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EXPOSE DES TITRES ET TRAVAUX SCIENTIFIQUES (1869-1896), D''''ALFRED GIARD 1896

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EXPOSÉ

DES T I T R E S

TRAVAUX

SCIENTIFIQUES
(1

8 6 9 - 1 8 9 6 )

DE

A L F R E D
PROFESSEUR

À

I, .V

GIARD

V AG UL T É

DUS

SCIENCES

HE

PARIS



PARIS
I M P R I M E R I E
il,

G É N É R A LE

HUE

DE

MAI

FI,

EL'

RUS,

-J 8 9 6

L A I I II R E
il


GRADES

UNIVERSITAIRES

Licencié ès sciences m a t h é m a t i q u e s (juillet 1869).

Licencié ès sciences physiques (juillet 1869).
Licencié ès sciences naturelles (novembre 1869).
Docteur ès sciences naturelles (novembre 1872).

FONCTIONS
A. — Dans

l'Enseignement.

Elève à l'École n o r m a l e supérieure (1867).
P r é p a r a t e u r de zoologie (laboratoire de M.
des Sciences de Paris (juin 1871).

DE

LACAZE-DUTHIEHS)

à la Faculté

Professeur suppléant d'histoire naturelle à la Faculté des Sciences de Lille
(28 j a n v i e r 1 8 7 5 ) .
Professeur d'histoire n a t u r e l l e à l'Institut industriel
commercial du Nord de la F r a n c e (octobre 1875).

agronomique

cl

Chargé du cours d'histoire n a t u r e l l e à l'Ecole de Médecine el de P h a r m a c i e
de Lille (août 1875).

Chargé du cours d'histoire naturelle
P h a r m a c i e de Lille (septembre 1876).

à la Faculté de

Médecine et

de

Chargé du cours de zoologie à la Faculté des Sciences de Lille (51 m a r s 1879).
Professeur t i t u l a i r e de zoologie à la Faculté des Sciences de Lille (janvier 1 8 8 0 ) .
Maître de conférences de zoologie à l'Ecole n o r m a l e supérieure (6 octob r e 1887).
Chargé du cours d'évolution des êtres organisés (Fondation
Paris)

à la Faculté des Sciences de Paris (21 octobre 1888).

Professeur titulaire à la Faculté des Sciences (16 avril 1892).

de ht Ville de


li. — Hors de

l'Enseignement.

Membre du Comité consultatif des pêches m a r i t i m e s au Ministère de la
m a r i n e (1887).
Membre de la Commission technique chargée de l'étude et de l'examen des
procédés de destruction des insectes, cryptogames et autres végétaux nuisibles

à l'agriculture (1889).
Vice-président de la Société de Biologie (1890).
Président de la Société Entomologique de France (1896).


11 n'y a plus a u j o u r d ' h u i d ' h o m m e s encyclopédiques et, m ê m e les diflércnlos
b r a n c h e s d'une science particulière ont pris depuis le c o m m e n c e m e n t du siècle
u n tel développement, que la spécialisation s'est imposée de plus en plus, faisant
disparaître c h a q u e jour les compétences étendues. Tout en comprenant les
raisons qui ont a m e n é u n pareil état de choses, il est permis de le déplorer au
point de vue du progrès des idées générales. Aux seuls esprits synthétiques il
appartient en effet d'utiliser les m a t é r i a u x a c c u m u l é s , de les mettre en valeur
et de perfectionner ainsi la philosophie de la science. Aussi ai-je cherché p o u r
ma part à devenir u n zoologiste aussi complet que possible. D ' h e u r e u s e s circonstances m ' o n t aidé à réaliser p e u t - ê t r e , dans une faible m e s u r e , ce rêve
trop ambitieux.
Passionné dès le j e u n e âge p o u r les sciences naturelles, j ' é t a i s rompu vers
la quinzième année aux difficultés de la n o m e n c l a t u r e par la détermination
des Insectes indigènes et aussi des P h a n é r o g a m e s , car l'entomologie m'avait
d é m o n t r é la nécessité de l'étude des plantes.
Aussi q u a n d , après mes h u m a n i t é s , j ' e u s acquis à l'Ecole n o r m a l e des
connaissances plus sérieuses dans les divers ordres de sciences, je me trouvais
avoir, ainsi que m e l'écrivait en 1871 mon illustre Maître, M. D E L A C A Z E D U T H I E R S , u n e forte avance dans le vaste c h a m p de la systématique, et je savais
m e servir de ce terrible alphabet t a x o n o m i q u e , t e r r e u r de tant de d é b u t a n t s .
Je savais également que cette connaissance des espèces ne constitue pas la
science, encore bien qu'elle en donne parfois l'illusion, et qu'elle retienne certains travailleurs à u n stade de culture intellectuelle qui ne devrait être que
transitoire. Loin de moi cependant la pensée de considérer c o m m e négligeables
les t r a v a u x relatifs à la classification ou à la zoologie descriplive. L'observation détaillée et consciencieuse de faits en apparence futiles dans leur extrême
m i n u t i e peut éveiller chez u n esprit sagace des conceptions d'une h a u t e portée
philosophique. Les exemples d'Ex. G E O F F R O Y S A I X T - I I I L A I H E et de D A R W I N sont très
instructifs à cet égard, et pour ma p a r t j e mets au n o m b r e des découvertes

dont je suis le plus fier celle de la castration parasitaire
et des lois m o r p h o géniques qui en découlent ( n 196 à 209)*. Or j'ai été conduit à cette découverte par la connaissance précise des caractères sexuels secondaires de certains
Crabes, connaissance acquise par des recherches p u r e m e n t t a x o n o m i q u e s .
os

* L e s n u m é r o s r e n v o i e n t a u x a n a l y s e s d o s T r a v a u x s c i e n t i f i q u e s , p . 41 e t s u i v .


F/obligation de professer à la fois la zoologie et la botanique dans la chaire
d'histoire n a t u r e l l e de la Faculté des Sciences de Lille m ' i m p o s a le devoir de
ne négliger a u c u n e étude relative soit aux a n i m a u x , soit aux végétaux. Plus
tard l'enseignement très compréhensif que j e devais d o n n e r à l'École n o r m a l e
s u p é r i e u r e m ' e m p ê c h a é g a l e m e n t de m e spécialiser trop é t r o i t e m e n t . Mes préférences personnelles m e portaient toutefois vers les problèmes si i m p o r t a n t s
de l'embryogénie générale et de l'éthologie des parasites. Les travaux des successeurs de C U V I E K et des disciples de J O H . M U L L E R avaient p r o d u i t u n a m o n cellement é n o r m e d'observations nouvelles insuffisamment coordonnées et cet
a m o n c e l l e m e n t allait croissant avec les perfectionnements de l'outillage,
.l'avais été bien vite frappé de la nécessité d ' e n t r e r dans la voie de la synthèse :
« Dans l'état actuel des sciences biologiques, écrivais-je en 1 8 7 9 , n ' i m p o r t e
qui avec quelques efforts, et u n peu de c h a n c e , p o u r r a a c c u m u l e r r a p i d e m e n t
de n o m b r e u s e s découvertes dans le d o m a i n e des faits. C'est ainsi q u ' e n organ i s a n t le travail des laboratoires les Allemands sont arrivés, en ces d e r n i e r s
temps, à u n e é n o r m e production scientifique. Il est p l u s difficile d'avoir des
i d é e s . . . ». La théorie de la descendance modifiée m e sembla le fil d i r e c t e u r
qui p e r m e t t r a i t de s'orienter d a n s ce l a b y r i n t h e , et, r e p r e n a n t la t r a d i t i o n de
L A . M A K C I C , j ' e s s a y a i de pénétrer d a n s cette t e r r e p r o m i s e révélée par D A R W I N d'où,
c o m m e l'a si bien dit u n e voix autorisée, les premiers explorateurs
avaient
rapporté les plus magnifiques
moissons.
1

Bientôt la ville de Paris, s'intéressant à mes efforts, proposa la création à la

Sorbonne d ' u n e chaire de Philosophie biologique que la Faculté des Sciences
s'empressa d'accepter en lui d o n n a n t le titre plus précis de cours d'Évolution
des èlres organisés. Désigné p o u r occuper cette c h a i r e , j ' a i dirigé de p l u s en
plus mes recherches vers les problèmes de biologie générale qui passionnent
a u j o u r d ' h u i le m o n d e scientifique.
Mon passage à la Faculté de Médecine de Paris c o m m e élève, à la Faculté de
Médecine de Lille c o m m e m a î t r e , a n a t u r e l l e m e n t attiré m o n attention s u r les
points les plus variés de la physiologie et de la pathologie.
D'autre p a r t , dans une région où l ' a g r i c u l t u r e et l'industrie occupent u n e
place p r é p o n d é r a n t e , il m'était impossible de m e désintéresser des applications
de la science, et d'ailleurs u n des p r e m i e r s professeurs de la Faculté de Lille,
le glorieux P A S T E U R , avait laissé à cet égard des traditions et des exemples qui
s'imposaient à tous ses s u c c e s s e u r s .
J'ai donc été a m e n é à c h e r c h e r aussi les moyens de c o m b a t t r e les e n n e m i s
1. Q u e l q u e s a n n é e s p l u s l a r d e t à p r o p o s d ' u n
m ê m e p e n s é e : « Tenez, p o u r
variété

de

ses

productions,

la r e c h e r c h e , parce

qu'elle

certain
c'est


que

parce

a organisé,

si

autre ordre

qu'elle

a

trouvé

systématiquement

r a t i o n d u b u s t e d'Ai.mavr Dujio.vr l e 1") n o v e m b r e

de

s c i e n c e s , 3 1 . E . LAVISSE e x p r i m a i t l a

l'Allemagne l'emporte

1891.)

moyen


le travail.

