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Khó khăn trong việc viết văn bản lập luận của sinh viên năm thứ 3 khoa ngôn ngữ và văn hóa pháp đại học ngoại ngữ

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UNIVERSITÉ NATIONALE DE HANOÏ
UNIVERSITÉ DE LANGUES ET D’ÉTUDES INTERNATIONALES
DÉPARTEMENT POST-UNIVERSITAIRE

ĐỖ THỊ THU TRANG

DIFFICULTÉS EN PRODUCTION DES ESSAIS ARGUMENTÉS CHEZ LES
ÉTUDIANTS EN TROISIÈME ANNÉE DU DÉPARTEMENT DE LANGUE
ET DE CIVILISATION FRANÇAISES –
UNIVERSITÉ DE LANGUES ET D’ÉTUDES INTERNATIONALES –
UNIVERSITÉ NATIONALE DE HANỌ

KHĨ KHĂN TRONG VIỆC VIẾT VĂN BẢN LẬP LUẬN CỦA SINH VIÊN
NĂM THỨ 3 KHOA NGƠN NGỮ VÀ VĂN HỐ PHÁP –
ĐẠI HỌC NGOẠI NGỮ - ĐẠI HỌC QUỐC GIA HÀ NỘI

Mémoire de master

Option : Didactique
Code : 60 14 10

HANOÏ - 2010


UNIVERSITÉ NATIONALE DE HANOÏ
UNIVERSITÉ DE LANGUES ET D’ÉTUDES INTERNATIONALES
DÉPARTEMENT POST-UNIVERSITAIRE

ĐỖ THỊ THU TRANG

DIFFICULTÉS EN PRODUCTION DES ESSAIS ARGUMENTÉS CHEZ LES


ÉTUDIANTS EN TROISIÈME ANNÉE DU DÉPARTEMENT DE LANGUE
ET DE CIVILISATION FRANÇAISES –
UNIVERSITÉ DE LANGUES ET D’ÉTUDES INTERNATIONALES –
UNIVERSITÉ NATIONALE DE HANỌ

KHĨ KHĂN TRONG VIỆC VIẾT VĂN BẢN LẬP LUẬN CỦA SINH VIÊN
NĂM THỨ 3 KHOA NGƠN NGỮ VÀ VĂN HỐ PHÁP –
ĐẠI HỌC NGOẠI NGỮ - ĐẠI HỌC QUỐC GIA HÀ NỘI

Mémoire de master

Option : Didactique
Code : 60 14 10
Directeur de recherche :
Monsieur le Professeur Tran The Hung

HANOÏ - 2010


TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION ............................................................................................................ 1
1. Choix du sujet............................................................................................................. 1
2. Objectif de la recherche ............................................................................................ 3
3. Méthodologie de la recherche ................................................................................... 3
CONTENU
Chapitre 1 : Cadre théorique ........................................................................................... 5
1. Notion d’argumentation ............................................................................................ 5
2. Texte argumenté ........................................................................................................ 12
2.1. Définition du texte argumenté ............................................................................... 12

2.2. Caractéristiques du texte argumenté ...................................................................... 12
2.3. Genres de texte argumenté et essai argumenté ...................................................... 13
3. Les modèles du processus rédactionnel ................................................................... 17
3.1. Un modèle linéaire ................................................................................................. 17
3.2. Des modèles non linéaires ..................................................................................... 18
3.3. Commentaires sur le modèle de Hayes (1996) ...................................................... 25
3.4. Apports du nouveau modèle de Hayes à l’enseignement de la production écrite . 26
Chapitre 2 : Analyse et interprétation des données ....................................................... 29
1. Présentation du terrain ............................................................................................ 29
2. Cadre méthodologique de la recherche ................................................................... 29
3. Analyse du corpus ...................................................................................................... 31
4. Analyse de l’enquête auprès des apprenants ........................................................... 48
Chapitre 3 : Propositions pédagogiques et méthodologiques ....................................... 61
1. A propos du programme d’enseignement ............................................................... 61


2. A propos de la formation et de l’autoformation des enseignants .......................... 62
3. A propos des tâches de l’enseignant responsable de l’expression écrite ............... 63
4. A propos du thème et du sujet d’écriture ................................................................ 65
5. A propos de la capacité à argumenter des apprenants........................................... 67
6. A propos de la cohérence et cohésion de l’essai argumenté des apprenants ........ 68
7. A propos de la démarche pédagogique dans un cours d’expression écrite .......... 69
8. A propos de l’évaluation des productions écrites ................................................... 71
CONCLUSION ................................................................................................................. 73
BIBLIOGRAPHIE............................................................................................................74
ANNEXES


