance de l'interlocuteur
comme "autrui" (une autre personne). L'objectif est donc d'apprendre la rencontre et non
pas d'apprendre la culture de l'autre.
Dans cette partie, il faut ajouter aussi le concept de "stéréotype" qui est considéré
comme "nos lunettess sociologiques" : ils font ressembler le monde à ce que nous croyons
qu'il est" (Louis Porcher, 1995, p.64). En réalité, "chaque société possède un
représentation de soi-même et une représentation de l'étranger. Ces représentations ne
sont jamais élaborées objectivement, elles se trouvent en grande partie héritées, traduisent
une sorte d'inconscient collectif qui participe d'une identité nationale, ou régionale. On se
voit et on voit les autres en fonction des héritages que l'on reçoit et dont on est le produit"
Les stéréotypes sont nécessaires pour donner un sens à la société complexe dans laquelle
on vise. On peut acquérir les stéréotypes de nombreuses façons : certains reposent sur les
normes et les croyances de la culture. Ils peuvent être apris simplement en regardant la
télévision, en lisant certains livres ou magazines, en discutant avec des proches : on peut
ainsi être améné à déduire, à la seule vue des jeunes filles en pleures présentées sur le petit

écran, que toutes les femmes sont émotives. Les stéréotypes sont aussi transmis par les
institutions de la société : famille, école, etc. Certains parviennet de l'expérience directe de
chacun : si, par exemple, on interagit avec une femme de carrière qui semble froide mais
compétente, il se pourrait que, consciemment ou inconsciemment, on commence à croire
que toutes les femmes de carrières sont froides et compétentes.
Pourtant, il faut bien distinguer les stéréotypes des préjugés. Tous deux sont les
manifestations d'une mentalité collective qui l'emportent sur les analyses. Ils partagent le
caractère d'évaluation d'autrui. Le préjugé est un jugement (positif ou négatif) qui précède
l'expérience, un prêt-à-penser consacré, autoritaire, qui acquiert une sorte d'évidence tenant
lieu de toute délibération. On peut dire du préjugé qu'il est une position, une attitude, une
tendance globale, pour ou contre, favorable ou défavorable vis-à-vis d'une catégorie de
personnes et partant envers un individu sur la base de son appartenance réelle ou supposée
à ce groupe. Il s'y attache une composante affective. Bien sûr entre les stéréotypes et les
préjugés, il existe une relation car les stéréotypes peuvent exprimer les préjugés, les
rationner, les justifier. Il arrive aussi que les stéréotypes engendrent les préjugés, entrent

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dans la constitution d'une attitude d'exclusion ou d'acceptation de l'autre. Les préjugés sont
généralement fondés sur des stéréotypes mais tout stéréotype n'est pas nécessairement un
préjugé.
La démarche interculturelle suppose de
• se décentrer en jetant sur son groupe un regard extérieur. L'objectif est d'apprendre à
objectiver son propre système de références, à s'en distancier et donc à admettre l'existence
d'autres perspectives.
• se mettre à la place des autres, se projeter dans une autre perspective. Comprendre une
culture, c'est dépasser une vision parcellaire et ne pas la réduire à une énumération des faits
et de caractéristiques culturels, ne pas classer ni généraliser.
• coopérer, dépasser les préjugés et les stéréotypes, essayer de comprendre l’autre.
• comprendre comment l’autre perçoit le monde et me perçoit. Apprendre à comprendre
correctement les messages émis. Pour cela, il est nécessaire de connaître un certain nombre

de données quant à la grille de comportement de son interlocuteur.

1.3.1. La compétence communicative : une compétence interculturelle
La compétence communicative constitue l'objectif premier de l'apprentissage d'une
langue étrangère. Or il est désormais admis que la seule compétence linguistique, bien
qu’elle soit nécessaire,ne suffit pas dans une perspective de communication. Du point de
vue de l'expression, les apprenants devront apprendre à utiliser les formes et adopter les
comportements et les attitudes langagières reconnus de manière à se faire comprendre
devant leur interlocuteur. Du point de vue de la compréhension, ils devront pouvoir
identifier, reconnaître et interpréter correctement les attitudes et les comportements mis en
jeu par leur interlocuteurs dans les actes de parole, qu'ils s'agisse de la gestuelle ou de
références historiques et culturelles.
Les langues ne sont pas simples outils qui permettraient de faire passer des
informations de manière factuelle. Elles sont, avant tout, les vecteurs de communication
des cultures dont elles sont issues. L'histoire du pays, les normes sociales et les fondements
historiques de la société sont autant de facteurs nécessaires pour comprendre la culture,
mais aussi et surtout pour permettre aux apprenants de s’approprier celle de cette langue.
Il est donc nécessaire que les enseignants intègrent l'apprentissage des faits
culturels dans l'apprentissage des faits linguistiques, en dépassant le niveau de civilisation