sur

nous

par

l e n o m b r e e t la

de concilier l'enseignement
» (Discours prononcé à

avec

l'inaugu-


de nos récoltes, et j ' a i fait tous mes efforts p o u r adapter les méthodes Pasteuriennes à la lutte contre les insectes nuisibles.
Enfin les séjours fréquents que je faisais à Wimereux, d a n s le voisinage
immédiat du g r a n d port de pêche de Boulogne-sur-mer, m ' o n t conduit à l'étude
des questions de zoologie aquicole et de p i s c i c u l t u r e .
Ces études de zoologie appliquée, j ' a i dû les continuer depuis ma nomination à Paris, dans les deux directions où je les avais entreprises, c o m m e
m e m b r e du Comité consultatif des pêches m a r i t i m e s , et comme m e m b r e de la
Commission technique pour l'étude des insectes nuisibles, près le ministère de
l'Agriculture.
C'est ainsi que pas à pas j ' a i p a r c o u r u à peu près tout le cycle des éludes
biologiques. Que j e ne l'aie pas fait i n f r u c t u e u s e m e n t , c'est ce qui résultera,
j e l'espère, des n o m b r e u s e s appréciations élogieuses que je relèverai au cours

de l'exposé de m e s t r a v a u x .
On p e r m e t t r a ces citations à un candidat dont b e a u c o u p d'œuvres techniques offrent u n intérêt difficilement appréciable p o u r qui n'est pas spécialiste.
Il n o u s a p a r u utile d'invoquer en pareil cas les témoignages d'approbation
des savants autorisés de tous les p a y s .
Si j ' e m p r u n t e le plus souvent ces témoignages à des é t r a n g e r s , c'est
que les r e p r é s e n t a n t s les plus é m i n e n t s de la biologie française sont en ce
m o m e n t mes j u g e s et qu'ils c o m p r e n d r o n t la réserve qui m'est p a r cela m ô m e
imposée.
Le r é s u m é qui va suivre ne doit être considéré que c o m m e u n e table détaillée
m a i s incomplète des sujets que j ' a i traités. Je prie le lecteur de se reporter,
pour plus amples renseignements, à la partie analytique de celle Notice.
J'attire particulièrement l'attention s u r les points de m o n œuvre qui me
p a r a i s s e n t les plus originaux : la castration
parasitaire
(n 2 0 5 , etc.), la
pœcilogonie
(n 123, etc.), les modifications de l'organisme dues à la vie
pélagique et au parasitisme ( n 188 et 189), etc
os

os

os

I. — Zoologie, Anatomie comparée et Physiologie.
Il serait évidemment très injuste de m e s u r e r la valeur d'un zoologiste par le
n o m b r e des formes intéressantes qu'il a pu r e n c o n t r e r et décrire. Le h a s a r d
j o u e à coup s û r u n grand rôle dans les découvertes de cette n a t u r e , et un
simple coup de d r a g u e peut donner parfois ce qu'on n ' a u r a i t pas obtenu par de
longues années de patientes r e c h e r c h e s . On peut dire, cependant, que ces chances

favorables ne se reproduisent pas fréquemment et q u e , pour en tirer parti,
il faut aussi, en général, u n e certaine éducation de l'œil et une perspicacité
q u ' o n n ' a c q u i e r t q u ' a u prix de sérieux efforts. En o u t r e , il ne suffit pas de


découvrir des types r e m a r q u a b l e s , il faut encore savoir les m e t t r e en valeur
par une étude judicieuse portant à la fois sur l'anatomie et la biologie de l'être
considéré. Envisagées ainsi, les r e c h e r c h e s de zoologie et d'anatomie ne sont
pas seulement un simple e m m a g a s i n e m e n t de faits nouveaux : elles fournissent
la base solide s u r laquelle doivent s'édifier les considérations philosophiques,
c o u r o n n e m e n t de la science.
En 1877, j ' e u s la bonne fortune de découvrir, non pas u n a n i m a l nouveau,
mais toute une classe d ' a n i m a u x nouveaux que j ' a i appelés les
Orthonectidés.
Parasites des E c h i n o d e r m e s , des Turbellariés, des Némertiens et des Annélides,
ces organismes présentent, au point de vue de leur organisation et de leur
développement, des particularités si r e m a r q u a b l e s que leur découverte provoqua u n vif m o u v e m e n t de curiosité d a n s le m o n d e de la zoologie. Un m é m o i r e
accompagné de planches fut publié dans le Journal d'anatomie
et de physiologie de R O B I N et P O U C I I E T et, à la d e m a n d e du professeur R A Y - L A K K E S T E R , j e dus
faire p a r a î t r e une traduction de ce travail et des notes c o m p l é m e n t a i r e s dans
le Quarlerly journal of microscopical
science. (n 12 et 15.)
I I A E C K E L c r u t trouver dans les Orthonectidés des r e p r é s e n t a n t s du groupe des
Gastrêades,
c'est-à-dire des a n i m a u x qui gardent d'une façon p e r m a n e n t e la
s t r u c t u r e à deux feuillets possédée m o m e n t a n é m e n t par l'embryon de tous les
Métazoaires. E D . V A N B E N E D E N , de son côté, considéra les Orthonectidés r é u n i s
aux Dicyemidés c o m m e u n ensemble de p r e m i e r o r d r e , les Mésozoaires, intermédiaires entre les animaux monocellulaircs (Protozoaires) et les a n i m a u x
pluriccllulaires (Métazoaires).
os


La complication a n a t o m i q u e de ces êtres, en apparence si simples, leur
d i m o r p h i s m e sexuel joint à u n d i m o r p h i s m e plus étonnant encore du sexe
femelle, leur double évolution sexuelle et g e m m i p a r e (dans des sporocystes),
m ' o n t conduit à rejeter ces deux m a n i è r e s d e v o i r . Les Cyémariés (Orthonectidés
et Dicyemidés) sont des Gastrêades par régression p a r a s i t a i r e . Mais l e u r
existence m ê m e est un a r g u m e n t en faveur de l'existence de vrais Gastrêades
(actuels ou disparus), p u i s q u ' o n ne peut revenir en u n endroit q u e si l'on y a
déjà passé.
La ressemblance très g r a n d e des Orthonectidés avec les e m b r y o n s de Trématodes (Distomes), la présence de bâtonnets semblables à ceux des Turbellariés chez le Dicyema de la Seiche, le développement asexué dans des Sporocystes, sont a u t a n t de faits qui r a p p r o c h e n t les Cyémariés des Vers plats et
nous ont déterminé à r a n g e r ces a n i m a u x avec les T r é m a t o d e s , les Cestodes,
les Turbellariés et les Némertiens d a n s u n e m b r a n c h e m e n t u n i q u e , les Platgelmia.
Le Fecainpia ergthrocephala,
q u e j ' a i fait connaître en 1 8 8 6 , n'est pas moins
r e m a r q u a b l e à d ' a u t r e s égards. C'est le p r e m i e r exemple d ' u n Turbellarié


parasite des Crustacés s u p é r i e u r s (Crabes et Pagures). La vie parasite a a m e n é
la disparition complète du tube digestif, modification réalisée d'une façon
générale chez d'autres vers plats (Cestodes). Mais c o m m e Fecainpia
doit émigrer activement de son hôte à l'état adulte, il a conservé le revêtement ciliaire
des Planariés. Redevenue libre, cette étonnante Planaire sécrète u n e coque
résistante dans laquelle elle s'enferme pour pondre, phénomène a b s o l u m e n t
inconnu chez les a u t r e s a n i m a u x de. ce groupe (n° 16).
Je rappelle seulement en passant la découverte du Cerebrahdus
Priei,
Némertien géant qui peut atteindre 1 m . 20 de l o n g u e u r ; du Phreorycl.es
endeka, représentant, en F r a n c e , u n e forme américaine de l'IIlinois; du Pliotodrilus plwsphoreus Ï>VGÈS, curieux ver de terre acclimaté en divers points de
n o t r e territoire et originaire de l'Uruguay et de la Plata. Le Pliolodrihis
est un

ver de t e r r e doué d'une phosphorescence n o r m a l e et p e r m a n e n t e : son organisation a b e r r a n t e le r a p p r o c h e des Pontodrilus que les r e c h e r c h e s de M. E D M O N D
P É R I M E R nous avaient fait connaître d'une façon approfondie.
P a r m i les Annélides, j ' a i décrit, en 1880, le Linotrypane erylhrophlhalma
et
m o n t r é que les Polygordiens, considérés à tort c o m m e les Annélides les plus
primitives, n'étaient, en réalité, que des Opheliadés modifiés par le genre de
vie très particulier qu'ils m è n e n t dans le sable à Amphioxus. Les Polynoe commensales des Echinodermes et des Annélides m ' o n t fourni un certain n o m b r e
de types nouveaux intéressants p o u r la morphologie de ce g r o u p e d'Aphroditiens (n° 29).
Profitant du séjour dans le Haut Tonkin d'un de mes anciens élèves, le doct e u r B I L L E T , j ' a i découvert en 1 8 9 3 , dans les coquilles de Melania du fleuve de
Cao-Bang, u n e Sabellide perforante à caractères très a r c h a ï q u e s . C'est le second
exemple d ' u n e Polychœle d'eau douce, et, depuis L E I D Y , personne n'avait rééludié
le curieux Manayunkia speciosa de l'Amérique du Nord (n° 31).
Pendant p l u s i e u r s années nous avons, en collaboration avec M. J. B O N K I E U ,
r e c h e r c h é les Epicarides parasites des Crustacés s u p é r i e u r s . Un h e u r e u x hasard
m'avait fait r e t r o u v e r en 1878, s u r la côte ouest de France, la p r e m i è r e forme
décrite de ce groupe d ' a n i m a u x , YEntoniscus Cavolinii,
que personne n'avait
revu depuis près d ' u n siècle et que C A V O L I M n'avait fait connaître que d'une
façon très insuffisante, p r e n a n t la femelle adulte pour la ponte d'un autre
Crustacé.
Des r e c h e r c h e s persévérantes nous ont révélé l'existence dans nos m e r s d ' u n e
série n o m b r e u s e d'Entonisciens, de Cryptoniscicrys, d'Ioniens, de Céponiens,
dont l'élude morphologique présente des p r o b l ô m e s ' a u s s i i m p r é v u s que variés.
Plusieurs m é m o i r e s i m p o r t a n t s et accompagnés de planches coloriées ont été
consacrés à l'histoire de ces a n i m a u x . On a u r a quelque idée des difficultés
2


pratiques q u ' i l nous a fallu s u r m o n t e r si n o u s disons q u e , p o u r trouver le
matériel de nos dissections, nous avons dû ouvrir plus de 1 0 0 0 0 crabes de tous