1


INTRODUCTION

1. Choix du sujet
A l’heure de la mondialisation, la mtrise de langues étrangères se révèle
indispensable. Elle implique une bonne capacité à communiquer. Et dans la
communication, il arrive souvent que nous devions défendre notre point de vue, convaincre
les autres et les persuader de suivre notre raisonnement. Par exemple, un vendeur veut
persuader les touristes étrangers d’acheter ses marchandises ou bien on veut défendre sa
position lors d’un débat scientifique. Dans ces cas, l’argumentation joue un rôle très
important car une bonne argumentation nous permet d’atteindre notre objectif
communicatif. Ainsi, la production des textes argumentés ne peut pas être négligée dans
l’enseignement/apprentissage des langues étrangères. Elle constitue un point clef de
lenseignement du franỗais, lộpreuve type des examens de fin d’études, des concours
d’admission à de nombreux emplois et programmes d’études. C’est pour cette raison que
l’acte d’argumenter devient sans aucun doute un de ceux qui favorisent l’insertion des
élèves dans la vie sociale actuelle par la jouissance d’une expression écrite aisộe et
convaincante.
Au Dộpartement de Langue et de Civilisation Franỗaises de l’ULEI, UNH, on exige
que les étudiants après la troisième année atteignent le niveau C1 selon le Cadre européen
commun de référence pour les langues (CECR). Cela signifie qu’en expression écrite, les
étudiants à la fin de la troisième année doivent être capables de sexprimer sur des sujets
complexes de faỗon claire et bien structurée et mtriser les outils d’organisation,
d’articulation et de cohésion du texte. En se basant sur le CECR, l’épreuve de la
production écrite du DALF C1 comporte toujours une partie consacrée à l’essai argumenté.
Cela veut dire qu’en principe, les étudiants à la fin de la troisième année doivent bien
écrire des textes de ce type. Or, leur capacité en la matière laisse beaucoup à désirer. Ils
rencontrent en effet de nombreuses difficultés. Ils commettent souvent des erreurs d’ordre
grammatical, lexical, orthographique, etc. Mais comme ces erreurs ne sont pas typiques des
textes argumentés, nous ne nous intéressons qu’à leurs difficultés à argumenter, à organiser
et à enchner des idées. Beaucoup d’entre eux produisent souvent des essais argumentés



2

peu convaincants par manque d’arguments pertinents, de cohérence et de cohésion
textuelle. En bref, ils sont loin de répondre aux normes fixées pour le niveau C1 par le
CECR.
Face au souci d’aider les étudiants à atteindre le niveau C1 en expression écrite
après la troisième année universitaire et dans le contexte où les recherches dans le domaine
de l’expression écrite ne sont pas développées par rapport aux autres compétences
communicatives, nous voulons réaliser notre travail de recherche intitulé « Difficultés en
production des essais argumentés chez les étudiants en troisième année du Département de
Langue et de Civilisation Franỗaises Universitộ de Langues et dEtudes Internationales
Universitộ Nationale de Hanoï ».
Notre recherche vise ainsi à répondre aux questions suivantes :
1.

A quelles difficultés les étudiants en troisième année du Dộpartement de

Langue et de Civilisation Franỗaises de lUniversitộ de Langues et d’Etudes Internationales
de l’Université Nationale de Hanoï se heurtent-ils lors de leur production des essais
argumentés ?
2.

Quelles sont les causes de ces difficultés ?

Dans la période de préparation de ce travail, nous allons examiner les hypothèses
suivantes :
1.


Les étudiants doivent faire face aux difficultés à trouver, à organiser et à

enchner des idées. Leurs textes écrits ne sont pas riches en idées, ils manquent
d’arguments, de justifications ou d’exemples pertinents. De plus, ils n’arrivent pas à
produire de textes clairs, bien structurés : ils se heurtent aussi à des difficultés dans la
transition entre les paragraphes et ont beaucoup de mal à bien utiliser les connecteurs
argumentés ainsi que les signes de ponctuation.
2.

Les causes de leurs difficultés sont à la fois objectives et subjectives. Ces

difficultés seraient dues aux méthodes et aux pratiques d’enseignement, au manque de
motivation, à l’insuffisance de connaissances thématiques et linguistiques (surtout celles
des connecteurs argumentatifs), au manque de techniques de composition d’un essai
argumenté, à la capacité à argumenter (à utiliser des stratégies argumentatives, des


3

enthymèmes (ou le syllogisme tronqué) ainsi que des lieux communs qui sont des lois de
passage dans l’argumentation très efficaces) de la part des étudiants.
2. Objectif de la recherche
Notre recherche vise à identifier les difficultés des étudiants en troisième année du
Département de Langue et de Civilisation Franỗaises ULEI UNH lors de leur rédaction
des essais argumentés et à aider ces étudiants à atteindre le niveau C1 en expression écrite
après la sortie de l’école.
3. Méthodologie de la recherche
Concepts clés
-


Texte argumenté : Dans ce mémoire, nous employons indifféremment ce terme et le
terme texte argumentatif (voir p.13).

-

Essai argumenté

-

Thèse

-

Argument

-

Connecteurs et opérateurs argumentatifs

-

Cohérence et cohésion textuelles
Méthodologie de la recherche
Il s’agit d’une recherche descriptive.
Pour répondre aux questions de recherche et atteindre les objectifs proposés, nous

allons d’abord demander à une quarantaine d’étudiants en troisième année d’écrire un essai
argumenté et puis, analyser leurs produits pour identifier leurs difficultés.
Nous allons ensuite mener une enquête par questionnaire auprès de ces étudiants
afin de dévoiler les causes de leurs difficultés et leurs attentes à l’égard du contenu

enseigné, de l’attitude et de la qualité du professeur, de la manière d’enseigner et de la
correction.
Enfin, nous allons proposer des applications pédagogiques et méthodologiques
visant une meilleure production des essais argumentés chez les étudiants.