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pour aborder des éléments plus profonds tels que les systèmes de valeurs ou de croyance et
la vision du monde. Cependant transmettre aux apprenants uniquement des connaissances
culturelles est déconseillé. Dans la perspective interculturelle, la compétence
communicationnelle sera fondée sur la capacité des interlocuteurs à repérer le culturel dans
les échanges langagiers. Apprendre une langue, comme le résume Louis Porcher (1988),
c'est être capable "de percevoir les systèmes de classement à l'aide desquels fonctionne une
communauté sociale et, par conséquent, d'anticiper, dans une situation donnée, ce qui va
se passer (c'est-à-dire quels comportements il convient d'avoir pour entretenir une relation
adéquate avec les protagonistes de la situation)".

Le cours de langue est un lieu privilégié où la compétence interculturelle
s’acquiert. Pourtant, un problème se pose : Comment former les enseignants et les
apprenants de FLE à l'interculturel ?

1.3.2. Former les enseignants de FLE à l'interculturel
Les enseignants ont une tâche de faire naître chez leurs apprenants une motivation
sans laquelle il n'y a pas d'apprentissage efficace. Éveiller la curiosité intellectuelle des
apprenants sur les faits culturels et linguistiques de la langue cible et la transformer au fur
et à mesure en désir, même en besoin d'apprendre et d'aller toujours plus loin, tel est le rôle
primordial des enseignants. Bien entendu, le choix des sujets et des moyens de présentation
motivants est fonction de la situation d'enseignement.
Un autre travail des enseignants est d'établir une meilleure compréhension entre le
locuteur natif et l'auditeur étranger. Les enseignants de FLE connaissent de leur propre
expérience des situations où un nom propre peut empêcher de décrypter le sens d'un énonc
et vice versa. Étant donné la lenteur du début de parole et la langue approximative du
locuteur étranger, l'interlocuteur français ne s'intéresse à la communication que si le
message émis par le destinateur porte un certain sens culturel. D'ailleurs, le degré
d'acquisiton du français dépend de la connaissance et de l'intégration des comportements
des Français.
Pourtant, la formation à l'interculturel n’est pas toujours intégrée dans la formation
des enseignants. Il est nécessaire que ceux-ci acquièrent eux-mêmes une compétence
interculturelle avant d'intégrer dans leurs classes cette dimension. Ils peuvent se trouver
parfois démunis pour adapter leur méthode d'enseignement à la prise en compte de la

20
culture. Donc, il faut d'abord se poser des questions telles que : Quelle différence entre
enseignement de la culture et formation à la compétence interculturelle ? Quelles activités
mettre en place en classe ? Quels supports choisir ? Quelles stratégies sont susceptibles de
développer ces compétences menant à une conscience interculturelle ?
Il est conseillé aux enseignants d'avoir recours à une pédagogie qui repose sur une

ambiance de confiance. Car la confiance est le pilier de toute activité qui fait appel aux
expériences personnelles des locuteurs. Les enseignants devraient apprendre à créer un
climat de confiance et à travailler pour l'instaurer dans leurs classes. Cela implique une
période où les apprenants vont faire connaissance dans un environnement rassurant. Cette
base est nécessaire avant de demander aux apprenants de partager leurs observations, de
poser des questions difficiles, de révéler leurs sentiments profonds et de prendre des
risques dans leur comportement. La tâche de l'enseignant sera d'abord d'aider à surmonter
l'ethnocentrisme (tendance à privilégier les normes et les valeurs de sa propre société pour
analyser les autres sociétés) et la tendance à juger qui sont spontanés pour tous.
Une autre question qui se pose aux enseignants, c'est que dans le contexte scolaire,
les pratiques interculturelles sont souvent limitées, en raison des contraintes du système
éducatif, aux échanges scolaires Or ils peuvent avoir des expériences interculturelles en
dehors de l'école, dans leur ville, dans leur quartier. Il est donc conseillé aux enseignants
d'envisager des expériences interculturelles interdisciplinaires et extrascolaires.