genres et que ce travail devait être exécuté la loupe en m a i n p o u r ne pas laisser
échapper les formes j e u n e s des parasites que nous poursuivions (n 44-67).
La publication des p r e m i e r s r é s u l t a t s obtenus n o u s valut les encouragemenls
les plus flatteurs et le concours d ' u n g r a n d n o m b r e de zoologistes. Bientôt, le
professeur A. A G A S S I Z n o u s confiait les Ëpicarides du Muséum d'Harvard Collège,
le docteur DonitN ceux d e l à station zoologique de Naples, les professeurs M E I N E R T
et H.-J. H A N S E N la collection du Musée de Copenhague, M . A. M I L N E - E D W A R D S
plusieurs formes intéressantes recueillies dans la c a m p a g n e du T a l i s m a n ; des
envois n o u s étaient également adressés d'Angleterre, p a r MM. N O R M A N , S T E B B I N G ,
I I O Y L E , T H . S C O T T ; de la Méditerranée, p a r MM. D E L L A V A L L E et W . M Û L L E R ; de
l'Océan Atlantique, par MM. C H E V R E U X et V I A L L A N E S ; de Norvège, p a r le professeur
G. O. S A R S ; d'Amérique, p a r le D F E W K E S ; des Indes et d'Océanie, p a r MM. M A X
W E B E R , H E N D E R S O N , G E O . T H O M P S O N , etc. Grâce à ces richesses, n o u s avons pu
étendre nos investigations et les faire porter s u r des groupes absolument nouveaux p o u r la science : les Ëpicarides parasites des Arthrostracés (Amphipodes
et Isopodes) et n o u s avons m ê m e signalé le cas singulier d'un Isopode, parasite
d'un Isopode vivant l u i - m ê m e dans la cavité i n c u b a t r i c e d ' u n Amphipode
(n<> 6 0 ) .
Les modifications de l'organisme de ces a n i m a u x sont a b s o l u m e n t déconcertantes p o u r le morphologiste. Un m ê m e organe, d ' u n e importance physiologique capitale, la cavité où se développeront les e m b r y o n s , p e u t être produite
tantôt p a r des lamelles homologues de celles qui existent chez tous les Arthrostracés, tantôt p a r les é p i m è r e s , tantôt p a r des replis de la partie latérale du
corps.
Le d i m o r p h i s m e sexuel, le développement successif des deux sexes chez u n
m ê m e individu, les modifications que l'âge entraîne dans la morphologie si
complexe de ces parasites, constituent a u t a n t de points s u r lesquels n o u s n o u s
s o m m e s efforcé de jeter quelque l u m i è r e . Et n o u s croyons y avoir en partie
r é u s s i , de l'aveu m ê m e des j u g e s les p l u s compétents.
En effet, le Rév. Th. S T E B B I N G , m e m b r e de la Société royale de Londres,
le savant a u t e u r de la m o n o g r a p h i e des Amphipodes du Challenger, déclare
que, si dans ces trente dernières années divers zoologistes ont jeté quelque
lumière s u r divers points de l'histoire des Ëpicarides, c'est s u r t o u t vers la fin
de cette période que les travaux de MM. G I A R D et B O N N I E R ont introduit

l'ordre
et. la clarté dans la question. « Les mémoires de ces observateurs,
ajoute-t-il,
ne seront, pas facilement surpassés et feront longtemps autorité pour ce groupe
zoologique'. »
os

R

1. a . . . . A n d i n tlio l a l l c r p a r t of t l i â t p e r i o d t h e l a b o u r s of MM. GIARD a n d BONNIER h â v e i n t r o d u e e d
o r d e r a n d c l o a r u e s s i n t o its a r r a n g e m e n t . T h e w r i t i n g s of t h è s e l a s t - n a m e d o b s e r v e r s w i l l n o t s o o n

or


D'autre p a r t . D A L L A S , r e n d a n t compte de nos Contribution*
à Vélude des
Bopyriens d a n s le j o u r n a l anglais Annals and magazine of natural
liislory.
écrivait en 1888 :
« Autant que j ' e n puis j u g e r , cet ouvrage est a d m i r a b l e . Le sujet est traité
si complètement et d ' u n e façon manifestement si consciencieuse, que ce travail
rappelle beaucoup (not a little) les œuvres du grand n a t u r a l i s t e anglais, dont
n o u s déplorons si vivement la perte. En fait, c'est vn livre que C H A R L E S D A R W I N
eût accueilli à bras ouverts . »
1

Un a u t r e g r o u p e d'Arthropodes également intéressants par les modifications
dues a u parasitisme, les Cirripèdes Rhizocéphales, ont depuis longtemps attiré
m o n attention. Mes publications de 1 8 7 3 , 1 8 7 4 et 1888 ( n 35-37) ont apporté

u n large contingent de faits nouveaux s u r l'anatomie et le développement de
ces formes dégradées. En m o n t r a n t que la Sacculine des Brachyoures présente
u n e symétrie réelle, différente de la symétrie apparente à laquelle on s'était
attaché j u s q u ' a l o r s , en i n d i q u a n t son orientation constante p a r rapport à l'hôte
qu'elle infeste, j ' a i r e n d u possible u n e comparaison rationnelle et u n e homologation avec le Peltogasier parasite des Pagures et, par suite, avec los Cirripèdes
Pédoncules n o r m a u x , dont les Rhizocéphales ont tiré leur origine.
os

P a r m i mes n o m b r e u s e s publications relatives a u vaste ensemble des Insectes
( n 69-81), je r e t i e n d r a i seulement celles qui ont trait au Margarodes
des
vignes du Chili. L'histoire de cette Cochenille s o u t e r r a i n e a e m b a r r a s s é bien
des zoologistes. Un entomologiste r e n o m m é l'avait considérée c o m m e la femelle
d ' u n Nématode (Ileterodera) e n k y s t é e ; u n a u t r e , non moins expert, la prenaiL
pour u n e j e u n e larve de Cigale; u n troisième, enfin, croyait avoir sous les yeux
u n e ponte de Lombriciens. Il s'agissait, en réalité, d ' u n Homoptèrc voisin de
la Cochenille de Pologne, le Porphyrophora,
dont le cycle évolutif était, d'aill e u r s , t r è s insuffisamment connu.
Je devrais rappeler encore ici mes m é m o i r e s s u r l'anatomie comparée,
l'embryogénie et la classification des Synascidies, qui m ' o n t d e m a n d é plusieurs
années de travail opiniâtre. Mais les résultats q u e j ' a i obtenus dans cette direction sont depuis longtemps devenus classiques et les belles monographies de
D E L L A V A L L E , de H E R D M A N , de V O N D R A S C H E , c o m m e les r e c h e r c h e s plus récentes de
os

easily be

s u p e r s e d e d a s t h e l e a d i n g a u t h o r i t i e s o n t h i s t r i b e . » (STKHBIXI;, liislory

of


Crwslacea,

1893,

p . 3 9 2 . ) L e c h a p i t r e xxvi {p. 3 9 2 - 4 2 0 ) d u l i v r e d e STEMHXG e s t u n r é s u m é t r è s c o m p l e t et t r è s e x a c t
n o s r e c h e r c h e s s u r les
1. a So f a r
r e s p e c t s , in

as

one

de

Épicarides.
can

j u d g e t h e a u t h o r s ' w o r k lias h e e n m o s t a d m i r a b l y d o n c ;

ils t h o r o u g h n e s s a n d

in

i'act, in

some

é v i d e n t t r u t h f u l n e s s , e s p e c i a l l y , i l r e m i n d s o n e n o t a l i l t l e of


the

w o r k s of t h e g r e a t E n g l i s l i n a t u r a l i s t w h o s e l o s s w e ail slill r e g r e t s o h e a r t i l y . I t i s , i n f a c t , a b o o k ,
t h a t CIIAHI.ES D.UIWIX w o u l d h a v e w e l c o m e d w i t h o p e n a r m s . » {AnnaLi
p.

52.)

and

Mit;/.,

G ser.,

vol. I , 1 8 8 8 ,


m o n ộlốve M. C A U L L E R Y , n ' o n t fait que confirmer, en les ộtendant et les gộnộralisant, les conclusions principales auxquelles j ' ộ t a i s arrivộ dốs 1872 (n 82-86).
Si je n'ai pas citộ dans ce titre la note que j ' a i publiộe s u r le Lithocystis
Sclmeideri,
Myxosporidie parasite des Oursins irrộguliers
(Echinocardium
cordalum), c'est que les caractốres des Sporozoaires me paraissent les r a p p r o cher plutụt des vộgộtaux que des a n i m a u x . Le Lithocystis occupe, ộvidemment,
une position tout fait part dans ce groupe trốs a b e r r a n t et, par son action
s u r l'organisme des Oursins, il fait songer aux parasites du m ờ m e o r d r e qui
d ộ t e r m i n e n t l'infection paludộenne chez les a n i m a u x s u p ộ r i e u r s ( n 1-4).
os

os


II. Embryogộnie

cellulaire.