4

Chapitre 1 : Cadre théorique

1. Notion d’argumentation
Pour comprendre ce qu’est un essai argumenté, on doit en premier lieu découvrir la
notion d’argumentation. Il faut tout d’abord affirmer qu’il n’y a pas de définition complète
et précise de l’argumentation. Pourtant, beaucoup de chercheurs ont essayé de donner leur
propre définition. Nous en citons ici quelques-unes pour donner une vue générale sur la
notion d’argumentation.
Examinons d’abord la notion d’argumentation selon Thyrion et Rosier (2005 : 77).
« Argumenter, c’est utiliser le langage pour agir sur les comportements,
les attitudes, les opinions, les représentations (c’est-à-dire les idées qu’on se fait
sur les choses, sur la réalité), les conceptions d’autrui.
Argumenter, c’est donc tenter d’influencer un interlocuteur au moyen du
langage en donnant une ou des raisons ; le but est de lui faire prendre en
considération et si possible adopter l’idée ou le comportement auquel on pense.
Celui qui argumente souhaite que son interlocuteur arrive à la conclusion
suivante : « donc, c’est justifié (ou ce n’est pas justifié) de penser, d’agir, de se
comporter ainsi ».
Cela signifie que
1. on argumente lorsqu’appart une différence de vues ou même un
conflit dans les manières de penser, de se comporter ou d’agir de personnes ou
de groupes et qu’un des partenaires au moins souhaite supprimer, atténuer ou

résoudre ce désaccord.
On n’argumente donc pas pour défendre une évidence (la blancheur de la
neige) ou pour défendre une vérité scientifique démontrée (la température
d’ébullition de l’eau, par exemple) sauf évidemment, si, à un moment donné, on
veut contester cette évidence ou cette vérité (comme l’on fait avec raison
Copernic et Galilée, par exemple).
[...]


5

3. Lorsqu’on argumente, deux attitudes sont possibles : soit on se situe par
rapport à quelqu’un d’autre, soit ce n’est pas le cas. On aura donc deux
manières différentes de mener une affirmation : soit pour affirmer et défendre un
point de vue, soit pour s’opposer à quelqu’un d’autre. »
Ainsi, Thyrion et Rosier ont abordé la cause, le moyen et le but de l’argumentation.
Plus précisément, on argumente quand il y a un conflit entre plusieurs personnes, on utilise
le langage pour affirmer et défendre un point de vue ou pour s’opposer à un autre et du
coup, il existe toujours un interlocuteur que celui qui argumente souhaite convaincre.
Pour Anscombre et Ducrot (1983), « argumenter, c’est essayer de transformer les
opinions d’autrui en lui présentant une suite de propositions dont la séquence « logique »
est une transformation de ses opinions, en signifiant par « logique » qu’il y a entre les
propositions présentées et la transformation des opinions de l’auditeur des liens fondés sur
un certains consensus de la collectivité. »
On constate que selon ces deux auteurs, l’argumentation cherche toujours à faire
changer d’avis à autrui.
Le groupe de formation CEGOS fait savoir que « argumenter, ce n'est pas vouloir
démontrer que l'on a raison à tout prix. Argumenter, c'est être capable de trouver les idées
justes, de les présenter pour susciter l'intérêt de ses interlocuteurs et les convaincre.
C'est aussi l'art de réfuter avec pertinence, en restant ouvert au dialogue.

L'argumentation repose à la fois sur des techniques et sur une éthique de la
communication. »
On remarque que la conception de ce groupe ressemble beaucoup à celle de Thyrion
et de Rosier. Ces auteurs s’accordent pour dire que l’argumentation cherche à convaincre
autrui et même à réfuter l’avis de l’autre. Le groupe de formation CEGOS ajoute que pour
argumenter, il faut des techniques et une éthique de la communication. Ainsi,
l’argumentation est aussi une sorte de communication, c’est-à-dire, il y a toujours un
énonciateur, un destinataire et cette communication se réalise au moyen du langage, ce qui
coïncide avec la notion de dialogue de Thyrion et Rosier.
Cette conception de l’argumentation se concrétise clairement par Meyer qui donne
son avis sur la question comme suit :


6

« a. Toute argumentation est une tentative visant à influencer son
interlocuteur.
Il s’agit d’abord de convaincre autrui, c’est-à-dire de le faire changer d’avis,
ou, du moins, d’essayer. L’on peut même dire que ce changement d’opinion
constitue le seul signe patent de l’efficacité d’une argumentation. » [...]
b. Toute argumentation est dialogue
[...] L’argumentation est liée à la notion de dialogue, ce qui suggère au moins
deux remarques.
La première est que cette relation s’inscrit d’emblée dans les domaines de la
liberté et de la subjectivité. Liberté de penser, liberté d’exprimer sa pensée ;
subjectivité dans la mesure où le locuteur choisit ses propres armes (idées,
exemples) qui pourront être ou non agrées par la subjectivité de l’interlocuteur.
[...]
[...]
Par ailleurs, et avec un souci d’efficacité plus immédiat dans la création de

textes argumentatifs, la notion de dialogue met en évidence l’existence de deux
thèses, l’une cherchant à dominer l’autre, ce qui implique deux conséquences :
- d’une part, argumenter ne consistera pas seulement à justifier sa thèse,
mais aussi à prendre en compte la ou les thèses adverses [...]
- d’autre part, il peut arriver que l’une des deux thèses soit implicite, soit
qu’elle ne soit pas évoquée dans l’énoncé du sujet, soit que la situation de
communication l’occulte. [...] Il faudra donc toujours savoir reconstituer la thèse
éventuellement absente [...]
c. Toute argumentation est justification et explication
La subjectivité implique que l’argumentation n’est pas une démonstration,
mathématique par exemple. Comme elle ne peut imposer son avis par la rigueur
d’un enchnement automatique des idées, il lui faudra multiplier les preuves,
voire user de techniques d’expression particulières, pour convaincre. Il sera donc
nécessaire que le néophyte apprenne à gérer la présentation et l’organisation des