1.3.3. Former les apprenants de FLE à l'interculturel
La conscience interculturelle fait partie des compétences générales que l'apprenant
d'une langue étrangère doit acquérir, telles qu'elles sont définies par le Cadre européen
commun de référence pour les langues (2000). La prise en compte des aspects culturels
dans l'apprentissage des langues étrangère est indispensable, non seulement pour
communiquer efficacement avec des locuteurs natifs, mais aussi parce qu'elle représente un
enjeu éthique qui précise que la formation à l'interculturel n'a pas seulement pour objectif
de permettre aux apprenants de mieux maîtriser la langue étrangère dans ses dimensions
linguistiques et culturelles, elle permet également de combattre l'ethonocentrisme, d'éviter
les préjugés et des discriminations et aussi d'élargir à un projet humaniste à l'échelle
mondiale (la compréhension entre les peuples, l'enrichissement mutuel )

21
Les apprenants peuvent s'enrichir au contact d'individus de cultures différentes. Le
Cadre européen (voir la partie 1.1 du Cadre, p.9) souligne ainsi un des objectifs de

l'acquisition d'une compétence interculturelle pour les apprenants : "Dans une approche
interculturelle, un objectif essentiel de l'enseignement des langues est de favoriser le
développement harmonieux de la personnalité de l'apprenant et de son identité en réponse
à l'expérience enrichissante de l'altérité en matière de langue et de culture”. Acquérir une
compétence interculturelle permettra surtout aux apprenants de développer leur capacité à
se préparer à des séjours dans des régions d'autres cultures et à en tirer profit.
Toujours d'après le Cadre européen (voir la partie Introduction du Cadre, p.40),
"l'apprenant d'une deuxième langue (ou langue étrangère) et d'une deuxième culture (ou
culture étrangère) ne perd pas la compétence qu'il a dans sa langue maternelle et sa
culture maternelle. Et la nouvelle compétence en cours d'acquisition n'est pas non plus
totalement indépendante de la précédente. L'apprenant n'acquiert pas deux façons
étrangères d'agir et de communiquer. Il devient plurilingue et apprend l'interculturalité.
Les compétences linguistiques et culturelles relatives à chaque langue sont modifiées par
la connaissance de l'autre et contribuent à la prise de conscience, aux habiletés et aux
savoir-faire interculturels. Elles permettent à l'individu de développer une personnalité
plus riche et plus complexe et d'accroître à apprendre d'autres langues étrangères et à
s'ouvrir à des expériences culturelles nouvelles".
Pour mener à bien la formation des apprenants de FLE à l'interculturel, l’enseignant
doit avoir une pédagogie entièrement centrée sur l'apprenant. Une pédagogie interculturelle
doit s'intéresser aux apprenants, à leurs savoir-faire en situation de communication au lieu
des thèmes et des sujets abordés. Elle doit offrir aux apprenants des espaces réservés à
l'action et à l'analyser pour une prise de conscience du rôle de la culture dans l'échange.
Grâce à ces activités, on développe des aptitudes et des savoir-faire. Comme indique Louis
Porcher, "on ne reçoit pas l'interculturel tout fait, on le fabrique".
Dans l’approche interculturelle, l'apprenant doit donc plus que jamais s’impliquer
dans le processus d'apprentissage. Les compétences à acquérir dans l'univers interculturel
sont celles qui touchent au plus profond de l'individu : son image de soi, ses valeurs, ses
croyances ; son sens du bien et du mal, de ce qui est bon et mauvais, sa définition même de
la réalité Pour aider les apprenants à voir nettement la différence, et pour développer leur
capacité de communiquer efficacement avec ceux dont l’origine et la culture sont