S'il est toujours nộcessaire, pour apprộcier les travaux d ' u n h o m m e de
science, de se reporter l'ộpoque oự ces t r a v a u x ont ộtộ publiộs et de tenir
compte de la faỗon dont se posaient alors les questions ộtudiộes, cela est
bien plus indispensable encore lorsqu'il s'agit de publications relatives des
problốmes r ộ c e m m e n t abordộs, m a i s dont la solution a fait de rapides progrốs
grõce aux perfectionnements incessants de la t e c h n i q u e .
Telles sont les recherches touchant la division de la cellule et les phộnomốnes initiaux du dộveloppement des ờtres vivants.
A l'ộpoque oự p a r u r e n t mes p r e m i e r s m ộ m o i r e s s u r la fộcondation et la
cytologie e m b r y o n n a i r e des Echinodermes, des Mollusques et des Annộlides,
B U T S C I I L I et S T R A S B U R G E R venaient peine de nous faire connaợtre les traits gộnộraux de la caryokinốse (division cellulaire) et la valeur i m p o r t a n t e des ộlộments
c h r o m a t i q u e s du n o y a u . Ces vues nouvelles ộtaient encore fortement contestộes
p a r la majoritộ des biologistes, et, au Congrốs international de botanique tenu
A m s t e r d a m en 1877, le professeur B E K E T O F , de Saint-Pộtersbourg, se fit l'interprốte de ceux qui attribuaient des artifices de prộparation et l'action des
rộactifs colorants les aspects dộcrits sous le n o m 'amphiaslers,
de figures
caryoiyliques,
ete.
Des observations faites s u r l'uf vivant de divers a n i m a u x (Oursins,
ậolidiens, etc.) m e p e r m i r e n t de protester contre cette opinion r e t a r d a t a i r e
(n" 88) et j ' e u s la satisfaction de c o m p t e r dans la minoritộ qui partageait
mes convictions l'illustre m B A U Y et le professeur M. T R E U B , a u j o u r d ' h u i
directeur du j a r d i n botanique de Buitenzorg.
Vers le m ờ m e m o m e n t , les travaux des frốres H E R T W I G et de I I . F O L dộmontraient que le p h ộ n o m ố n e de la fộcondation consiste essentiellement dans la
conjugaison de deux ộlộments nuclộaires (pronuclei) provenant l'un du noyau
de l'ovule, l'autre du noyau spermatozoùdal. Mais 0 . H E R T W I G soutenait que le
pronucleus

femelle n'ộtait a u t r e que le nuclộole de l'uf survivant la


dissolution de la vésicule germinative. Ainsi ni le protoplasme ovulairc ni
m ê m e la plus g r a n d e partie du noyau ne jouaient a u c u n rôle dans la formation de l'être n o u v e a u . J'ai m o n t r é (n° 89) que chez VAmphidolws
cordatus il existait e n t r e le nucléole (tache de Wagner) et le pronucleus
femelle
u n e telle différence de taille que l'opinion de H E R T W I G devenait difficilement
acceptable et qu'il convenait de faire intervenir le réseau de la vésicule (c'est
le n o m q u ' o n donnait alors aux éléments chromatiques) dans la constitution
du
pronucleus.
L'œuf avant la fécondation donne naissance à des productions singulières
désignées sous le n o m de globules polaires
ou de corpuscules de
direction.
L'origine et le m o d e de formation de ces éléments avaient suggéré les hypothèses les p l u s variées et les plus contradictoires. En dehors de leur signification
t o p o g r a p h i q u e , l e u r valeur morphologique était entièrement i n c o n n u e .
En étudiant les débuts de l'évolution chez u n grand n o m b r e d ' a n i m a u x
a p p a r t e n a n t e des groupes différents, j ' a i m o n t r é dès 1876 que les globules
polaires naissaient p a r le procédé de division cellulaire indirecte et qu'on
devait les considérer c o m m e des cellules rudimenlaires
présentant avant tout
u n e signification atavique. Ils rappellent dans le développement des êtres
pluricellulaires la reproduction p a r cellules libres des Protozoaires.
Dès 1 8 7 7 , le professeur B H T S C H L I se ralliait à cette m a n i è r e de voir. « Il
ressort de tout cela, écrivait-il, que l'opinion émise par G I A R D sur l'origine de
ces corps p r o b l é m a t i q u e s , opinion dont la g r a n d e vraisemblance m'a frappé
aussi de m o n côté, s'accorde très facilement avec mes observations a n t é rieures *. »
WHIÏMAK,

0 . H E R T W I G , B O V E R I , J U L I N , ont depuis confirmé mes premières
r e c h e r c h e s et F L E M M I N G les a appuyées de sa haute autorité.
Dans de nouvelles publications ( n 95-95), j ' a i complété ma démonstration
en prouvant : 1° que les globules polaires secondaires naissent souvent par le
procédé de division directe, c'est-à-dire par u n mode abrégé et condensé si on
le c o m p a r e à la mitose; 2° que ces globules peuvent faire défaut; 5° que
l'absence du second globule primaire chez les œufs parthénogénétiques n'est
également q u ' u n fait de condensation embryogénique auquel on ne peut
a t t r i b u e r l'importance actuelle que lui a t t r i b u e W E I S M A N N p o u r la théorie de
l'hérédité.
Enfin, la naissance des globules polaires peut être mise en parallèle avec
certains p h é n o m è n e s découverts par M A U P A S chez les Infusoires ciliés au
m o m e n t où se p r é p a r e la conjugaison. Mais j e n'ai vu dans ces faits q u ' u n e
os

1. « Es gelit d a r a u s j e d e n f a l l s l i e r v o r d a s s die v o n
der

fraglichen

Korper

auf

dessen

a u f m e r k s a m , w u r d e sicb mit
[Zeilschr.

/'. wiss.


Zool..

grosse

meinem

I)d X X I X ,

frûheren

1877, p .

GIARD g e i i u s s e r t e A n s i c l i t i i b e r d i e

YVahrsclieinlichkeil
lieobaclitungen

216.)

ich

bin

l e i o l i t in

auch

Entstebuiig


unabbiingig

Einklang

bringen

von

ilim

làssl.

»


intéressante homologie et m e suis refusé à considérer les Infusoires ciliés
c o m m e les ancêtres directs des Métazoaires. Leur constitution
monocellulaire
mais plurinucléée
et la h a u t e différenciation de l e u r s éléments plastidulaires
indiquent suffisamment q u e ces a n i m a u x représentent non des formes ancestrales, mais u n groupe t e r m i n u s .
Comme corollaire de celte étude des globules polaires,
j ' a i été conduit à
m'occuper d'autres productions d ' a p p a r e n c e cellulaire qui naissent de l'œuf
de certains a n i m a u x au m o m e n t m ê m e où apparaissent les corpuscules de
direction. De là des e r r e u r s et de fausses homologations qu'il i m p o r t a i t de
rectifier.
C'est ainsi que j ' a i fait connaître l'origine vitelline des sphères hyalines
observées à la p é r i p h é r i e de l'œuf m û r de quelques Méduses Phanérocarpes
(n° 9 6 ) et r a p p r o c h é ce p r o c e s s u s de celui signalé p a r W E I S M A N N pour la

formation de la coque de l'œuf chez les Cladocères.
Chez les Tuniciers, j ' a i repris l'étude des singuliers é l é m e n t s c o n n u s sous le
n o m de cellules du lesta ou cellules granuleuses et qu'à l'exemple de K U P F F E R
j ' a v a i s considérés d'abord c o m m e dérivant aussi du vilellus. Depuis, F O L et
SABATIER
les faisaient a u contraire sortir de la vésicule g e r m i n a t i v e . J'ai
reconnu qu'il s'agissait de cellules folliculaires absorbées par l'œuf à u n e
époque très précoce et rejetées plus t a r d après avoir subi u n e fragmentation
en deux ou q u a t r e m o r c e a u x . Contrairement à l'opinion émise p a r S E M P E R ,
ces prétendues cellules granuleuses
ne sont donc pas les homologues des
globules polaires et n'ont m ê m e pas individuellement la valeur d ' u n e cellule
(n° 107).
Sur l'œuf de plusieurs Annélides de la famille des Spionidiens, il existe u n
cercle équalorial de sphérules t r a n s p a r e n t e s signalées p a r les anciens observateurs ( C L A P A R È D E , etc.), et dont la signification demeurait é n i g m a t i q u e . J'ai
fait voir que ces sphérules sont des invaginations de la coque de l'œuf et restent
en c o m m u n i c a t i o n avec l'extérieur p a r u n lin canal d é b o u c h a n t à la surface;
on doit les considérer c o m m e j o u a n t u n rôle dans la dissémination de la ponte,
peut-être aussi c o m m e servant à l'entrée des spermatozoïdes.
En étudiant avec soin l'œuf ovarien d'une de ces Annélides (Spio
bombyx,
j ' a i été témoin d ' u n très c u r i e u x p h é n o m è n e absolument inconnu
j u s q u ' a l o r s . Un petit élément nucléé situé dans la vésicule germinative s'approche du nucléole de l'œuf, s'applique sur ce nucléole en se déformant peu à
peu et finit par disparaître p a r u n e sorte de conjugaison. Les diverses phases
de ce p h é n o m è n e ne pouvant être observées que s u r des œufs différents
obtenus par dilacération ou par des coupes de l'organisme m a t e r n e l , il est
évident que l'ordre dans lequel je les ai exposées p o u r r a i t être renversé et que
CLAP.),



l'on p o u r r a i t considérer le corps nucléé intravésiculaire c o m m e u n e émanation
du nucléole (n° 97).
Quoi qu'il en soit, il s'agit là d ' u n p h é n o m è n e qui n'a pas suffisamment
attiré l'attention des embryogénistes et dont l ' i m p o r t a n c e est peut-être très
g r a n d e . Car des faits plus ou moins semblables ont été décrits naguère dans
l'œuf de certains Mollusques Acéphales (Unio, Dreissemia,
etc.), et plus
r é c e m m e n t V E J D O W S K Y (Sternaspis),
ROUZAUD
(Zonites),
KORSCHEI.T
(Spinlher),
ont figuré des productions du m ê m e genre sans insister s u r leur signification.
Enfin, le p r e m i e r , j e crois, j ' a i signalé les p h é n o m è n e s d'histolyse et de
phagocytose qui se produisent d a n s les glandes génitales des Synascidics et
des E c h i n o d e r m e s lorsque ces glandes cessent de fonctionner. A N T . S C H N E I D E R
devait bientôt étendre ces observations à d ' a u t r e s a n i m a u x . Mais ce sont
s u r t o u t les admirables travaux de M E T C H N I K O F F qui ont mis en évidence la
généralité et la h a u t e i m p o r t a n c e de ces processus embryologiques.

III. — Embryogénie

descriptive et comparée.

J u s q u e dans ces trente dernières années on connaissait très peu les
p r e m i e r s stades évolutifs des a n i m a u x inférieurs. En dehors des Arthropodes
et plus spécialement des Insectes, les d o c u m e n t s les plus complets se trouvaient
d a n s les m é m o i r e s de J. M Û L L E R s u r les E c h i n o d e r m e s . Pour les a u t r e s Invertébrés m a r i n s les chapitres qui les concernaient dans les traités de zoologie
ou d'anatomie comparée se t e r m i n a i e n t invariablement par la phrase suivante :
« Ces a n i m a u x ont u n embryon infusoriforme.