7

idées, c’est-à-dire la structure du raisonnement qui sera mû par une intention
précise et orienté vers un objectif clair. Il lui faudra aussi mtriser l’expression
des preuves (exemples, faits, opinions rapportés, anecdotes) ainsi que l’utilisation
pertinente de procédés stylistiques. » (Meyer, 1996 : 9-11)
Cependant, toujours selon Meyer, la procédure de fonctionnement de
l’argumentation n’est pas un raisonnement inattaquable parce que l’argumentation agit
sur l’opinion personnelle et subjective d’un individu et elle ne cherche pas seulement à
déterminer si telle thèse est vraie ou fausse, mais à influencer autrui. Elle est réussie non
quand elle aura atteint le vrai mais quand elle aura convaincu son destinataire. C’est
donc la validité qui décide l’efficacité de l’argumentation. Il faut retenir qu’il s’agit d’ici
une efficacité maximale, mais pas absolue. Cette réflexion de Meyer coïncide avec la
définition de l’argumentation donnée par Oléron : « Démarche par laquelle on

entreprend d’amener un auditoire à adopter une position par des arguments visant à en
montrer la validité. » » (Meyer, 1996 : 12)
Après avoir examiné quatre conceptions sur l’argumentation des auteurs
différents, nous pourrions dire que celle de Meyer est la plus complète et qu’elle
regroupe toutes les idées apparaissant dans les trois autres conceptions. Nous nous
servirons de cette définition de Meyer pour illustrer plus tard notre point de vue sur
l’argumentation.
Dans son article intitulé « Apprendre à justifier par écrit une réponse : Analyses
linguistiques et perspectives », Garcia-Debanc a dit : « Toute argumentation peut se décrire
à partir de quatre opérations fondamentales :
-

asserter des thèses ou des arguments

-

justifier un point de vue que l’on souhaite défendre

-

réfuter d’autres points de vue possibles sur la question

-

concéder certains points de vue pour mieux défendre son propre point de

vue.
La justification est donc une des composantes essentielles de l’argumentation. »



8

Cette définition est brève mais elle aborde exactement les opérations nécessaires
dans une argumentation.
De tout ce qui est dit, on peut dire que l’argumentation n’est pas facile à définir
parce qu’elle fait références à plusieurs notions.
Tout d’abord, l’argumentation suppose le langage. C’est au moyen du langage qu’on
argumente.
Ensuite, le but de l’action d’argumenter est de convaincre autrui. Une question se
pose : « Quelle est la différence entre convaincre, persuader et démontrer ? » Nous nous
permettons de citer Nathalie Mazabras (Fiche memo Le texte argumentatif sur le site
:
« Démontrer, c’est prouver la vérité d’une thèse, sans avoir besoin de faire adhérer
le destinataire.
Convaincre, c’est rallier les destinataires à une thèse en la faisant admettre par un
cheminement rationnel.
Si l’on prend d’abord en considération l’attente, les émotions des destinataires en
usant de procédés susceptibles de les toucher, on cherche plutôt à les persuader. »
Selon l’auteur du Livre et Clic,
« pour convaincre, il faut s'appuyer sur des arguments logiques présentés
dans une argumentation sans faille. Elle doit s'étayer sur la justesse des
arguments et des exemples, ainsi que sur l'emploi de raisonnements
logiques appropriés dont la structure est bien mise en évidence. La visée
didactique est importante et donc on emploiera de préférence ce registre
de manière à se faire bien comprendre et entendre de son interlocuteur
qui ainsi adhérera avec sa raison et son intelligence à la thèse défendue
par l'argumentateur.
Persuader, c'est jouer sur une autre corde qu'on pourrait appeler la
sensibilité, les sentiments. Il s'agit de trouver, chez l'interlocuteur, ce qui
pourrait lui plaire, le séduire pour l'amener à penser comme vous. Aimet-il rire de son adversaire, s'en moquer ? Quel est son système de valeurs



9

? D'une certaine manière il s'agit de trouver ce qui pourrait lui faire
plaisir, ou au contraire ce qui pourrait le choquer, de manière à le faire
changer d'avis et à le conduire où vous voulez le mener. Ici on déploie
tout l'art de la rhétorique et on joue sur divers registres, du comique au
lyrique, suivant la situation que l'argumentateur a identifiée. »
Les chercheurs sont tous d’accord à dire que l’argumentation vise à
convaincre autrui. Cependant, beaucoup d’auteurs ont fait une distinction entre
convaincre et persuader. Mais en fait, quand on argumente, on peut aussi recourir aux
moyens d’ordre psychologique, moral ou physique, ce qui est considéré comme une
persuasion. Tous les experts s’accordent à confirmer que toute argumentation ne
cherche pas à montrer si la thèse est vraie ou fausse mais à convaincre autrui, ce qui
est réaffirmé par l’auteur du Livre et Clic qui remarque que « pour convaincre, il faut
s'appuyer sur des arguments logiques présentés dans une argumentation sans faille.
Elle doit s'étayer sur la justesse des arguments et des exemples… ».
Argumenter, c’est, selon de nombreuses définitions, donner des raisons ou
justifier. Voici quelques exemples :
(I) Lorsque nous parlons d’argumentation, nous nous référons toujours à des
discours comportant au moins deux énoncés E1 et E2 dont l’un est donné pour autoriser,
justifier ou imposer l’autre ; le premier est l’argument, le second la conclusion.
(Anscombre & Ducrot, 1983 : 163)
(II) Argumenter revient donc à donner des raisons pour telle ou telle conclusion.
Les raisons constituent, lorsqu’elles sont énoncées, autant d’arguments. (Mœschler, 1985 :
46)
(III) Au sens restreint du terme, “argumentation juridique” dénote les arguments
que donnent les juges, souvent par écrit, pour étayer leurs décisions. Ces arguments sont
des raisons données aux décisions, et ces raisons sont présentées comme des justifications

pour les décisions. (Golding, 1984 : 1)
(IV) Argumenter c’est adresser à un interlocuteur un argument, c’est-à-dire une
bonne raison, pour lui faire admettre une conclusion, et, bien sûr, les comportements
adéquats. Une argumentation se compose donc des deux éléments essentiels :