22
différentes, les méthodes et techniques doivent dépasser le niveau de la théorie, de
l'analyse et de la comparaison car les savoirs, nous le savons tous, ne garantissent pas le
savoir-faire en face de la différence.
L'ouverture vers l'interculturel permet d'analyser des regards réciproques basés sur
l'autre, croiser un regard étranger sur sa propre langue et culture et aussi sur le pays dont on
étudie la langue. Dans ce cas-là, une approche par l'expérience s'impose comme le meilleur
moyen d'impliquer l'apprenant dans la formation. Elle ne se limite pas à des activités
comme les jeux de rôle ou les simulations. Elle doit permettre à l'apprenant de gérer et de
partager la prise en charge de l'acte d'apprendre. Elle comprend plusieurs phases :
l'apprenant participe à une activité qui est suivie d'une analyse de laquelle vont se dégager
des observations qui pourront être appliquées à la vie réelle.
Dans la pédagogie interculturelle, ceux qui utilisent la langue sont considérés
comme des acteurs sociaux qui s’acquittent des tâches, qui ne sont pas seulement
langagières. On est alors dans une perspective actionnelle qui constitue un dépassement de
l'approche communicative. Effectivement, le Cadre européen considère que les actes
langagiers n'ont de sens que par rapport aux actions sociales qu'ils concourent à réaliser.
Les locuteurs qui interagissaient avec les autres dans l’approche communicative
deviennent, dans l’approche actionnelle, les acteurs sociaux qui agissent avec les autres. À
ce changement d’approche correspond un changement de méthode ou/et de techniques.
Avant, on mettait les apprenants dans une situation de communication définie pour
développer leur compétence communicative, maintenant on attend les apprenants qu'ils
accomplissent des actions. La simulation, technique la plus utilisée dans l'approche
communicative, est donc insuffisante, dans la perspective du Cadre, à former un acteur
social. Pour enseigner une langue, il convient envisager toute une série d'occasions où
l'acteur/apprenant puisse réaliser une action avec les autres. L'objectif de
l'enseignement/apprentissage scolaire est de former des individus autonomes, mais aussi
des citoyens créatifs, responsables, actifs et solidaires.


1.4. Les compétences attendues
Le Cadre européen commun de références pour les langues du Conseil de l'Europe
reconnaît donc l’interculturalité comme une composante nécessaire à la didactique des

23
langues. L’interculturel touche à toutes les notions normalement considérées en didactique
des langues :
- savoir,
- savoir-faire,
- savoir-être,
- savoir-apprendre.

1.4.1. Savoir
En Français, le terme de "savoir" a un sens qui ne coïncide pas exactement avec
celui de connaissances alors que par exemple l'anglais utilise "knowledge" dans tous les
cas. Ce décalage a une origine ancienne puisque le mot provient du latin sapere, verbe qui
employé intransitivement indiquait une entité qui possédait une saveur. Ce n'est qu'au
Moyen-Age qu'émergea le sens actuel après avoir transité par une forme figurée disignant
une personne en quelque sorte "informée". A partir de cette époque, le fait de savoir fut
considéré comme une attestation ou garantie de sagesse.
La psychologie cognitive distingue les savoirs des connaissances : Les savoirs
sont des données, des concepts, des procédures ou des méthodes qui existent hors de tout
sujet connaissant et qui sont généralement codifiés dans des ouvrages de référence,
manuels, cahiers de procédure, encyclopédies, dictionnaires. Les connaissances, par
contre, sont indissociables d'un sujet connaissant. Lorsqu'une personne intériorise un savoir
en prenant connaissance, précisément, elle transforme ce savoir en connaissance. Dans une
perspective constructiviste, on dira qu'elle construit cette connaissance, qui lui appartient
alors en propre car le même savoir construit par une autre personne n'en sera jamais tout à
fait le même.
L'acquisition d'un savoir véritable suppose un processus continu d'assimilation et

d'organisation de connaissances par le sujet concerné, qui s'oppose à une simple
accumulation et rétention hors de toute volonté d'application. Au niveau individuel, le
savoir intègre donc une valeur ajoutée en rapport avec l'expérience vécue et de multiples
informations contextuelles. Chaque personne organise et élabore son savoir en fonction de
ses intérêts et besoins. La plupart des "savoirs" individuels sont naturellement utiles à
l'action, à sa performance, sa réussite d'où la phrase "Savoir, c'est pouvoir!"