»
Grâce à la création des laboratoires m a r i t i m e s , sous la vigoureuse impulsion
des disciples i m m é d i a t s de J. M H L L E R et s u r t o u t dans l'espoir d'apporter u n
faisceau de preuves nouvelles soit p o u r , soit c o n t r e les doctrines transformistes
remises en h o n n e u r p a r les livres de C H . D A R W I N , u n grand n o m b r e de zoologistes ont depuis environ 1860 environ dirigé leurs efforts vers l'étude des
développements larvaires.
Dès le début de m a carrière scientifique, j e suis e n t r é r é s o l u m e n t d a n s cette
voie et j e m e suis efforcé plus tard d'y e n t r a î n e r mes élèves. C'est ainsi que j ' a i
provoqué les r e c h e r c h e s de C H . B A R R O I S s u r les Eponges, celles de J. B A R R O I S s u r
les Némertiens et les Bryozoaires, celles de P. J I A L L E Z s u r les Turbellariés, celles
de R . M O N I E Z s u r les Cestodes, celles d e E . C A N U s u r les Copépodes, etc.
Pour ma p a r t je nie suis occupé plus spécialement de l'embryogénie des
Tuniciers, des Mollusques et des Annélides et je me suis attaché de préférence
à l'étude des formes qui présentaient quelque particularité r e m a r q u a b l e dans
leur organisation ou d a n s leur m a n i è r e de vivre. J'espérais ainsi, tout en


découvrant des états larvaires j u s q u ' a l o r s i n c o n n u s , a p p o r t e r en o u t r e q u e l q u e
l u m i è r e s u r les problèmes les plus difficiles de l'embryogénie générale.
Le développement de Lamellaria
perspicua,
que j ' é t u d i a i en 1 8 7 8 , m e
révéla des faits très c u r i e u x . Mon attention avait été attirée sur les pontes
de ce Mollusque en é t u d i a n t les Ascidies composées d a n s lesquelles il c r e u s e
son nid. En les faisant éclore en a q u a r i u m et élevant les e m b r y o n s j u s q u ' à
l'état de larve mobile, je r e c o n n u s que celle-ci avait été décrite sous le n o m
à'Echinospira
et classée p a r m i les Mollusques Hétéropodes. La r e s s e m b l a n c e
est d'ailleurs si grande que plus r é c e m m e n t encore M A C I N T O S H l'a figurée de
nouveau c o m m e une Atlanta, e r r e u r qu'il a bien vite r e c o n n u e d'ailleurs s u r

m e s indications. On c o m p r e n d quelle l u m i è r e cette découverte peut jeter s u r
la parenté des Hétéropodes et des Gastéropodes, les p r e m i e r s représentant la
phase e m b r y o n n a i r e des seconds adaptée à la vie pélagique (n° 1 0 1 ) .
P a r m i les Mollusques j ' a i observé de préférence les N u d i b r a n c h e s . S'il est très
difficile en captivité de faire franchir aux larves de ces a n i m a u x le stade
critique où elles p e r d e n t leur coquille e m b r y o n n a i r e , on peut facilement
combler cette lacune en r e c h e r c h a n t s u r les Hydraires du littoral les j e u n e s
Mollusques r é c e m m e n t transformés. La plage de Wimereux fournit d'ailleurs à
profusion presque toutes les espèces décrites d a n s la magnifique m o n o graphie de A L D F . R et H A N C O C K , et ce riche matériel facilite singulièrement le
travail.
E n t r e les diverses Annélides très c o m m u n e s s u r les côtes d u Boulonnais, j ' a i
choisi pour en étudier le développement Salmacina Dysteri, Annélide bourgeonn a n t e a p p a r t e n a n t au groupe des Serpuliens dont les larves étaient p r e s q u e
inconnues. Avec quelques précautions faciles à p r e n d r e on peut faire vivre
facilement les e m b r y o n s de Salmacina et obtenir en a q u a r i u m m ê m e très loin
de la m e r de j e u n e s colonies dérivant de larves fixées ( n 1 0 2 et 1 0 5 ) .
os

La comparaison des stades évolutifs des Annélides et des Mollusques m ' a
conduit à ce résultat i m p r é v u qu'il fallait a b a n d o n n e r la séparation de ces
a n i m a u x en deux e m b r a n c h e m e n t s proposée par C U V I E R et revenir aux idées
plus anciennes de L I N N É et de B R U G U I È R E O U m i e u x encore établir p o u r ces
Invertébrés r é u n i s à u n certain n o m b r e de groupes satellites (Brachiopodes,
Siponculides, Bryozoaires, etc.), u n e m b r a n c h e m e n t nouveau caractérisé
s u r t o u t p a r l'embryon Trocltosphœra.
C'est à cet e m b r a n c h e m e n t que j ' a i
d o n n é , dès 1 8 7 6 , le n o m de Gymnotoca (en raison de l'absence presque générale
d'enveloppes fœtales).
H A T S C H E K , R O U L E , D A D A Y , etc., ont défendu depuis la m ê m e m a n i è r e de voir et
proposé pour ce groupe fondamental des n o m s différents (Trochozoa,
Trochophova, e t c . ) . Peu i m p o r t e la désignation qui obtiendra la faveur des zoolo-



gistes. L'essentiel est pour moi le triomphe de l'idée à laquelle ces noms
servent d'étiquette.
On sait quelles discussions passionnées a soulevées la brillante découverte
de A. K O W A L E V S K Y lorsque, en 1 8 6 7 , il reprit et illustra par de nouvelles et très
intéressantes observations une vue ancienne de G O O D S I R et rapprocha l'embryon des Tuniciers de celui des Vertébrés. Le trait d'union était le merveilleux
Amphioxus qui, sortant de son é n i g m a l i q u e obscurité, allait bientôt devenir,
grâce aux efforts d'une pléiade d'habiles investigateurs, l'animal le mieux
connu de la création.
Dans une série de publications ( n 1 0 7 à 1 1 4 ) j ' a i pris part à ces discussions et apporté dans le débat u n grand n o m b r e de faits nouveaux tirés
de mes r e c h e r c h e s sur le développement des Ascidies simples et des Synascidies.
Tout en admettant les liens les plus étroits entre les Vertébrés et leurs
ancêtres les Tuniciers, j e cherchai à déduire cette parenté s u r t o u t des p r e m i e r s
états e m b r y o n n a i r e s (ligne primitive de la lordula, canal n e u r e n t é r i q u e , etc.),
plutôt que de l'appendice c a u d a l , dont la naissance pouvait être attribuée à
des nécessités m é c a n i q u e s et n'ôlre dans les deux groupes q u ' u n organe
homomorphe m a i s non homophyle (comme par exemple la queue des Cereaires
de Trématodes). Cette position m e valut d'abord des c r i t i q u e s de la part des
deux c a m p s opposés. Mais j ' e u s bientôt la satisfaction de voir r e n d r e justice
à mes t r a v a u x .
Le savant O S C A R S C H M I D T écrivait en 1 8 7 8 dans la 5 édition de son livre
Descendance et Darwinisme. :
« Divers adversaires de la descendance, voyant q u ' o n faisait r e m o n t e r l'arbre
souche des Vertébrés et p a r conséquent aussi celui de l ' h o m m e au delà des
Vertébrés et j u s q u ' à des animaux aussi inférieurs que les Ascidicns, ont laissé
éclater leur colère en expressions t r a n c h a n t e s , excluant toute discussion scientifique. Il en est a u t r e m e n t de ceux qui ont critiqué les observations de
K O W A L E V S K Y et de K D P P F E R et q u i , reconnaissant les faits, croient devoir s'écarter
dans l'interprétation. Parmi ceux-ci j ' a v a i s c r u , lorsque j'écrivais la première
édition de mon livre, qu'il me fallait compter A. G I A R D . Mais je n'avais lu de

lui à ce m o m e n t q u ' u n e critique relative à la p a r e n t é soupçonnée des Vertébrés et des Ascidiens. Cette supposition, je le déclare avec plaisir, était
erronée : A. G I A R D a beaucoup contribué à élucider l'histoire
naturelle
des
Ascidiens et il s'est montré transformiste
déclaré. »
os

E

« Encore à présent A. G I A R D prétend que les homologies de l'appendice des
Cynthia avec la queue des j e u n e s poissons résultent peut-être d'une tendance
à la production de parties homologues sous des influences identiques. C'est
cette assertion que j e ne puis a d m e t t r e ; mais, sans e n t r e r dans les détails.


j'avoue que l'interprétation
fournie par A . G I A H D du développement
de la Molgule me plaît beaucoup. » (l. c. p . 227.)

IV. — Embryogénie

condensé

générale.

Toutes ces r e c h e r c h e s d'embryogénie spéciale et comparée m ' o n t naturellement conduit à des conceptions plus nettes et plus précises des lois générales
du premier développement des Mélazoaires. Ce n'est pas le lieu d'exposer ici
la théorie des feuillets blastodermiques telle que j e la c o m p r e n d s et que je
l'enseigne dans mes c o u r s . Je dirai seulement que j e considère la gastrula

par invagination (archigastrula
de I I A E C K E L ) c o m m e la forme primitive des
animaux diblastiques et triblastiques. Les a u t r e s procédés de formation de la
gastrula (épibolie, d é l a m i n a t i o n , i m m i g r a t i o n , etc.), doivent être considérés
selon moi c o m m e des modes abrégés et condensés dont l'origine est due
s u r t o u t à l'accumulation des réserves nutritives e m b r y o n n a i r e s et à la façon
dont ces réserves sont emmagasinées.
h'amphigastrula
est le mode le moins modifié et celui qui se relie le plus
directement à Y archigastrula.
Le troisième feuillet (feuillet m é s o d e r m i q u e p r o p r e m e n t dit) dans son
développement typique p r e n d naissance p a r deux invaginations latérales au
voisinage du prostome (bouche de la gastrula). Les initiales m é s o d e r m i q u e s ,
les bandes m é s o d e r m i q u e s primitives, e t c . , représentent des modifications
cœnogénétiques du cas n o r m a l . Il en r é s u l t e q u e la cavité du corps définitive
(ccelom(>) est constituée o r i g i n a i r e m e n t par enterocœlie et que les formations
schizocceliennes sont p o u r n o u s des états secondaires.
Depuis longtemps l'étude comparative du développement e m b r y o n n a i r e
d ' a n i m a u x de la m ê m e famille, parfois m ê m e du m ê m e genre, m a i s h a b i t a n t
les u n s l'eau de m e r , les a u t r e s les eaux douces ou la t e r r e ferme, m'a p e r m i s
d'énoncer la loi générale suivante :
Dans un groupe déterminé la condensation
embryogénique
va en croissant
des types marins aux types d'eau douce ou
terrestres.
Le D V . W I L L E M , de l'université de Gand, dans ses belles recherches s u r
l'anatomie et l'embryogénie des Littorines, s'exprime ainsi : « Le p h é n o m è n e
que j e signale chez les Littorines (la viviparité des espèces terrestres et la condensation graduelle de l'embryogénie dans la série des diverses espèces de ce
genre et aussi de Lacuna) n'est q u ' u n cas particulier d'une loi énoncée p a r