10

un argument → une conclusion
(Plantin, 1987 : 1)
Après avoir parcouru la conception de l’argumentation selon des auteurs
expérimentés en la matière et après avoir examiné des notions liées, nous pourrions définir
l’argumentation comme suit : « Argumenter, c’est donner des arguments au moyen du
langage pour défendre une thèse et convaincre autrui. »
Il nous reste maintenant à expliciter la notion de thèse et d’argument.
- Thèse : Ce vers quoi tend explicitement ou implicitement le texte argumentatif et
qui est obligatoirement étayé ou soutenu par au moins un argument.
- Argument : Enoncé qui étaie ou soutient une thèse (ou une conclusion partielle).
Nous venons de donner notre définition de l’argumentation. Nous allons ensuite
présenter quelques caractéristiques de l’argumentation.
Premièrement, l’argumentation comprend quatre composantes principales :
l’énonciateur, le destinataire, l’objet et le langage.
On peut le schématiser comme suit :
au sujet de
O

après avoir changé d’avis
D

D’


au moyen de

E

vers

L
E : Enonciateur

O : Objet

D : Destinataire

D’ : Destinataire avec changement d’avis

L : Langage

A travers ce schéma, on constate que dans l’argumentation, il y a toujours celui qui
argumente et celui à qui l’argumentation est destinée. Ces deux personnes peuvent être
présentes ou s’effacer, mais l’énonciateur doit tout le temps tenir compte de son


11

destinataire. Et on argumente toujours à propos d’un sujet appelé l’objet de
l’argumentation. Et encore, l’argumentation ne se fait qu’au moyen du langage.
Deuxièmement, l’argumentation ne cherche pas à prouver la vérité de la thèse.
Ainsi, une argumentation est jugée efficace quand elle arrive à convaincre le destinataire.
Troisièmement, quand on parle de l’argumentation, on parle de la liberté et de la

subjectivité. Liberté de penser et d’exprimer sa pensée ; subjectivité du locuteur de choisir
ses propres armes (idées, exemples) pour convaincre son destinataire et subjectivité du
destinataire d’accepter ou de refuser la thèse qui lui est présentée.
Jusqu’ici, nous avons présenté la notion d’argumentation à travers sa définition et
ses principales caractéristiques. Nous passons ensuite à la question du texte argumenté
étant donné que notre sujet de recherche porte sur l’essai argumenté qui est un sous-genre
du texte argumenté.


12

2. Texte argumenté
2.1. Définition du texte argumenté
Avant de présenter la définition du texte argumenté, nous devons préciser que le
terme texte argumenté est plus largement utilisé que celui de texte argumentatif, même
s’ils désignent un même phénomène.
Selon la faculté de philosophie de l’Université Laval, un texte argumenté est un
texte qui soutient une position au sujet de quelque chose (événement, problème, discours,
doctrine, etc.) qui expose ou explique pourquoi il faut considérer qu’une certaine chose a
telle ou telle particularité.
Quant aux professeurs du département de philosophie de l’Université du Québec à
Montréal, ils définissent le texte argumenté comme suit : « il s’agit d’une production écrite
suivie qui argumente dans le but de défendre un point de vue spécifique, c’est-à-dire une
thèse, en répondant à une interrogation philosophique ou scientifique. »
En bref, il n’y a pas de divergence de vues vis-à-vis de la définition du texte
argumenté. Nous passons ensuite à découvrir les caractéristiques de ce type de texte.
2.2. Caractéristiques du texte argumenté
D’après les professeurs de la faculté de philosophie de l’Université Laval, un texte
argumenté est un texte dans lequel un auteur argumente en faveur d’un point de vue
déterminé en réponse à une question d’intérêt philosophique ou scientifique et il y défend

une thèse, ou idée principale, à l’aide d’idées directrices et d’arguments susceptible
d’emporter l’adhésion rationnelle de ses lecteurs.
Les professeurs du département de philosophie de l’Université du Québec à
Montréal, eux, donnent des caractéristiques plus précises de ce type de texte : Le texte
argumentatif
- propose un développement structuré, solide, clair, logique, démonstratif, etc.,
- contient une thèse, c'est-à-dire une prise de position qui est défendue et
rigoureusement appuyée,
- examine les objections et les réfutations,


13

- argumente solidement et sérieusement,
- permet le traitement rationnel de l'information,
- s'articule autour d'une question de nature scientifique ou philosophique.
A côté de ces caractéristiques, le texte argumenté porte bien sûr celles de
l’argumentation comme nous en déjà parlé (voir p.8).
2.3. Genres de texte argumenté et essai argumenté
Certains distinguent six genres de texte argumenté : publicité, critique (de film, de
livres, d'œuvres d'art), éditorial, plaidoyer, dissertation, essai.
Les autres pensent qu’il y en a neuf : dissertation, plaidoirie, controverse, critique,
carte blanche, lettre ouverte, message publicitaire, billet de blogue, courrier de lecteur.
(D’après
/>Selon J.-L. Dumortier, il existe huit genres de ce type de texte : éditorial, publicité,
critique, plaidoirie, harangue, « lettre ouverte », (traditionnelle) dissertation, essai.
A notre avis, on peut regrouper carte blanche et courrier de lecteur dans le groupe de
l’essai et ce sont différentes formes de l’essai.
Ainsi, nous divisons le texte argumenté en éditorial, critique, message publicitaire,
plaidoirie, essai et dissertation.