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D'après le Cadre européen commun de référence pour les langues (voir la partie
2.1.1 du Cadre, p.16), "Toute communication humaine repose sur une connaissance
partagée du monde. [ ] Les connaissances empiriques relatives à la vie quotidienne
(organisation de la journée, déroulement des repas, modes de transport, de communication
et d'information), aux domaines publics ou personnel sont fondamentales pour la gestion
d'activités langagières en langue étrangère. La connaissance des valeurs et des croyances
religieuses, les tabous, une histoire commune, etc. sont également essentielles à la
communication interculturelle."
Le Cadre met l'accent sur le savoir socioculturel dans l'enseignement des langues
vivantes. Donc, l'enseignant doit fournir ce savoir en précisant certains traits distinctifs
caractéristiques d'une société européenne et de sa culture :
- La vie quotidienne, par exemple la nourriture, la boisson, l'heure des repas, les
manières de table, les passe-temps
- La condition de vie, par exemple le niveau de vie (avec leurs variantes régionales,
ethniques et de groupes sociaux), les conditions de logement
- Les relations interpersonnelles, par exemple les relations familiales, les relations au
travail, les relations entre générations
- Les valeurs, les croyances et les comportements en relation à des facteurs ou à des
paramètres tels que l'histoire, la politique, la tradition, le changement, le revenu
- Le langage du corps comme les gestes et les mimiques qui font aussi partie de la
compétence socioculturelle.
- Le savoir-vivre tels que la ponctualité, les cadeaux

- Les comportements rituels comme la pratique religieuse et les rites, la naissance, le
mariage, la mort

1.4.2. Savoir-faire
C'est la première compétence dans l'ordre des priorités pour les apprenants. Car le
but de celui qui apprend une langue étrangère n'est plus pour le plaisir ou par nécessité
académique, mais il apprend pour s'en servir. Il veut être capable, à partir de son
apprentissage, de faire telle ou telle chose (par exemple lire un journal, discuter avec des
natifs, parler de l'actualité ). "C'est toujours en termes de capacité que les usagers

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raisonnent. Ce sont donc les savoir-faire qui constituent le but des élèves, celui qu'ils
veulent atteindre" (Porcher, 2004, p.34).
Autrement dit, le savoir-faire est la connaissance des moyens qui permettent
l'accomplissement d'une tâche. Déjà, Beaumarchais disait : "Pour gagner du bien, le
savoir-faire vaut mieux que le savoir". Cette juxtaposition, ou plutôt cette combinaison de
deux infinitifs, SAVOIR et FAIRE, allie aussi la connaissance à l'action.
Un des avantages du savoir-faire est qu'il peut comporter plus de dimensions,
comme l'expérience manuelle, l'entraînement à résoudre des problèmes, la compréhension
des limites d'une solution spécifique, etc. Ainsi, le savoir-faire peut fréquemment éclipser
la théorie.
Et selon le Cadre européen (voir la partie 5.1.2.2 du Cadre, p.84), les aptitudes et
les savoir-faire interculturels pour l'apprenant comprennent :
- "La capacité d'établir une relation entre la culture d'origine et la culture étrangère.
- La sensibilisation à la notion de culture et la capacité de reconnaître et d'utiliser des
stratégies variées pour établir le contact avec des gens d'une autre culture.
- La capacité de jouer le rôle d'intermédiaire culturel entre sa propre culture et la culture
étrangère et de gérer efficacement des situations de malentendus et de conflits culturels.
- La capacité à aller au-delà de relations superficielles stéréotypées."


Quant aux enseignants, il s'agit d'envisager et d'expliciter :
- "quels rôles et fonctions d'intermédiaire culturel l'apprenant aura besoin ou devra
remplir ou pour lesquels il devra être outillé pour le faire ;
- quels trait de la culture d'origine et de la culture cible l'apprenant aura besoin de
distinguer ou devra distinguer ou devra être outillé pour le faire ;
- quelles dispositions sont prévues pour que l'apprenant ait une expérience de la culture
cible ;
- quelles possibilités l'apprenant aura de jouer le rôle d'intermédiaire culturel."

1.4.3. Savoir-être
Le savoir-être, ou autrement dit, sur le plan communicationnel, "savoir se
comporter" (savoir qu'il ne faut pas s'adresser à un supérieur avec un "salut mon pote" par
exemple), c'est l'ensemble de nos dispostions de base, de nos qualités ou de nos défauts.

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