G I A H D . Le professeur G I A R D en cite en dehors des Mollusques
de n o m b r e u x
exemples p a r m i lesquels celui de Palœmonetes varians est particulièrement
intéressant, p u i s q u ' o n voit dans cette espèce la condensation s'établir actuelr


lement, la forme de Wimereux (marine) ayant u n développement plus explicite q u e la forme de Naples (eaux douces). Chez les formes des profondeurs
qui deviennent littorales et q u i par suite sont soumises m o m e n t a n é m e n t à la
respiration presque aérienne la condensation embryogènique apparaît a u s s i ' . »
C'est p o u r n'avoir p a s connu cette loi fondamentale q u e tant d'embryogénistes ont étudié péniblement et sans g r a n d résultat utile p o u r la science le
développement e m b r y o n n a i r e de formes telles q u e la spongille d'eau douce,
l'écrevisse, la sangsue, e t c . Tous ces types d'eau douce séduisaient p a r le
volume relativement considérable de leurs œufs. Mais ce fait m ê m e résultant
de l ' a c c u m u l a t i o n de réserves nutritives était u n indice de condensation
embryogènique q u i devait faire prévoir de sérieux obstacles pratiques et u n e
interprétation plus difficile des phénomènes observés.
L'étude d u développement de formes d'eau douce ou terrestres ne doit être
abordée q u ' a p r è s l'examen des formes m a r i n e s c o r r e s p o n d a n t e s ; c'est un moyen
de contrôle et u n complément des données acquises grâce aux embryons
palingénétiques.
Mes recherches d'embryogénie comparée m ' o n t conduit encore à formuler la
loi suivante q u i m e paraît avoir u n e grande généralité :
Lorsque, dans le développement d'animaux
voisins, un organe prend naissance, tantôt par invagination
oureploiemenl
d'un feuillet cellulaire
(processus
Wolfien), tantôt par formation
d'une masse cellulaire pleine qui plus lard
peut se cliver ou se creuser d'une cavité, ce dernier mode de formation

doit
être considéré comme une condensation
du premier,
M . M A T H I A S D U V A L , q u i trouve cette loi très séduisante,
a bien voulu la désigner sous le n o m de loi de G I A R D et il en a fait d'ingénieuses applications au
placenta des chauves-souris (Murin) dans ses r e m a r q u a b l e s études s u r l'embryogénie des Chéiroptères .
Ces applications présentent d'ailleurs dans certains cas u n e grande difficulté
et exigent u n e longue expérience de l'embryogénie comparée. Il en est de
m ê m e p o u r le principe de F R I T Z M Ù L L E R (répétition d u développement de la
race p a r celui de l'individu), principe n a g u è r e entrevu p a r S E R R E S e t que
H A E C K E L appelle la loi biogénetique
fondamentale.
J'ai donné u n c r i t é r i u m q u i p e r m e t de t r a n c h e r plus facilement les cas
douteux. J ' a i fait r e m a r q u e r e n etïét q u e la disparition des organes ancestraux
qui logiquement devraient r é a p p a r a î t r e dans l'évolution ontogénique des êtres
vivants, était fréquemment indiquée p a r des p h é n o m è n e s de nécrobiose
2

1. ISullctin

Acad.

de Bruxelles,

Jmtrnal de VAnatomie

Tf s é r i e , t . XXIX, n " 1 , j a n v . 1 8 9 5 , p . 8 1 .

et de la Physiologie,


XXXII, "1896, n " 2 ,

112 et 117.


e m b r y o n n a i r e n o r m a l e comparable aux p h é n o m è n e s de nécrobiose pathologique si souvent observés c o m m e t e r m i n a i s o n dés néoplasmes (n° 121).
El, chose intéressante et très i m p o r l a n t e à noter, les a d m i r a b l e s recherches
de M E T S C H N I K O I ' T , de K O W A L E V S K Y , e t c . , s u r la phagocytose, sont venues compléter le parallèle et n o u s faire pénétrer plus i n t i m e m e n t d a n s le m é c a n i s m e
de ce processus embryogénique. Ce sont en effet les cellules migratrices du
inésoderme q u i , p e n d a n t l'évolution ontogénique, éliminent les organes ataviques en régression, de m ê m e que les phagocytes d é b a r r a s s e n t l'organisme
adulte des éléments dégénérés palhologiquement.
Le c r i t é r i u m de la nécrobiose phylogénique
a d'ailleurs été a d m i s plus ou
moins explicitement par u n grand n o m b r e d'embryogénistes, et certains d'entre
eux en ont fait la m ê m e application que moi-môme à la théorie de la
gastrula,'.
On pensait généralement que le développement d'un a n i m a l d é t e r m i n é ne
présentait chez les divers individus que des variations légères de m ê m e ordre
que celles observées chez l'animal adulte. Si des modifications p l u s considérables intervenaient, on était habitué à ne les voir se p r o d u i r e q u e d'une
façon périodique dans u n cycle d é t e r m i n é de générations, comme cela a lieu
pour les a n i m a u x dits à générations alternantes.
J'ai m o n t r é que dans une espèce, m ê m e aussi peu variable que possible à
l'état adulte, on r e n c o n t r e parfois des formes e m b r y o n n a i r e s très différentes
les u n e s des a u t r e s l o r s q u ' o n étudie le développement des embryons en divers
points de l'habitat de l'espèce considérée ou dans des milieux différents. Ainsi
un joli crustacé voisin de nos crevettes comestibles, le Palœmonetes
varions,
présente des larves tout à fait dissemblables selon q u ' o n l'étudié à Naples
dans les lagunes d'eau douce ou à Wimereux dans les étangs s a u m â t r e s en
c o m m u n i c a t i o n avec la m e r ( n ° 1 1 9 ) .

Ces faits é t o n n a n t s , que j ' a i désignés sous le n o m de pœcilogonie,
s'observent
dans un grand n o m b r e de groupes zoologiques. Ils se r a t t a c h e n t à u n e a u t r e
particularité non moins r e m a r q u a b l e et que j ' a i aussi longuement étudiée, la
progenèse,
c'est-à-dire la reproduction à l'état larvaire de formes parfois
susceptibles de continuer leur évolution et de se r e p r o d u i r e ensuite sous la
forme adulte typique du groupe auquel elles a p p a r t i e n n e n t ( n 125-125).
os

Les recherches fondamentales de C.-Fit. W O L F ont établi que les animaux se
forment par épigenèse et que les divers systèmes d'organes, tout en étant liés
par u n e dépendance réciproque plus ou moins étroite dans leur évolution
1. « Foi t c n l a m l o a r c s o l u e à o d ' e s t a s d i f i i c u l l a d e s ,
d'esla naturaleza

para o campo

s u a t h e o r i a d a degcne.raçâo
de

GiAïui

phylcticii

indien

nos que

da gaslraea.


do subjectivismo

gorditrosa
é na

normal,

arcbigastrulaçào

que inteiramente

tendiam

a r e l e g a r as

queslôes

p o r l'alla d e c r i t e r i o p o s i t i v o , q u e GIARD c o n c e b e u

o u necrobiosis

phylogenica

A applicaçao do

que devernos procurai' as n o r m a s do

» (EUUAHUO UUHNAY, Morphogenia


animal,

Lisboa,

a

principio

desenvolvimento

1 8 8 5 , p . 1 6 et 5 8 , )


e m b r y o n n a i r e , ne sont nullement prédéterminés. Il en résulle que des hétérochronies et m ê m e des hélérolopies sont possibles et l'on comprend aisément
que ces hétérochronies soient s u r t o u t fréquentes lorsqu'il s'agit de la formation de l'appareil r e p r o d u c t e u r qui, nécessaire s u r t o u t à la vie de l'espèce,
jouit d'une indépendance liés g r a n d e par rapport aux organes indispensables
à la vie de l'individu (n° 1 1 7 ) .
De là ces p h é n o m è n e s de m a t u r i t é sexuelle précoce (progenèse) qui ont
d'ailleurs un retentissement considérable s u r le développement de l'individu,
le modifient et m ê m e l'arrêtent soit t e m p o r a i r e m e n t (néofénie, dissogonie),
soit d ' u n e façon définitive (mâles pygmées ou complémentaires). Ainsi s'expliquent aussi ces singulières successions de phases sexuelles dont nous avons
signalé l'existence chez les Entonisciens. Un Enloniscus à l'état j e u n e ne possède
que les glandes génitales mâles. En grandissant et eu trouvant, grâce à la vie
p a r a s i t a i r e , u n e n o u r r i t u r e plus abondante, il devient h e r m a p h r o d i t e ; enfin
les j e u n e s mâles complémentaires le suppléant dans sa fonction tesliculaire
il t e r m i n e sa carrière c o m m e femelle, transformé en un vaste sac ovigère.
A cet o r d r e de questions se rattachent encore les transformations de l'organisme r é s u l t a n t de ce que j ' a i appelé la castration parasitaire
et qui, à un
a u t r e point de vue, peuvent être rangées, c o m m e je l'ai fait ci-dessous, dans
l'Elhologie générale des êtres vivants. Dans ces cas de castration la faculté

génératrice disparaît sans que le développement soit i n t e r r o m p u . Mais la forme
de divers organes est souvent profondément modifiée.