Nous allons ensuite de définir chacun d’eux.
-

Editorial : Il s’agit d’un article de fond, un commentaire, signé ou non, qui

exprime, selon le cas, l'opinion d'un journaliste ou celle de la direction ou de la
rédaction du journal, de la radio ou de la télévision sur un thème d’actualité
-

Critique : "C'est un texte bref qui vise à persuader ou à dissuader le

destinataire de s'engager à son tour dans la découverte d'une œuvre. La note
critique est un texte composite qui comporte à la fois une partie informative
(éléments matériels sur le contexte de diffusion, bref résumé ou description du
contenu) et une partie argumentative (appréciation personnelle argumentée sur
divers aspects de l'œuvre)." (Programme Fesec, 2e degré, 2002)


14

-

Message publicitaire : Un message publicitaire est conỗu comme un

argumentaire qui doit comporter trois éléments : un argument cognitif ou
informatif : le consommateur doit savoir de quoi il s'agit, qu'est ce qui fait le plusproduit ; une part affective qui doit éveiller l'intérêt[29] du consommateur,
l'intéresser, le séduire ; une étape conative (qui engage à l'action) : le
consommateur est invité à acheter le produit, à appeler un numéro de téléphone,
visiter


les

magasins.

(Source :

/>-

Plaidoirie : Alors que la dissertation demande de vérifier la validité d'un

énoncé; le plaidoyer, plus large, exprime une opinion argumentée sur une question.
Pour le reste il est analogue à la dissertation (plan de développement, structuration,
argumentation, organisation, niveau de langue, volume, rédaction...) (Source :
/>-

Essai : Cette notion révèle aussi un mot très difficile à définir et constitue un

sujet de plusieurs débats.
Dans le manuel de franỗais Thốmes et textes, lessai est dộfini comme suit : un texte
abordant un sujet avec une certaine liberté sans prétendre complètement le traiter. L’essai
renvoie ici au genre littéraire à proprement parler. C’est l’expression d’une réponse
personnelle à un problème donné. L’objectif de l’essai est de prendre position par rapport à
la pensée d’autrui. Cette définition ressemble à beaucoup d’autres dans les dictionnaires
que nous citerons ci-dessous.
Comme le mot essai possède plusieurs sens, dans cette partie, nous allons citer la
définition de l’essai en tant que texte selon différents dictionnaires.
- Essai n.m. Livre, long article qui traite très librement d’une question, sans
prétendre épuiser le sujet. (Dictionnaire du franỗais contemporain, 1980 : 467)
- Essai n.m. Ouvrage littéraire en prose, de facture très libre, traitant d’un sujet qui
n’épuise pas ou réunissant des articles divers. « Les Essais », de Montaigne. Essai

philosophique, historique, politique. « Essai sur la peinture », Diderot (Dictionnaire Le
Petit Robert de la langue franỗaise, 2006 : 949)


15

- Essai n.m. Ouvrage en prose rassemblant des réflexions diverses ou traitant un
sujet d’intérêt général sans prétendre l’épuiser ni arriver à des conclusions fermes ou
définitives. (Dictionnaire Le Petit Larousse illustré, 2000 : 398)
- Essai, nom masculin Ouvrage littéraire présentant quelques idées sans que son
auteur prétende épuiser le sujet [Littérature]. Synonyme : ouvrage. Anglais essay
(Dictionnaire L’Internaute en ligne)
De toutes ces définitions, on peut constater d’abord que l’essai est généralement
considéré comme un genre littéraire qui n’épuise pas le sujet, autrement dit, qui ne le traite
pas à fond. Cependant, avec le temps, le terme essai prend un sens plus large. On entend
par essai non seulement un genre littéraire mais également une composition par laquelle
l’auteur donne son opinion sur un sujet. Et dans le cadre de ce travail de recherche, nous
traiterons l’essai au sens large du terme.
De plus, toutes ces définitions sont d’accord sur le point que l’essai en tant que
genre littéraire est un type de texte assez libre sur le plan de la structure et incomplet sur le
plan du contenu. Ces définitions peuvent entrner des malentendus chez les scripteurs
inexpérimentés sur l’essai en tant que genre scriptural et objet de la production écrite en
classe en général et dans l’épreuve du DALF C1 en particulier parce qu’ils peuvent
interpréter cette idée comme une négligence de la forme et du contenu de l’essai, c’est-àdire qu’il n’y a pas de progression logique dans leur texte écrit et qu’ils peuvent écrire tout
ce qui leur vient à l’esprit sans beaucoup réfléchir.
- L’essai argumenté et la dissertation

Dissertation

- applique plusieurs types de plan


II s'agit d'un texte suivi, composé d'un ensemble - est structurée, solide, démonstrative,
d'idées, d'opinions et de réflexions à propos d'une logique, etc.
question sur un thème donné. La dissertation - contient une thèse, c'est-à-dire une
exige la conformité aux faits, la précision et prise de position qui est défendue et
l'honnêteté, puisqu'il y a une prise de position à appuyée vigoureusement
défendre. La dissertation peut adopter tous les


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styles de plan de rédaction et permet de décrire, - examine les objections et les
d'examiner, de comparer, etc., des faits entre eux. réfutations
Elle possède des similitudes avec le texte - propose un traitement honnête,
argumentatif, mais elle est plus rigoureuse et précis et rationnel de l'information
élaborée. Il arrive que l'on distingue la dissertation
narrative,

de

la

dissertation

argumentative,

explicative ou critique.

- s'articule autour d'une question et
d'un sujet précis

- est basée sur une problématique bien
élaborée
- permet la subjectivité à travers les
critiques et la prise de position (thèse)
- ne comporte pas de structures

Essai

L'essai est un texte suivi qui possède un caractère fermes et rigides à respecter (plusieurs
provisoire, c'est-à-dire non définitif. Ce type de formes possibles)
production écrite présente une vision engagée et - présente une vision personnelle,
originale sur un sujet. Il peut revêtir plusieurs synthétique,

créative,

originale,

formes et n'a pas de structure rigide à respecter. engagée, inventive, etc.
Bien que l'essai fasse place à la subjectivité, à - cherche à explorer un sujet de
l'intuition et à la créativité, il n'est pas pour autant manière nouvelle
moins pertinent (certaines études de cycles
supérieurs exigent, pour l'obtention du grade, la
réalisation d'un essai). En d'autres termes, l'essai

- n'a rien à prouver et produit des
résultats partiels ou provisoires

représente une synthèse personnelle sur un thème - critique et interprète des faits à la
donné qui s'articule autour d'une perspective lumière d'une préoccupation centrale
principale basée sur une pensée personnelle. Ce - est pertinent, rigoureux et rationnel

type de texte est donc inventif et exploratoire,
mais également rigoureusement rationnel.
Il faut préciser ici que les plans abordés dans la partie sur les caractéristiques de la
dissertation sont les suivants : le plan dialectique, le plan problème-causes-solutions, le
plan inventaire, le plan comparatif, le plan explication-illustration d’une formule et


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commentaire, le plan suggéré par le sujet (Desalmand & Tort, 1977). Quand on dit que
l’essai peut revêtir plusieurs formes et n'a pas de structure rigide à respecter, cela veut dire
que l’essai ne doit pas respecter strictement un de ces types de plan. Mais comme il s’agit
d’un texte argumenté, il faut toujours un raisonnement logique.
Selon le CECR, un essai est un texte suivi qui présente le point de vue de son auteur
sur un sujet donné. Il s’agit d’une réflexion engagée, sous forme d’une synthèse
personnelle, d’une approche originale d’un thème, de son exploration d’une manière qui se
veut nouvelle, autour d’une préoccupation. Un essai peut être long ou bref. Le « je » de son
auteur peut être très présent ou assez discret. L’essai est une production écrite rigoureuse,
rationnelle, qui fait appel au discours argumentatif.
L’essai argumenté souvent demandé au niveau DALF C1 du CECR peut prendre la
forme d’une lettre (formelle ou non-formelle), d’un article de presse, d’un journal intime,
d’un discours ou d’un texte suivi. Ce dernier, à la différence des autres, comprend
obligatoirement trois parties : introduction, développement, conclusion.
3. Les modèles du processus rédactionnel
Dans ce chapitre, nous allons présenter des modèles de production des textes écrits.
Ces modèles nous serviront de base théorique du processus rédactionnel et d’enseignement
de la production écrite. Normalement, on distingue deux types de modèles de production :
les modèles linéaires et les modèles non linéaires.
3.1. Un modèle linéaire
Le modèle linéaire le plus célèbre est celui proposé par Rohmer en 1965. Ce modèle

analyse le processus de production des scripteurs ayant l’anglais comme langue maternelle.
Selon ce modèle, le processus rédactionnel se déroule en trois étapes : la préécriture,
l’écriture et la réécriture. Pendant l’étape de préécriture, le scripteur rédige le plan de son
texte et cherche des idées. Dans la deuxième phase, il concrétise les idées trouvées selon le
plan déjà établi pour avoir un texte. La dernière étape consiste à retravailler ce texte en y
apportant des corrections concernant la structure et le contenu.
D’après ce modèle, l’ordre de ces trois étapes est invariable. C’est pour cette raison
que ce modèle est considéré comme linéaire ou unidirectionnel : on ne passe à l’étape
suivante qu’après avoir fini l’étape précédente et du coup, il n’y a pas de retour en arrière


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sur les activités de l’étape précédente. Mais en réalité, le processus rédactionnel est plus
complexe que ce que Rohmer a analysé. En effet, seuls les scripteurs inexpérimentés
appliquent ce modèle en se contentant de produire un texte d’un seul coup et ne
s’intéressent guère aux activités cognitives pour apporter des corrections à leur texte. Par
exemple, ils ne se demandent pas si leurs expressions valorisent les idées trouvées pendant
l’étape de recherche d’idées. Quant aux scripteurs habiles, ils font toujours attention à cet
aspect cognitif et pour eux, le processus rédactionnel n’est pas linéaire. D’où des modèles
non linéaires proposés dans les années suivantes.
3.2. Des modèles non linéaires
Dans cette partie, nous n’avons pas l’ambition de présenter de faỗon exhaustive tous
les modốles non linộaires mais seulement le modốle de Hayes et Flower (1980) et celui de
Hayes proposé une quinzaine d’années plus tard étant donné que ces modèles sont pour
nous les plus connus et les plus appliqués dans la rédaction ainsi que dans
l’enseignement/apprentissage de la compétence de l’expression écrite.


Le modèle de Hayes et Flower

On doit attendre jusqu’au début des années 1980 pour que les chercheurs

commencent à analyser le processus rédactionnel tout en prenant appui sur les résultats de
recherche en psychologie. En 1980, Hayes et Flower ont proposé un modèle non linéaire
qui présente différents processus intervenant et se combinant au cours de la rédaction. La
méthodologie de recherche de ces auteurs consistait à faire réfléchir à haute voix les sujets
adultes anglophones, autrement dit, à faire verbaliser aux scripteurs ce qu’ils font au cours
de la rédaction textuelle. Selon le modèle proposé par ces deux auteurs, le processus
rédactionnel n’est plus unidirectionnel, mais plus complexe : il y a des retours en arrière et
l’intervention des activités cognitives comme nous allons le voir dans la figure 1.
Ce modèle est divisé en trois grandes composantes :
-

l’environnement de la tâche,

-

la mémoire à long terme,

-

le processus d’écriture.