V. —

Taxonomie

: classifications

p/iyloyénit/ues.

Dire que l'embryogénie fournit à la systématique les données les plus utiles
et que toute classification p o u r être naturelle doit être généalogique, c'est à
l'heure actuelle affirmer une vérité banale et qui n'est plus sérieusement contestée par a u c u n biologiste. 11 n'en était pas de m ê m e il y a une vingtaine
d'années. Les méthodes subjectives étaient alors t r i o m p h a n t e s ou plutôt c h a c u n e d'elles t r i o m p h a i t de son côté et c h a q u e laxonoinisle se croyait en possession du t a l i s m a n précieux qui devait lui p e r m e t t r e de repenser la pensée
du c r é a l e u r . En présence du désarroi qui régnait dans la systématique et du
chaos d a n s lequel était tombée cette partie de ia science depuis que les grands
cadres établis p a r le génie autoritaire de C U V I E H avaient été r e c o n n u s insuffisants, on s'étonne des objections qui ont été faites si longtemps aux partisans
de la théorie de la descendance par ceux qui les accusaient de r e n d r e impossibles et méprisables tous les travaux des classificaleurs.
Evidemment les arbres généalogiques que nous c h e r c h o n s à établir aujourd ' h u i ne peuvent retracer d'emblée l'histoire complète et rigoureuse de l'évo-


lution phylogénique des divers groupes. Ils nous donnent seulement u n e
orientation pour la r e c h e r c h e et ils présentent s u r les anciens systèmes deux
avantages énormes : 1° nous ne croyons pas à leur i m m u t a b i l i t é et nous ne
nous illusionnons pas s u r leur valeur p u r e m e n t t r a n s i t o i r e ; 2° n o u s y trouvons fréquemment d ' h e u r e u s e s suggestions et l'indication de travaux à e n t r e
p r e n d r e p o u r le plus grand profit de la science.
Encore faut-il que ces arbres généalogiques ne soient pas u n i q u e m e n t le
produit d'une imagination plus ou moins ingénieuse à grouper les faits
acquis. Il est p r u d e n t d'abord de s'attacher, c o m m e le r e c o m m a n d a i t L A M A R C K ,

à la considération des masses, car pour les groupes secondaires rien n'est possible tant q u e les études ontogéniques n ' a u r o n t pas été multipliées avec a u t a n t
d ' a r d e u r qu'on en a déployé si longtemps au profit de l'anatomie p u r e .
En outre il faut dans ces travaux s u r la phylogénie suivre pas à pas le
développement parallèle des e m b r y o n s en t e n a n t compte des causes p e r t u r b a trices dues à l'action des milieux s u r l'embryon l u i - m ê m e , s u r t o u t q u a n d
celui-ci doit m e n e r u n e existence i n d é p e n d a n t plus ou moins prolongée.
Voici c o m m e n t dès 1876 j ' e x p o s a i s mes idées s u r ce sujet :
Le principe qui m'a g u i d é pour c e t essai de classification est ce qu'on pourrait appeler la
m é t h o d e de superposition

embryogènique.

P r e n a n t deux e m b r y o n s au m ê m e

s t a d e , j e les

place l'un sur l'autre, de façon que les parties h o m o l o g u e s c o ï n c i d e n t avec les parties h o m o l o g u e s . Si en u n point apparaît à un m o m e n t d o n n é u n o r g a n e qui n'est pas m o r p h o l o g i q u e m e n t équivalent à l'organe s u p e r p o s é , j ' a t t e n d s j u s q u ' a u stade s u i v a n t p o u r m e p r o n o n c e r ;
si la superposition r e d e v i e n t possible, j ' e n c o n c l u s qu'd y a e u abréviation de l ' e m b r y o g é n i e
et je cherche à m e r e n d r e c o m p t e des c o n d i t i o n s qui ont d é t e r m i n é cette a b r é v i a t i o n . Si la
divergence m o r p h o l o g i q u e
les d e u x types sont

s'accentue, j ' e n tire cette d é d u c t i o n , qu'à partir de ce m o m e n t

deux r a m e a u x différents du t r o n c

commun,

et

je


les suis c h a c u n

d a n s leur b r a n c h e spéciale jusqu'à de n o u v e l l e s bifurcations.
Il faut é v i d e m m e n t procéder avec u n e e x t r ê m e p r u d e n c e et n e pas p r e n d r e pour u n e diverg e n c e m o r p h o l o g i q u e i m p o r t a n t e ce qui peut être le résultat d'une adaptation transitoire à u n
g e n r e de vie s p é c i a l e : par e x e m p l e les n a g e o i r e s quelquefois s o u t e n u e s par des parties solides
qui apparaissent chez l e s e m b r y o n s m e n a n t

p e n d a n t quelque t e m p s u n e e x i s t e n c e

péla-

gique.
11 ne faut pas n o n plus n é g l i g e r les r é s u l t a t s que peut fournir l ' a n a t o m i e ; c e s résultats
auront toujours pour n o u s la valeur d'une preuve d ' a r i t h m é t i q u e , et m ê m e , e n certaines circ o n s t a n c e s , ils n o u s p e r m e t t r o n t

d'interpréter ce qu'il y a s o u v e n t d'obscur et de difficile

d a n s les cas d ' e m b r y o g é n i e c o n d e n s é e .
lin e x e m p l e fera m i e u x s u s i r notre p e n s é e :
La c o n c o r d a n c e parfaite que fournil la superposition des p r e m i e r s s t a d e s e m b r y o n n a i r e s et
la p r é s e n c e g é n é r a l e du stade Trochosphera

chez les Mollusques, les A n n é l i d e s p o l y c h è t e s , les

Rolifèrcs, les Brachiopodes et les Bryozoaires, n o u s m o n t r e
ces différents g r o u p e s a p p a r t i e n n e n t à u n e m ê m e

de la façon la plus é v i d e n t e q u e


niasse.

Que si l'on objecte que l'embryogénie des Oligochètes, des Hirudinées, des

Céphalopodes,

des Nématoïdes p r é s e n t e d e s d i s s e m b l a n c e s considérables avec celle des types p r é c é d e m m e n t
é n u m é r é s , j e répondrai que ces g r o u p e s sont t e l l e m e n t u n i s aux p r é c é d e n t s par u n e série de
formes voisines au point de vue a n a t o m i q u e

et o r g a n o g é n i q u e , q u e n o u s d e v o n s les c o n s i -


dérer c o m m e les e x t r é m i t é s de ces séries r a m e u s e s dont

LAMAISCK

signalait déjà l'existence au

sein de ses m a s s e s f o n d a m e n t a l e s . Peut-être m ê m e q u e l q u e s - u n s de ces g r o u p e s (.Néniatoïdes,
Oligochètes) ont-ils divergé de la s o u c h e c o m m u n e avant le stade Trochnsphera.

Il ne faut pas

en effet n o u s en laisser i m p o s e r par la forme extérieure et il y a plus de différence e n t r e un
Ascaride

et u n e Sevpula

qu'entre u n e Serpula


et u n e

Terebralula.

Mais il est infiniment plus probable, en raison de la c o n f o r m i t é a n a t o m i q u e d e s
et des Polychèles,

que dans ce c a s , au m o i n s , il y a eu s i m p l e m e n t falsilicalion de

g é n i e chez les p r e m i è r e s . WEuaxes

et le Lumbricus

l'orme de l'adulte, le s t a d e Trochos pliera

l'embryo-

devant sortir de l'œuf presque avec la

a é t é s u p p r i m é . Chez Limntuus,

e n c o r e une vie s e m i - l i b r e dans le liquide albumineux

OlUjachèles

où l'embryon m è n e

qui l'entoure, on trouve u n e t r o e h o -


sphère réduite en proportion de la liberté des m o u v e m e n t s .
De m ê m e pour les Ccplialopodcs,

que l'anatomie d é m o n t r e être très voisins des Mollusques,

il est fort probable que l'embryogénie a é t é s u c c e s s i v e m e n t c o n d e n s é e jusqu'au point où elle
se p r é s e n t e aujourd'hui, ce qu'on s'explique facilement par la longue série de modifications
qu'a subies ce type si a n c i e n , depuis les premiers t e m p s de l'époque silurienne, jusqu'à

nos

jours.
Une des plus g r a n d e s difficultés de la m é t h o d e e m b r y o g é n i q u e que n o u s s u i v o n s est la
r e n c o n t r e possible de c o n v e r g e n c e s d u e s a des c o n d i t i o n s d'existence similaires,

convergences

qui, s'exerçant sur des o r g a n i s m e s peu différenciés, leur i m p r i m e n t une similitude (elle que
les s e u l e s r é a c t i o n s c h i m i q u e s pourraient peut-être m e t t r e en é v i d e n c e les qualités h é r é d i taires des é l é m e n t s , différentes chez les deux e m b r y o n s c o m p a r é s .
C'est ainsi que j e m e

suis

l o n g t e m p s d e m a n d é si le stade

trochosphère des larves de

Bryozoaires e s t bien l ' h o m o l o g u e de la t r o c h o s p h è r e des Mollusques des b r a c h i o p o d e s et des
Annélides.
En effet, la superposition

J.

BAIIKOIS ont m o n t r é

n'est plus possible après ce stade et les belles r e c h e r c h e s

de

que la s e g m e n t a t i o n avait lieu par un processus très particulier et.

différent de celui observé d a n s les g r o u p e s d o n t n o u s v e n o n s de parler.

C'est en m ' a p p u y a n t s u r des considérations de celte n a t u r e que j ' a i pu
établir la psi rente très proche des Annélides et des Mollusques et créer le
phylum des Gymnoloca. C'est aussi en suivant celte méthode que j e me suis
efforcé de dresser l'arbre généalogique des Tuniciers, des Epicarides, des
Lombriciens, etc. ( n 136, 140, 144).
L'étude précise de la constitution c h i m i q u e des divers protoplasmes fournirait aussi d'excellentes indications pour la m e s u r e des affinités et pour la
phylogénie. C'est ainsi q u ' o n peut dire que l'organisation des Arthropodes est
dominée par l'existence chez ces a n i m a u x d ' u n protoplasme chitinogène, celle
des Tuniciers p a r l'existence d'un protoplasme p r o d u c t e u r de lunicose, etc.
(N° 8 2 ) .
os

VI. •— Etkologie

ou

mœurs


des

animaux.

« Il me semble q u e , depuis quelques années, on néglige trop les r e c h e r c h e s
éthologiques p o u r donner une i m p o r t a n c e exclusive à l'anatomie et à la phy-iologie proprement d i t e s ; il serait peut-être temps de revenir un peu à ce qu'on
a appelé la physiologie extérieure, c'est-à-dire à l'étude des m œ u r s des animaux


et de leurs rapports m u t u e l s . Cette étude p e u t jeter parfois u n e certaine l u m i è r e
s u r des questions en apparence bien étrangères au but i m m é d i a t q u ' o n se
propose, car tout s'enchaîne dans nos sciences de la n a t u r e et le développement
d ' u n m e m b r e profite à l'organisme tout entier. »
C'est par ces mots que je t e r m i n a i s en 1875 une courte note (n° 210 bis,
p . 267), dans laquelle je mordrais que l'observation attentive des m œ u r s des
guêpes aurait dû mettre, depuis bien longtemps, les physiologistes sur la piste
de fa découverte si importante de la glycogenèse du foie.
Dans la plupart de mes t r a v a u x , et s u r t o u t dans mes monographies des
Synascidies et des Ëpicarides, je me suis efforcé de r e m e t t r e en h o n n e u r ces
recherches éthologiqucs, qui ont fait la gloire de R É A C M O R , de H U R E R , de D i c Q I I E M A R E , et dont la tradition ne s'est pas e n t i è r e m e n t p e r d u e en F r a n c e , grâce
s u r t o u t aux belles et captivantes publications de M. F A R R E de Sérignan.
A ce genre d'études se r a t t a c h e n t également mes observations s u r les parasites des Insectes et des Araignées, s u r les migrations des Libellules, s u r les
c o m m e n s a u x des Spalangues, etc. ( n 147-185).
Je p o u r r a i également citer ici mes divers m é m o i r e s s u r la ressemblance protectrice et le mimétisme, que j ' a i cru devoir placer sous u n titre différent (voir
ci-après X, Biologie
générale).
Enfin, c o m m e appendice à ce chapitre, je citerai q u e l q u e s notes sur de faux
parasites des Crustacés et des Insectes, notes dans lesquelles j ' a i m o n t r é comment ce faux parasitisme pouvait s'expliquer p a r le genre de vie ou les particularités de reproduction des a n i m a u x chez lesquels on l'observe (n°* 184-187).
os


VII. — lithologie générale
Approfondir de plus en plus nos connaissances s u r la morphologie et l'embryogénie, séparer ce q u i , dans le développement, revient à l'action des milieux
et ce qui est l'héritage d'ancêtres disparus de façon à établir l'arbre généalogique des a n i m a u x et des plantes, tel est le b u t que se proposent tous les naturalistes m o d e r n e s . Mais dans cette tentative, r e n d u e déjà si difficile p a r l'insuffisance des données paléontologiques, u n obstacle é n o r m e surgit à c h a q u e
instant : la convergence des espèces, c'est-à-dire le fait très r e m a r q u a b l e q u e
des types phylogénétiqucinent bien séparés deviennent, grâce à certaines
influences biologiques, tellement semblables dans leur apparence extérieure
que non seulement l'œil inexpérimenté est induit en e r r e u r , mais encore q u e les
zoologistes les plus exercés apprécient d'une façon inexacte les affinités réelles.
En 1874, j ' a i indiqué des exemples de convergence de ce genre chez les
Crustacés parasites (n° 188) et bientôt après C A R L Y O G T exposait des idées analogues c o m m e conclusion de ses recherches s u r les m ê m e s a n i m a u x .


En 1875, j e signalai les ressemblances étonnantes qui exislenl entre certains a n i m a u x modifiés p a r la vie pélagique. Depuis, j ' a i souvent cilé dans mes
cours l'exemple des Cténophores que l'on a rapprochés des Cœlentérés à cause
de leur aspect et de leur s t r u c t u r e médusoïdc el qui sont cependant de proches
parents des Platyelmcs, puisqu'ils représentent la forme pélagique des Turbellariés auxquels les relient des types de passage Cœloplana
el
Clciioplana.
C A R L V O G T (1887), et H U T I I (1888), ont insisté comme moi sur l'importance
de la convergence, et M I V A R T , qui s'est occupé du m ê m e problème, a également opposé ce qu'il appelle la ressemblance
induite (indueed resemblance)
à la ressemblance
héréditaire.
Les p h é n o m è n e s de ressemblance protectrice et de m i m é t i s m e entrevus par
BERNARDIN DE SAINT-PIERRE
et mis en valeur s u r t o u t par les admirables travaux
de W A L L A C E ont, dès 1872, attiré mon attention.
Je me suis efforcé de prouver qu'il n ' é t a i t pas nécessaire d'aller chercher
sous les tropiques des exemples de ce genre cl que beaucoup d'animaux cl de
végétaux indigènes n o u s fournissaient, à ce point de vue, d'intéressants objets

de démonstration.
Bien avant P O U L T O N j ' a i fait voir l'importance de l'étude de la m i m i q u e des
insectes pour u n grand n o m b r e de problèmes de biologie générale, et j ' a i lente
une classification rationnelle des faits nombreux et variés que l'on groupait
sous la r u b r i q u e mimétisme ( n 190-192).
Tout r é c e m m e n t encore, j ' a i signalé sous le nom de mimétisme
parasitaire
u n e sorte de m i m i q u e inconnue j u s q u ' à présent : sous l'influence de certains
parasites l'être parasité, u n e chenille par exemple, prend u n aspecl tout dilièr e n t de celui qu'il avait, devient semblable à u n Mollusque el fournil ainsi
au parasite u n e défense précieuse contre ses ennemis (n° 193).
os

Je n e puis insister ici, malgré l'intérêt qu'elle présente, sur l'étude approfondie que j ' a i faite de la castration parasitaire
(n 196-209). On sait que sous
celte désignation je comprends tous les phénomènes d ' o r d r e morphologique
ou physiologique q u ' e n t r a î n e dans l'organisme d'un être vivant la présence
d'un parasite qui, soit directement, soit indirectement, agit sur la fonction
génitale de l'hôte considéré (cette action pouvant aller d'ailleurs de la castration complète à u n simple affaiblissement de la puissance génératrice).
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Parmi les modifications dues à la castration parasitaire, les plus étonnantes
à coup s û r sont celles qui atteignent les caractères sexuels secondaires, c'est-àdire les attributs extérieurs des sexes. Sous l'influence d'un parasite, une
femelle d'oiseau prendra le p l u m a g e du m â l e ; un crabe mâle verra ses fortes
pinces d i m i n u e r et sa queue s'élargir c o m m e celle des femelles pour abriter
non des œufs puisqu'il ne pondra pas, mais le parasite lui-même a u t e u r de
celle transformation. Une abeille mâle a c q u e r r a les brosses qui servent à la
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femelle pour la récolle du pollen, besogne qu'il n'accomplira j a m a i s , e l c , clc.

Tous ces fails si singuliers ont u n e telle évidence qu'on doit s'étonner surtout qu'ils aient si longtemps échappé à la sagacité des observateurs. C'est
q u ' o n ne voit bien que ce que l'on veut voir et que nous pouvons appliquer à
ces problèmes de biologie ce que J A C O R I disait à propos de certains théorèmes
de m a t h é m a t i q u e s : Jfabemus hic pnvclarum
exeniplum, nisi animo
pr,vformal a ninl problemala,
fi cri passe ni vel an te oculos posila, gravissima
inventa
non
videamiis.
La castration parasitaire p e r m e t aussi d'appliquer la méthode expérimentale à tout u n ordre de sujets très complexes et très obscurs où il semblait
que cette m é t h o d e ne dût pas avoir prise de longtemps. Il est inutile d'insister
s u r la lumière que ces expériences délicates, iéalisées sous nos yeux par la
n a t u r e , peuvent jeter s u r les questions la physiologie sexuelle et s u r la
morpliogénie. Ko semble-l-il pas aussi que dans ces cas curieux le parasite
modifie dans une certaine m e s u r e la constitution du protoplasme de son hôte?
La castration parasitaire nous apporte enfin tout u n contingent de données
nouvelles s u r l'origine des instincts, et en particulier sur les origines de
l'amour m a t e r n e l .
Ce sentiment si noble et si perfectionné chez les a n i m a u x s u p é r i e u r s , n'est
dans le début que le résultat d'avantages réciproques symbiotiques entre la
mère et le fœtus parasite de celle-ci. Lorsque ces r a p p o r t s s'établissent non
entre la m è r e , mais e n t r e le père et le produit (comme chez certains poissons,
chez certains batraciens et m ê m e certains a n i m a u x inférieurs), l'instinct maternel est remplacé par l'instinct paternel.
On peut m ê m e , par la castration, transformer les instincts d'un animal et
lui l'aire acquérir ceux du sexe opposé.
On savait depuis R K A U M U R que certains Crustacés peuvent a b a n d o n n e r tout
ou partie de leurs m e m b r e s par une a m p u t a t i o n spontanée qu'on a désignée
sous le nom d'aulotoinie. M . le professeur F I U C U E I U C Q , de l'université de Liège,
a étudié avec beaucoup de soin ce curieux p h é n o m è n e chez les crabes braehyourcs. J'ai l'ait voir que l'autolomie était très fréquent dans tout le règne

animal et qu'elle était liée tantôt à la défense de l'organisme
(autolomie
érasiee), tantôt à certains modes de reproduction (autolomie génératrice
ou
schhogoniè)
(n" 211). Depuis, les expériences que j ' a i entreprises sur la polymélie provoquée chez divers a n i m a u x (voir n o t a m m e n t n° 202) m'ont révélé
une nouvelle cause d é t e r m i n a n t e de l'aulotomie. Les sections artificielles opérées
suit, sur les pattes de certains b a t r a c i e n s ou de certains crustacés, soit s u r la
queue des lézards, déterminent fréquemment le dédoublement des parties régénérées, et cette régénération lératologiquc est évidemment désavantageuse
pour ces a n i m a u x . Elle ne se produit pas et la régénération est normale quand


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