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ENVIRONNEMENT DE LA TACHE
TACHE ASSIGNEE
Thème
Destinataire

Enjeux

TEXTE DEJA
ECRIT

PROCESSUS D’ECRITURE
MEMOIRE A LONG
TERME

REVISION
MISE

Récupération

Connaissances du
thème
Connaissances du
destinataire
Plans d’écriture
stockés

PLANIFICATION

Organisation

Lecture

EN
TEXTE


Edition

Production
des buts

CONTROLE

Figure 1 : Le modèle de Hayes et Flower (1980)
1.

L’environnement de la tâche comprend toutes les caractéristiques liées à la tâche

elle-même, c’est-à-dire les thématiques abordées, le destinataire, la motivation qu'elle
suscite auprès du scripteur. Elle comprend également le texte déjà produit en ce sens que
ce dernier devient, dès qu'il est créé, objet extérieur au processus lui-même.
2.

La mémoire à long terme qui regroupe, elle, toutes les connaissances déclaratives

et procédurales du sujet (le lexique, les règles de grammaire et d'orthographe…), les
métaconnaissances susceptibles d'intervenir dans le contexte de la tâche (du type "Je sais
que je suis faible en orthographe donc il faut que je me relise attentivement"…), des
informations relatives au destinataire, des plans d'écriture (comment faire une description
ou un texte argumenté…) et finalement tous les souvenirs d'expériences antérieures qui


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peuvent être réactualisés ou dans lesquels le sujet peut trouver un intérêt à puiser de
l'information.

3.

Le processus d'écriture (qui se charge en mémoire de travail) qui comprend les

quatre processus, à savoir : la planification, la textualisation, la révision et le contrôle.
o

La planification : ce processus consiste à élaborer des buts et un plan d’écriture à

partir des informations issues de la mémoire à long terme et de l’environnement de la
tâche. Ce processus d’élaboration conceptuelle comprendrait trois sous-processus:


la génération d’idées (activation et sélection en mémoire des idées

pertinentes par rapport au thème, au destinataire et au type de texte)


leur organisation (structurer les informations récupérées en un plan

d’écriture organisé de manière chronologique ou hiérarchisé)


l’assignation des buts (définition des buts, des plans et des critères

permettant l’ajustement du texte aux objectifs poursuivis et aux contraintes de la
situation)
o

La mise en texte : les fragments de messages conceptuels produits par la


planification peuvent être représentés sous forme de propositions, d'images, d'abstractions
ou de sensations. Ces messages sont transformés en énoncés par le processus de mise en
texte qui permet la sélection des unités lexicales, la construction des structures syntaxiques.
o

La révision : elle permet d’améliorer la qualité du texte écrit. Elle peut intervenir

après l'exécution mais aussi sur le travail mental en cours. Elle comprend deux phases:


Le processus de lecture permet de repérer les violations du langage, d'évaluer la

conformité de ce qui est écrit avec les buts fixés lors de la planification.


L'édition permet de corriger les erreurs et apporter des modifications. Les

opérations de révision vont de la révision de lettres à celle de paragraphes et sont de quatre
types : substitutions, déplacements, additions, et suppressions.
o

Le contrôle: ce processus guide la mise en œuvre des trois processus rédactionnels

précédents. Il gère le déroulement de l'activité en activant un processus ou en
l'interrompant pour en activer un autre, autrement dit, il conditionne l’interaction entre les
trois processus rédactionnels et permet leur récursivité.


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Le modèle de Hayes et Flower met l’accent sur l’aspect récursif du déroulement des
trois processus rédactionnels en fonction des règles d’enchnement et de priorité.
Autrement dit, ces trois opérations sont récursives, même si certaines opérations dominent
à certains moments de la tâche (par exemple, la planification au début du processus
rédactionnel. C’est l’instance de contrơle qui exige l’enchnement de ces trois opérations.
De plus, ce modèle insiste sur les aspects conceptuels de la production écrite
(connaissance du thème, organisation des connaissances en mémoire, mobilisation de
celles-ci en fonction du but et de la situation d’écriture).
Ce modèle a cependant été critiqué par plusieurs auteurs du fait qu’il s’agit d’un
modèle d’expert et qu’il ne permet donc pas de décrire la construction progressive de
l’habileté, ni les phases élémentaires de la production écrite. Il lui a été reproché aussi de
ne pas tenir assez compte des dimensions affectives et sociales et des processus cognitifs
qui interviennent dans la production écrite. De plus, il ne précise pas le fonctionnement de
la mémoire à long terme ainsi que son rôle dans la dynamique des traitements et le rôle de
la mémoire de travail est complètement oublié. Ces remarques ont été intégrées dans les
travaux plus récents de HAYES (1996).
Le modèle de Hayes et Flower fait aussi l’objet de critiques de Claudine GarciaDebanc et Michel Fayol étant donné qu’il s’intéresse principalement à des tâches de
rédactions d’essai ou de textes argumentés, sans prendre en compte la spécificité des tâches
d’écriture et qu’il est probable que ce ne soient pas exactement les mêmes opérations pour
la rédaction d’une justification écrite et d’un texte poétique. Mais ce point faible de Hayes
et Flower est pourtant bénéfique pour nous parce que notre recherche porte sur la rédaction
des essais argumentés.


Le modèle de Hayes (1996)


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